Les médiathèques écriront « l’après » en quatre chapitres
Les établissements ne rouvriront pas au public le 11 mai. Seul le personnel reprendra son travail afin de mettre en place un système de drive. La réouverture partielle pourrait intervenir en juin
L’annonce du Premier ministre Édouard Philippe sur la réouverture des bibliothèques et médiathèques le 11 mai a suscité la surprise puis l’inquiétude au sein de la profession. D’autant que la fréquentation de ces établissements est très importante. Le public intergénérationnel y séjourne souvent plusieurs heures pour lire, travailler ou consulter Internet. Dès lors, comment cette réouverture est-elle envisagée ? Agnès Garrus, présidente régionale de l’Association bibliothèque de France évoque une ouverture progressive d’ici le mois de juin, selon les communes.
Comment se présente la réouverture des établissements ?
Il faut rouvrir mais dans de bonnes conditions sanitaires. Les flux peuvent être régulés avec la distanciation physique. Nos préoccupations portent plutôt sur la circulation des documents car chacun est potentiellement contagieux.
Combien de temps ?
La charge virale est de dix jours selon la texture qui recouvre les documents. Par exemple, pour les livres plastifiés, ce qui est le cas en bibliothèque, le virus peut vivre jusqu’à dix jours sur une couverture, neuf sur une jaquette plastique de DVD.
Agnès Garrus, présidente du groupe Paca de l’Association des bibliothécaires de France, annonce une réouverture progressive des établissements.
Quels sont vos moyens pour éviter toute propagation du virus ?
Il sera possible de les nettoyer avec des solutions d’éthanol à degrés mais cette méthode n’est pas envisageable sur des centaines et milliers de documents. L’autre solution, c’est la mise en quarantaine des
ouvrages. Une bibliothèque, quelle que soit sa taille, a toujours à peu près % de son fond dehors. Pour une ville de habitants, la structure doit avoir à documents et ouvrages, elle en a aujourd’hui la moitié à l’extérieur. Il faudra gérer le retour des pièces tout en continuant les prêts. C’est une sacrée organisation logistique pour parvenir à ce que les conditions sanitaires soient au rendez-vous, autant pour les usagers que le personnel bibliothécaire. Les cinq associations qui représentent
() l’ensemble des bibliothécaires ont travaillé avec les services livres et lectures du ministère de la Culture sur une méthode de déconfinement.
Comment envisagez-vous la réouverture ?
De manière progressive, en
quatre phases, pour absorber le flux et prendre du recul sur la situation. La première phase consistera à continuer les services numériques en ligne tout en mettant en place rapidement un service drive. Les usagers pourront réserver par téléphone ou mail puis viendront chercher les documents. En parallèle, il faudra mettre tous les établissements aux normes avec des écrans de protection, retirer les assises qui ne pourront pas être désinfectées. Les commandes auprès des librairies, qui sont dans le besoin économiquement, seront relancées. Surtout, il faut du temps, pour s’organiser et redémarrer autrement.
Ensuite ?
Dans une deuxième phase, un accueil sera possible avec un filtrage à l’entrée et du gel hydroalcoolique. Lorsqu’un ordinateur sera utilisé, il faudra le désinfecter. Un livre consulté mais pas emprunté devra être placé dans un bac en quarantaine. Toute notre organisation de travail est à repenser. Le mai c’est trop tôt pour l’accueil du public, matériellement on n’a pas le temps de former toutes les équipes.
En quoi consiste la troisième phase ?
Elle dépendra des préconisations sanitaires puisqu’il faut avoir le droit que les usagers puissent se réunir à plus de dix. Et c’est cela qui donnera le tempo avant la dernière phase qui représente un retour à la normale, une sortie de pandémie. Les bibliothécaires ont envie de rouvrir les établissements, nous avons une utilité sociale et culturelle qui n’est plus à démontrer notamment sur l’aspect informatique avec l’accès à Internet.
Quel est l’état d’esprit de la profession aujourd’hui ?
Tout le monde a conscience et comprend les risques liés à l’ouverture des médiathèques. Mais les collègues sont tous dans les starting-blocks prêts à retourner au travail, en sachant que toutes les équipes ne reviendront pas sur place la semaine prochaine. Certains personnels resteront en télétravail. Nous sommes convaincus de l’utilité de notre métier, il faut de la méthode et une progressivité dans le déconfinement pour que tous les efforts collectifs payent. 1. L’Association des directrices et directeurs des bibliothèques municipales et groupements intercommunaux des villes de France, l’Association pour la coopération des professionnels de l’information musicale, l’Association des bibliothécaires départementaux, Bibliopat et l’Association des bibliothécaires de France.