Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Portrait de la jeune fille en feu

Adaptation d’un roman graphique de Charles Forsman, cette série Netflix suit les pas d’une lycéenne mal dans sa peau, soudain dotée de pouvoirs étonnants et incontrôla­bles.

- JIMMY BOURSICOT

Une ado renfrognée, le regard pointé vers le sol, noyée dans des fringues informes, embringuée dans un contexte familial compliqué et loin, très loin des bandes les plus populaires du bahut, composée de cheerleade­rs, de joueurs de football américain et de fashionist­as. Des sentiments enfouis, une rage contenue, une place à trouver, un corps qui change à une vitesse folle... Le tableau a été usé jusqu’à la corde, n’est-ce pas ? En constatant que tous ces ingrédient­s figurent dans la recette de I Am Not Okay With This, certains auront du mal pourront réprimer un soupir. Mais à y regarder de plus près, cette nouvelle série portée par Netflix possède un certain charme. Si l’on désirait prendre la place de l’algorithme de la plateforme de streaming, on écrirait : « Parce que vous avez aimé Stranger Things et The End Of The Fu***ing World, vous aimerez I Am Not Okay With This. » Tout sauf un hasard, puisque les trois programmes ont de réels liens. Adapté (assez librement) du roman graphique éponyme de Charles Forsman, IAm Not Okay With This possède les mêmes producteur­s que Stranger Things .Etle Britanniqu­e Jonathan Entwistle, son créateur et réalisateu­r, a mis en scène The End Of The Fu***ing World, sorte de relecture moderne, belle et sombre, de Bonnie & Clyde... elle-même adaptée d’une autre oeuvre de Forsman.

« Cher journal... »

Comme cette dernière, I Am Not Okay With This expose l’envie de changement de jeunes au bord de la rupture. Le désir ardent de balayer les injonction­s autour de l’apparence, le spectre du harcèlemen­t scolaire ou encore les relents homophobes. Tout tourne autour de Sydney, dixsept ans, incarnée par l’intrigante Sophia Lillis. D’entrée de jeu, elle donne le ton : « Cher journal, va te faire foutre ! » Ça ne va pas très fort pour elle.

Son père est mort, elle débarque dans un bled de Pennsylvan­ie, en périphérie de Pittsburgh, avec sa mère et son frère. Elle n’a qu’une véritable amie, Dina (Sofia Bryant), pourtant bien plus cool qu’elle. Stanley, son nouveau voisin, Stan (joué par Wyatt Oleff, vu enfant dans Les Gardiens de la galaxie) est en revanche bien craignos. Et comme rien ne lui sera épargné, pense-t-elle, le jeune homme à la chevelure frisée et aux tenues bariolées d’un autre âge s’est mis en tête d’attirer son attention. Petit à petit, « Syd » va tout de même se rendre compte de leurs points communs.

La robe de Carrie

Rapidement, elle va faire une autre découverte, bien plus déstabilis­ante. Longtemps « okay »

Entre chronique génération­nelle et dimension fantastiqu­e

vis-à-vis de toutes les agressions et tensions du quotidien, Sydney Novak va changer d’état d’esprit, en remarquant qu’elle est capable de donner une autre forme à ses colères, « grâce » à des pouvoirs mentaux. Libérateur, mais absolument pas facile à canaliser. De quoi embarquer la série ailleurs que sur le seul terrain de la chronique adolescent­e, en lui donnant une dimension fantastiqu­e. Quelques indices le suggéraien­t : dans la scène d’ouverture de cette première saison, on la voit avancer au milieu d’une route, dans une robe blanche ensanglant­ée, façon Carrie au bal du diable. Malgré une certaine sagesse dans la forme et quelques personnage­s caricatura­ux, I Am Not Okay With This mérite le détour.

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