De l’air ans en « auteurs »
Le magazine de photographie du Niçois Stéphane Brasca célèbre son vingtième anniversaire avec trois numéros spéciaux. Sur les réseaux, il a porté un autre regard sur le confinement
Hors des sentiers battus, sans faire de bruit, mais en obtenant l’adhésion de son milieu, De l’air poursuit son chemin. Sans se gêner pour en définir parfois les contours. Le premier numéro, sorti le 18 avril 2000 par Stéphane Brasca, journaliste devenu éditeur, donnait déjà le ton. « On était un peu l’Ovni dans le paysage. La grosse mode était au photojournalisme. Nous, on a choisi d’aller dans une autre direction. Pas dans le reportage à la National Geographic ou dans le domaine technique. Mais en donnant à voir les travaux photographiques d’auteurs », énonce le Niçois. Les pages de la publication s’ouvrent illico à la photo plasticienne, à la mode, au paysage, avec la volonté d’imposer sa patte, et de cultiver sa différence. Aujourd’hui, cette orientation n’apparaîtrait pas si audacieuse. De gigantesques vitrines comme Paris photo ou les Rencontres d’Arles mettent en avant la photographie d’art, chaque année. Des rendez-vous déjà existants au moment de la création de De l’air, mais plutôt destinés aux puristes et aux collectionneurs.
« Un petit acteur de l’évolution de la photo »
« Le monde de la photo a beaucoup évolué en l’espace de vingt ans. Aujourd’hui, il y a des festivals partout, plus d’aides qu’avant aussi. Et petit à petit, le travail des photographes s’est déplacé. Des colonnes des grands journaux et magazines internationaux, il s’est installé dans les galeries d’art et les grandes foires », note Stéphane Brasca, avant d’estimer que « De l’air est un petit acteur de cette évolution ». En atteignant son 74e numéro, le trimestriel devient vintage. Pas question, en revanche, de mariner dans son jus et d’appliquer constamment les mêmes recettes, d’inviter les mêmes têtes à chaque sortie. « Je ne veux pas que le magazine devienne un club privé. Les deux copains photographes avec lesquels je l’ai fondé n’ont pas publié dedans depuis des années, par exemple », relève l’éditeur.
Et toi, tu faisais quoi à ans ?
Quand il s’agit de regarder dans le rétro, De l’air sait encore faire preuve de créativité. Pour le premier de ses trois numéros anniversaire, Stéphane Brasca a sollicité soixante grands noms de la photo et d’autres dont il affectionne le parti pris (Raymond Depardon, Michael Ackerman, Richard Dumas, Corinne Mercadier, Françoise Huguier, etc.), afin de publier l’un de leurs clichés, pris à l’âge de 20 ans. « Pour la plupart, on remarque qu’ils avaient déjà du style, on peut reconnaître leur signature », poursuit-il.
Avant de conclure l’année 2020 par une parution « plus tournée sur l’autocélébration », et de réserver une surprise pour le numéro d’été, qui devait initialement tourner autour des Rencontres d’Arles, annulées, l’Azuréen planchera sur d’autres projets. « Pour les dix ans, la Maison européenne de la photographie, à Paris, nous avait consacré une exposition appelée Génération De l’air. Cette fois, on devait être mis en avant dans une grande gare parisienne. C’est en suspens, mais je prépare d’autres expos. Il y en aura peut-être une à Nice. » Également à l’origine des Carnets d’adresses précieux, il envisage de créer une édition Antibes-Biot-Valbonne, après avoir déjà « balisé » Nice et Cannes. « L’heure va être au voyage autour de chez soi », glisse Stéphane Brasca.