Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Nicolas Dupont-Aignan : « Il faut rétablir les frontières »

Le chef de file de Debout la France aux européenne­s décline son projet dans Résistance, qui paraît aujourd’hui. Il veut restituer le pouvoir aux nations pour concentrer l’Europe sur de grands défis

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON tprudhon@nicematin.fr

Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France et tête de liste de son parti aux européenne­s, publie, aujourd’hui, Résistance, comment en finir avec ce système et rendre le pouvoir aux Français (1). Un livre qui redessine son projet, bien audelà de l’échéance du 26 mai.

Dans sa tribune sur l’Europe, Emmanuel Macron propose notamment un contrôle plus rigoureux des frontières et un bouclier social européen. Vous n’êtes pas d’accord ?

Le problème, c’est qu’Emmanuel Macron a déjà promis ce genre de politique, mais qu’il fait le contraire depuis qu’il est élu. Qui va le croire maintenant ? Il parle des frontières européenne­s et non pas nationales. De surcroît, il a toujours défendu la répartitio­n obligatoir­e des migrants entre les pays. Si on suit sa logique, cela aboutira non pas à des frontières mieux contrôlées, mais à une répartitio­n autoritair­e des migrants dans chaque pays. Sur le bouclier social, il prend les Français pour des imbéciles qu’ils ne sont pas. C’est lui qui accepte l’évasion fiscale, c’est lui qui n’a pas modifié la directive sur les travailleu­rs détachés et c’est lui qui a négocié le traité de libre-échange avec le Canada qui ruine nos agriculteu­rs. Il fait, une nouvelle fois, une campagne mensongère.

Chaque pays, estimez-vous, doit contrôler ses propres frontières…

Oui. Cela fait vingt ans que tous les promoteurs de cette mauvaise Europe nous disent avant chaque scrutin qu’il faut mieux la protéger. Mais c’est un voeu pieux, car des pays comme la Grèce ou la Bulgarie n’auront jamais les moyens de contrôler leurs frontières. Et, surtout, ils n’y ont pas intérêt, car les migrants ne s’arrêtent pas chez eux, ils viennent profiter de nos systèmes sociaux. La seule solution pour contrôler l’immigratio­n est donc de rétablir les frontières nationales, ce que refusent autant Emmanuel Macron que Les Républicai­ns.

Une Europe de cercles concentriq­ues, à plusieurs vitesses, tout le monde semble au moins d’accord là-dessus…

Dans l’objectif, oui. Le problème est la cohérence entre les actes et les paroles. Si je reprends les profession­s de foi de , la liste UMP de M. Hortefeux proposait de lutter contre l’immigratio­n. Mais ses votes ont ensuite été en faveur de la répartitio­n des quotas de migrants… Les socialiste­s parlaient aussi de protection et tous leurs votes ont été favorables aux migrations et au dumping social. Nous sommes parmi les rares à avoir toujours mis en corrélatio­n nos paroles et nos actes. Et à proposer un projet européen qui repose sur un retour des compétence­s vers la nation, pour concentrer l’Europe sur des projets scientifiq­ues et industriel­s, afin d’affronter la Chine et les Etats-Unis. On doit faire maigrir la Commission de Bruxelles, rendre aux nations le contrôle des frontières, des lois et des budgets, et accélérer les projets à trois ou quatre pays pour relever les défis du XXIe siècle.

Vous voulez réduire de  milliards à  milliards net la contributi­on annuelle de la France à l’Union. Cela revient, en fait, à en sortir ?

Non. Sous Jacques Chirac, la France contribuai­t pour deux milliards net, soit la différence entre ce qu’on verse et ce qu’on reçoit, à l’Union européenne. Etions-nous alors de mauvais Européens pour autant ? Avec les gouverneme­nts qui ont suivi, l’addition a flambé. En , nous avons versé  milliards pour n’en recevoir que . Et si on suit le plan Macron pour l’Europe, on va passer à un différenti­el de  milliards. C’est extravagan­t pour nourrir la gabegie bureaucrat­ique bruxellois­e et financer nos concurrent­s qui prennent nos emplois. Il est normal de contribuer à l’Union, mais de deux milliards par an. Avec les neuf milliards récupérés, on pourrait réindexer les retraites sur l’inflation.

La France subit, selon vous, une triple colonisati­on : politique, économique et religieuse…

L’intérêt national n’est plus défendu par Emmanuel Macron. Sur le plan politique, Bruxelles et Mme Merkel décident. Sur le plan économique, nos fleurons, comme l’aéroport de Toulouse ou Alstom, ont été bradés à la Chine et aux Etats-Unis. Enfin, il existe une centaine de mosquées salafistes qui devraient être fermées, car elles portent des discours sexistes et de haine. On ne peut pas accepter tout cela, c’est une question de volonté politique. Le pouvoir actuel est faible, alors que notre pays dispose pourtant de quantité Nicolas Dupont-Aignan : « Il est impératif de travailler autour d’un programme commun à droite. »

d’atouts. Je ne suis pas pessimiste sur l’état de la France, je regrette juste que nos gouvernant­s successifs aient cédé devant cette colonisati­on rampante.

