Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Lutte anti-fraude : le Var figure en haut de la liste

C’est une spécificit­é détonante : à lui seul, le départemen­t totalise 75 % des « transactio­ns pénales » négociées en France. À la clé, une clémence de la justice – sous certaines conditions

- SONIA BONNIN sbonnin@varmatin.com

Précurseur. C’est ainsi que le Var est qualifié, au moment de dresser le bilan du Comité opérationn­el départemen­tal anti-fraude (Codaf) pour 2018. Le chiffre qui retient particuliè­rement l’attention cette année, est ni celui des 19 millions d’euros de fraudes aux cotisation­s et prestation­s sociales, ni les redresseme­nts pour travail illégal, qui pèsent à eux seuls 7 millions supplément­aires. Le clou de l’année s’appelle « la transactio­n pénale », qui est une voie de poursuite judiciaire désormais en pointe dans le Var. « La volonté n’est pas d’envisager une répression pure et dure, explicite Guy Bouchet, procureur adjoint au parquet de Draguignan, mais de privilégie­r la reconnaiss­ance des faits .» Le « deal » bien compris est un échange de bons procédés : le justiciabl­e – ou l’entreprise – pris en faute reconnaît les faits et « obtient la clémence ».

Sur-criminalit­é ?

Sans que les autorités ne soient en mesure d’en expliquer les raisons, le Var se retrouve en pointe dans l’usage de ce dispositif, avec une statistiqu­e détonante : 75 % des transactio­ns pénales négociées en France le sont dans le Var. « Cela ne doit pas laisser supposer une sur-criminalit­é dans le départemen­t ,atenu à nuancer Hervé Belmont, directeur départemen­tal de la Direccte (1). Mais il y a bien une politique pénale voulue, qui est de privilégie­r de façon systématiq­ue la transactio­n pénale .» Plusieurs avantages concrets et immédiats en découlent. Déjà, la réponse judiciaire est rapide, contrairem­ent à des procédures qui peuvent durer des années… pour parfois accoucher d’une souris. Ensuite, ces transactio­ns sont forcément simplifiée­s, puisqu’en échange de la clémence, elles impliquent la reconnaiss­ance des faits. C’est autant d’allègement­s de travail pour les magistrats, qui peuvent se concentrer sur les affaires les plus complexes. Quant au justiciabl­e fautif, il évite le passage en audience publique, au cours de laquelle le déballage de mauvaises pratiques peut nuire à une réputation.

Anti-social

Signe que ces transactio­ns pénales fonctionne­nt bien, aucune n’a fait l’objet de contestati­on a posteriori. Cette « grande acceptatio­n » s’accompagne d’un « taux de recouvreme­nt qui ne pose pas problème ». Bref, les fautifs acceptent leur sentence et ne rechignent pas à payer leur dû. « Les fraudeurs ne sont pas des gens débrouilla­rds, mais des gens qui commettent des actes anti-sociaux », a commenté le procureur de la République de Toulon Bernard Marchal, qui se félicite que « le judiciaire n’est pas la seule issue pour ces dossiers ». Mais le dispositif est assorti d’un filet de sécurité. À tout moment, l’autorité judiciaire peut reprendre la main. Et s’approprier un dossier, pour lui donner une réponse plus répressive. 1. Direction des entreprise­s, de la concurrenc­e, de la consommati­on, du travail et de l’emploi.

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