Var-Matin (La Seyne / Sanary)

La ballade des gens heureux

- FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

résidences secondaire­s. » Ce qui, soit dit en passant, lui permet de vivre convenable­ment : « Je m’occupe d’entretenir des villas dont les propriétai­res sont absents tout l’hiver. » Le couple a deux enfants. « Les petits, ici, on n’a pas besoin de les surveiller », dit Judith qui se souvient d’un seul incident : « Un jour, les gendarmes nous en ont ramené un à la maison. Il faut dire qu’un homme était recherché après s’être évadé de prison. Le genre de chose qui se produit toutes les morts d’évêque...»

«Cabris, ça se paye »

« Loin de rien mais, déjà, à l’écart de l’agitation des grandes villes », résume Judith qui juge ce compromis idéal. Plus cher que SaintCézai­re ou Saint-Vallier, l’immobilier de ce village affiche des prix comparable­s à ce que l’on trouve à Vence. « Cabris, ça se paye » , observe la jeune femme. « Ici, je fais ce que je veux, personne ne me pousse. Tout ce que nous avons, nous le devons à notre travail. Je suis partie de rien, mais je trouve qu’avec mon mari, on s’en est bien sortis », argumente Judith qui veut le souligner : « En Slovaquie, il n’y a pas de CAF, ni de chômage. Si tu ne travailles pas, on te donne 20 euros par mois. » Olivier Buccellato, dit Lulu, est un artiste-peintre de 40 ans. Originaire de Grasse, il s’est implanté à Cabris après avoir bourlingué entre Paris et le reste de la France. Cet « amuseur mural », comme il se décrit, peint notamment des chats tout en multiplian­t les références à Basquiat. Il est là, le bonheur ? « Il ne lui manque qu’une femme et cinq gosses ! », corrige Judith dans un grand éclat de rire. « À Cabris, tout le monde se connaît mais ce n’est jamais pesant. Il y a de l’entraide. Des contacts, que ce soit avec les jeunes ou les vieux. Et ça, c’est beau », se félicite Lulu. Chez lui, aucun regret : « Être artiste, c’était mon rêve. Quels que soient les sacrifices. Je ne vis pas mal, mais je vis modestemen­t. Je sais me satisfaire, ça me suffit. »

« Pour notre fils »

Marjorie, 37 ans, est de retour après une année aux Antilles. Son fils Shayne y a fait sa première rentrée scolaire. « C’est pour lui que j’ai voulu revenir. Pour qu’il puisse fréquenter une école de village, avec toute l’attention que cela suppose. Un choix stratégiqu­e », assure cette jeune maman «unpeu écolo », assistante de direction dans une entreprise de parfumerie, à Grasse. A-t-elle réussi sa vie ? « C’est une question très large. Je suis tentée de répondre oui, la famille étant pour moi le premier critère de réussite. Le reste, on s’en accommode toujours. » Christelle, au village depuis quarante-deux ans, apprécie d’avoir pu offrir à ses deux enfants des jours tranquille­s : « On respire, contrairem­ent à Grasse, une ville tellement embouteill­ée ». Restauratr­ice, elle a repris un établissem­ent où le Petit Prince a laissé son empreinte : « La comtesse de Saint-Exupéry y avait ses habitudes, elle venait régulièrem­ent prendre son thé. » La clientèle s’est renouvelée, Jean Mus ou Jean-Michel Wilmotte ont remplacé la maman de Saint-Ex. «Je ne repartirai­s pour rien au monde », jure Christelle.

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(Photo Frantz Bouton ) Marjorie est rentrée des Antilles pour que son fils puisse fréquenter une « école de village ».

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