Vous souhaitez un référendum d’initiative partagée pour « mettre fin à l’appel d’air migratoire ». Quelles en seraient les questions ?

On demanderai­t aux Français s’ils approuvent les mesures suivantes : cinq ans de présence en France avant qu’un étranger qui ne travaille pas puisse toucher les aides sociales. L’instaurati­on de quotas par nationalit­és votés par le Parlement. L’expulsion des délinquant­s étrangers après leur peine. Le contrôle des frontières nationales. Ces mesures ont été proposées par Debout la France aux Républicai­ns ainsi qu’au Rassemblem­ent national. Il faudrait que  parlementa­ires les signent pour ensuite recueillir le soutien de , millions d’électeurs, ce qui obligerait le gouverneme­nt à organiser ce référendum. Mais les députés et sénateurs LR ne me suivent pas dans cette démarche. Il est extravagan­t qu’en , soient arrivés sur le sol français   migrants légaux et demandeurs d’asile. Notre pays a-t-il les moyens d’accueillir chaque année l’équivalent de la ville de Nice ? Non ! Seul le rétablisse­ment des frontières nationales permettra de prendre des mesures qui sont urgentes.

Pourquoi n’êtes-vous pas parvenu à une liste commune avec le RN aux européenne­s ?

J’avais proposé à Marine Le Pen et Laurent Wauquiez un grand rassemblem­ent. Les deux ont refusé et je le regrette. Si nous voulons battre Macron, Laurent Wauquiez ne gagnera jamais seul la présidenti­elle, Marine Le Pen et moi non plus. Pour l’avenir, il est impératif de travailler autour d’un programme commun à droite et de tirer les leçons de . Moi, j’ai ainsi peaufiné mon programme européen. Il faut un projet sérieux, crédible, et ne pas promettre tout et son contraire.

Vous avez été l’un des premiers à soutenir les « gilets jaunes ». Vous dites que l’INSEE sous-estime l’inflation depuis des années…

J’ai soutenu le mouvement au départ quand il était pacifique et je regrette que le Président laisse pourrir le dossier avec des manifs qui nuisent à l’économie et l’image de la France. Il y a urgence à prendre des mesures sur le pouvoir d’achat car l’indice des prix ne reflète pas la hausse de l’inflation. Il faut protéger notre économie pour relancer le pouvoir d’achat, en particulie­r des retraités. Vous estimez que l’Etat pourrait économiser  milliards par an. Comment, outre les  milliards qui seraient soustraits à l’Europe ? Nous proposons un programme de lutte contre les gaspillage­s, sans quoi on ne pourra pas augmenter le pouvoir d’achat. On peut gagner de l’argent sur les fraudes à la Sécurité sociale, soit  milliards. Il y aurait en effet , million de fausses cartes Vitale en France. Ensuite, il faut supprimer pendant cinq ans les aides sociales, qui font appel d’air, pour les étrangers qui arrivent. Enfin, on peut encore réduire de , milliard le train de vie de l’Etat.

Vous n’êtes pas tendre avec les énergies renouvelab­les comme les éoliennes et le solaire et vous préconisez de continuer à investir dans le nucléaire…

Sur le solaire, je suis plus nuancé. L’énergie solaire peut être utile, si on développe une filière industriel­le produisant les panneaux solaires en France. En revanche, les éoliennes sont une catastroph­e financière et environnem­entale. La taxe sur l’électricit­é représente  milliards d’euros, les Français ont vu leurs factures augmenter pour financer des éoliennes qui produisent très peu. Il serait plus utile d’investir dans une nouvelle génération de centrales nucléaires, sans risque et qui polluent moins.

Vous soutenez l’instaurati­on du RIC depuis  et demandez l’introducti­on d’une « grosse dose de proportion­nelle » à l’Assemblée. Combien ?

Je pense qu’on pourrait aller jusqu’à  %, afin que tous les courants soient représenté­s, tout en garantissa­nt la stabilité. Cela aérerait le système. Et puis il faut, effectivem­ent, le référendum d’initiative citoyenne, sans verrou parlementa­ire ni sujet interdit.

L’opposition entre « camp du progrès et populistes », ça vous horripile…

Elle est dérisoire. Emmanuel Macron est le pyromane qui se fait passer pour un pompier. Il laisse l’Europe dériver et s’en plaint ensuite. C’est au contraire en ayant une belle Europe de nations indépendan­tes et de projets industriel­s et scientifiq­ues communs que nous avancerons. L’Europe uniforme et fédérale ne marche pas, parce qu’elle nie les nations et donc les démocratie­s. 1. Editions du Rocher, 258 pages, 15,90 euros.

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(Photo Frantz Bouton)

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