Coups de couteau à Nice : un garrot qui change tout
Ils se sont d’abord battus à mains nues dans le quartier Bon-Voyage à Nice-Est, mardi 31 mars, vers 12 h 30, devant le 151, route de Turin. Danilson Mendes, 23 ans, connu comme petit trafiquant de drogue et condamné à maintes reprises, y était persona non grata. Il a reçu une gifle. Il est allé au supermarché d’à côté acheter un couteau. Des images de vidéosurveillance le prouvent. « C’était pour piquer les merguez. Il y avait un barbecue », lance-t-il avec une certaine nonchalance à Alain Chemama, président du tribunal correctionnel. Deux témoins décrivent une scène hallucinante : Danilson,
couteau en main, a poignardé Raphaël, son rival, à plusieurs reprises au niveau des cuisses. Selon les enquêteurs, une dette de 500 euros pourrait être à l’origine du conflit entre les deux jeunes. Danilson nie tout en bloc, même les évidences. « Ce sont des histoires de quartier comme il y en a plein. Je n’ai rien à me reprocher », affirme-t-il avec aplomb, en visioconférence depuis la prison.
« Un témoin comme on n’en fait plus »
Le parquet avait d’abord qualifié cette affaire de « tentative de meurtre ». Le courage et les réflexes d’un passant sauveront la vie de Raphaël et éviteront à Danilson Mendes de comparaître devant une cour d’assises. Malgré une atteinte à l’artère fémorale, Raphaël a été sauvé. Le président Chemama salue avec insistance l’héroïsme de Khalled C. : «Un témoin comme on n’en fait plus… » Après avoir vainement tenté de séparer les belligérants, Khalled a prodigué les premiers soins. Notamment en réalisant un garrot salvateur avec sa ceinture alors que Raphaël se vidait de son sang. Une ambulance qui passait à proximité a été hélée. Raphaël a été conduit en réanimation à l’hôpital Pasteur situé à deux pas. Pendant ce temps, l’auteur des faits prenait la fuite. Il a été interpellé quinze jours plus tard. « La facilité de ce passage à l’acte, la détermination de ce jeune sont choquants. A-t-il un rang à tenir ? », s’interroge Me Emmanuelle Vial, avocate de la victime. La procureure Clémence Bravais requiert quatre ans d’emprisonnement. Danilson a agi en récidive légale. Son casier judiciaire comporte seize condamnations. Deux peines avec sursis planent déjà au-dessus de sa tête. La magistrate demande leur révocation ce qui signifie, si le tribunal suit les réquisitions, un an de prison supplémentaire.
« Une plante sans tuteur »
Me Jean-Yves Garino, en défense, évoque un garçon qui, « comme une plante sans tuteur, a poussé dans tous les sens. » Danilson Mendes n’aurait jamais fréquenté le collège. « Rien n’est perdu », espère l’avocat qui constate que ces derniers mois, le jeune homme entrait « dans une certaine norme sociale » : « Il venait de décrocher un premier contrat d’insertion. » De l’avis de Me Garino, davantage que l’enfermement, un suivi médical s’impose pour ce garçon trop impulsif. Danilson Mendes regrette-t-il son geste ? Impossible à dire puisqu’il a nié jusqu’au bout être l’auteur de l’agression. Le tribunal le condamne à quatre ans d’emprisonnement auxquels s’ajoutent six mois de révocation d’un sursis. À sa sortie de prison, il restera sous le coup d’une mise à l’épreuve. Dans cette affaire qualifiée par le président de « banale et gravissime » , il y a au moins une morale : un citoyen ordinaire qui a su se distinguer par son courage et son secours déterminant.