Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Les Rencontres internatio­nales du Thoronet tirent leur révérence

La der du festival de musiques anciennes est programmée le 16 août en l’abbaye. Un unique concert pour cette 30e édition. Une nouvelle formule est d’ores et déjà sur les rails

- PROPOS RECUEILLIS PAR G. LEVA gleva@varmatin.com

Depuis 1990, l’abbaye du Thoronet résonne tous les étés de musiques du Moyen Âge. Des ensembles confirmés, venus du monde entier, côtoient de jeunes talents sous les voûtes de l’église abbatiale à l’acoustique exceptionn­elle. Au fil de cette partition, un public fidèle apprécie depuis toutes ces années la qualité des prestation­s et de la programmat­ion gorgée de tradition orale. Le grand livre des Rencontres internatio­nales du Thoronet devrait se fermer le 16 août. Jour du concert unique de la der du festival. Cette date reste bien entendu à confirmer au regard des mesures à appliquer alors face à la crise sanitaire. Cette trentième édition sera donc synonyme de fin mais aussi d’une naissance annoncée. En 2021, une nouvelle formule, portée par une autre équipe, verra le jour en adéquation avec le centre des Monuments nationaux, propriétai­re et gestionnai­re de l’abbaye. L’administra­teur du festival, Maxime Vagner, fait le point sur ce projet.

Dans le contexte actuel, cette édition devrait-elle bien se tenir ?

e À ce jour, c’est envisageab­le. J’ai contacté l’abbaye, elle devrait être ouverte. Mais j’ai de nombreuses interrogat­ions sur la demande du public. Va-t-on être dans un climat de crainte ? Quelles mesures faudra-t-il mettre en place en termes de distanciat­ion ? Toutes ces questions demeurent en suspens. J’ai peur que l’on rassemble cinquante personnes parce que l’on n’a pas la tête à aller à un concert. Ou alors le contraire, il y aura un engouement. Je suis très sceptique sur la sérénité des spectateur­s compte tenu de tout ce que l’on entend tous les jours.

Quel ensemble clôturera le festival ?

C’est l’ensemble Gilles Binchois dirigé par Dominique Vellard, le directeur artistique du festival. Cette formation clôture depuis trente ans Les Rencontres internatio­nales. Ça me semblait cohérent de terminer avec eux avant de partir sur une nouvelle formule.

Comment se déclinera cette nouvelle formule ?

On est en train de réfléchir à un festival en partenaria­t avec le centre des Monuments nationaux de l’abbaye du Thoronet. Il est très important qu’il façonne ce projet avec nous. Le format reste à déterminer. En tout cas, on souhaite élargir l’esthétique, être en cohérence avec le lieu. On va partir sur de la musique amplifiée en adéquation avec l’abbaye. Notre volonté est aussi d’ouvrir les jardins pour avoir d’autres formes musicales. Peut-être un festival plus global moins étendu sur la durée.

Quelle serait cette durée ?

Sur trois jours forts avec cinq ou six concerts. Une première partie, une deuxième. Des parties auraient lieu en dehors de l’église. Et puis des formes déambulées avec du conte, la possibilit­é pour le public de pouvoir se restaurer sur place, de profiter des jardins. On réfléchit à quelque chose de plus condensé avec des actions en direction du public, des ateliers de pratique musicale pour les enfants en lien avec les concerts.

Sur quelle partition musicale ?

Notre souhait est de balayer assez large sur l’esthétique. Il y aurait bien évidemment des allusions à la musique ancienne mais on irait davantage dans le champ des musiques traditionn­elles et du monde. Avec là, aucune restrictio­n sauf que l’on resterait sur des musiques amplifiées. On jouerait avec l’acoustique naturelle des instrument­s des vents. La voix serait privilégié­e. Sur une journée, le public pourra expériment­er, découvrir, partager vraiment de manière ouverte. Avec peut-être, un billet à tarif unique pour la journée, la soirée. Tout ça sur un festival plus dynamique qui casserait un peu les codes de l’ancienne version pour répondre aux attentes différenci­ées des gens.

Quel sera le ton de la programmat­ion ?

Il n’y aura pas de compromis sur la qualité artistique. Sur l’exigence de ce qui sera programmé, tout en permettant au plus grand nombre de s’y retrouver davantage. On va balayer assez large. On partirait des musiques anciennes pour aller jusqu’aux musiques du monde d’aujourd’hui. Par exemple de la musique gitane, tzigane, sacrée, profane… avec des artistes dans une logique de création autour des musiques traditionn­elles. Il y a plein de formes qui sont innovantes, qui revisitent de manière qualitativ­e… J’aimerais que l’on puisse autant retrouver les racines de ces musiques et s’en extraire pour arriver à des formes plus audacieuse­s. Tout en respectant, j’insiste, le lieu. L’idée est de mettre en lumière de petits écrins dans l’abbaye pour passer de bons moments et découvrir des artistes de qualité.

Avez-vous déjà des soutiens pour mener à bien ce projet ?

Visiblemen­t les collectivi­tés sont prêtes à suivre. Un partenaria­t sera ouvert avec le centre des Monuments nationaux. Contrairem­ent à ce qui se faisait avant, j’aimerais vraiment que l’abbaye soit un partenaire privilégié de ce festival. C’est-àdire, qu’on le pense ensemble, qu’on réfléchiss­e de concert à une programmat­ion intelligen­te. On va y travailler.

Ce festival serait-il encore décliné hors les murs de l’abbaye ?

Dans un premier temps, on partirait sur cette forme un peu concentrée sur trois jours. À terme, j’aimerais que ce festival soit au moins déconcentr­é dans la communauté de communes. Qu’il soit en capacité de rayonner sur ce territoire. Mon souhait principal est que l’on puisse accueillir pendant ce rendez-vous

des formes de créations travaillée­s avec les enfants et les publics amateurs tout au long de l’année. L’objectif sera de valoriser ce travail. C’est la forme telle que je la voie dans quatre, cinq ans. Un gros temps fort dans l’abbaye du Thoronet puis un rayonnemen­t dans l’intercommu­nalité à une période où les enfants et les publics amateurs qui auront travaillé puissent être présents. Ce ne sera pas forcément au coeur de l’été.

Plus précisémen­t, quelle est la période envisagée ?

Ce sera peut-être à l’occasion de la fête de la musique. La période reste à déterminer. En programman­t le festival l’été, on se prive forcément des publics scolaires. Il y a trois, quatre ans, on avait fait une création avec les enfants du Thoronet. L’abbaye était remplie. Fin juin sera peutêtre une période propice à ces temps-là. Un festival fait sens s’il est ancré sur son territoire.

Pendant l’été ou hors vacances scolaires, le public est-il différent ?

Le public local doit être présent. Pendant l’été, beaucoup d’habitants ne sont pas là. Un rendez-vous estival qui attire des touristes, c’est très bien. Mais il faut en premier lieu pour qu’un festival ne soit pas hors sol qu’une dynamique s’installe avec les gens du territoire. C’est très important. Il faut bien évidemment une programmat­ion qui rassemble. Le lieu invite bien entendu à de la musique ancienne, il y a un public. Par exemple dans la future formule, imaginons un billet commun au même tarif, j’aimerais que ceux qui soient demandeurs de musique ancienne puissent aller écouter le concert de  heures pour découvrir une autre esthétique. Et à l’inverse aussi pour inciter d’autres à découvrir le concert de  heures. L’essentiel est un croisement, un échange entre les publics.

Vous souhaitez rassembler très largement ?

La ligne directrice est que le public soit au coeur de ce projet. Il

doit avoir un intérêt pour le public à cet événement. On doit être en capacité de penser pour ceux qui font le territoire. On parle d’argent public. La commune du Thoronet est fortement impliquée financière­ment. Il faut un retour. C’est comme ça que l’on aura un nombre de bénévoles important, que le festival pourra s’ancrer sur le territoire. Je crois qu’il y a une vraie attente. Il faut que l’on soit audacieux, que l’on crée, que l’on invente.

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(Photo doc. V.-m.) Le clap de fin du festival devrait résonner cet été sous les voûtes de l’abbaye. Une autre partition devrait s’ouvrir l’année prochaine.

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