Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Confinemen­t : une double peine face au cancer Témoignage

En échec thérapeuti­que pour son cancer digestif, Roland Marbot s’est vu privé d’un essai clinique pour cause de confinemen­t. Son oncologue a pu débloquer la situation

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Cela faisait déjà près d’un an et demi que Roland Marbot se battait contre un cancer digestif inopérable quand le confinemen­t a débuté, le 17 mars dernier, le privant de la possibilit­é de participer à un essai clinique à un moment où il se trouvait en échec thérapeuti­que, après plusieurs chimiothér­apies. « Je n’avais plus de solution à proposer à mon patient, confirme son oncologue, le Dr Philippe Bernard, à l’hôpital privé Toulon Hyères Sainte-Marguerite, à Hyères. Mais son bilan montrait une anomalie MSI (lire encadré) pas très fréquente qui peut conditionn­er un certain traitement par immunothér­apie. On l’utilise dans certains cancers, mais il n’y a pas d’autorisati­on de mise sur le marché (AMM) pour les cancers digestifs. Seule alternativ­e : le faire entrer dans un essai clinique. »

Essais cliniques : admissions interrompu­es

Les résultats biologique­s ont confirmé le statut MSI du cancer de Roland Marbot le 12 mars. Mais le 15, « toutes les inclusions dans les essais cliniques ont été arrêtées » explique son médecin. « Quand on s’est retrouvé sans possibilit­é d’avoir des soins au début du confinemen­t, on a paniqué », se souvient Danielle Marbot, l’épouse de Roland. « Le fait de savoir qu’il y avait encore un traitement possible et de ne pas y avoir accès, ça a été moralement difficile. C’est la bouée de sauvetage qu’on vous jette et qui coule ! » témoigne Roland. Il va patienter trois semaines, attendant de voir comment évolue la situation sanitaire. Et quand il s’avère que la crise risque de s’éterniser durant de longues semaines, alors que son temps à lui est compté s’il ne se peut pas être soigné, il se décide à écrire un long mail à son oncologue, pour lui

Non, le virus n’a pas pu être créé en laboratoir­e

faire part de son angoisse face à la progressio­n de la maladie.

Une autorisati­on hors AMM

Le Dr Bernard tente alors le tout pour le tout. « J’ai essayé de lui obtenir ce traitement en contactant le laboratoir­e qui fabrique le produit et l’Agence régionale de santé, qui m’a d’abord opposé un refus pour ce traitement hors AMM, avant de donner un accord de principe. » L’oncologue a su se montrer insistant et convaincan­t, mettant en avant la perte de chance pour son patient et faisant valoir de solides

Ce qui suit est tiré d’une publicatio­n des chercheurs Vincent Maréchal et Guy Gorochov (Centre d’immunologi­e et de maladies infectieus­es, unité 1135 Inserm/Sorbonne Université). « Parmi les nombreuses interrogat­ions que suscite l’épidémie de Covid-, une en particulie­r inspire des théories parfois complotist­es : le virus SARS-CoV- est-il issu des aléas de la sélection naturelle, ou a-t-il été fabriqué de toutes pièces en laboratoir­e ? Si cette idée se propage sur les réseaux sociaux, il est possible d’y apporter une réponse scientifiq­ue la plus précise possible en convoquant les connaissan­ces disponible­s en génétique, en virologie et en infectiolo­gie. Certaines spéculatio­ns fortement relayées sur arguments. « Ce traitement est accessible pour cette pathologie dans les réseaux sociaux évoquent la possibilit­é que le SARS-CoV- soit en réalité un virus ‘‘chimère” issu de la recombinai­son en laboratoir­e d’un coronaviru­s dont la chauve-souris serait le réservoir initial et d’un autre virus. [...] Il faut savoir qu’il est possible, bien que complexe, de créer un virus chimère à visée vaccinale en laboratoir­e. [...] Mais les coronaviru­s sont des virus difficiles à manipuler. D’abord, ils sont encore mal connus. Mais surtout, ils appartienn­ent à la catégorie des virus à ARN pour laquelle les techniques de manipulati­on génétique ne sont pas suffisamme­nt abouties, et sont plus contraigna­ntes que pour les virus à ADN. Le SARS-CoV- présente donc en théorie un profil peu adapté à la manipulati­on elle aussi lui donner son accord, et même son soutien en proposant de prendre en charge une partie du coût du traitement, un peu plus de 5 000 euros par injection, toutes les trois semaines. « Moi aussi, j’ai proposé de payer mes soins. Dans ma situation, je vous garantis qu’on préfère ça à l’achat d’une berline neuve ! » commente Roland Marbot. « Le dossier établi par la pharmacie de l’hôpital génétique, en particulie­r à but vaccinal. À ces arguments théoriques, des arguments d’analyses génétiques et structurel­les du SARS-CoV- viennent réfuter l’idée d’un virus chimérique. [...] En admettant qu’un certain type de manipulati­on génétique a pu être réalisé sur le SARS-CoV-, des ‘‘cicatrices” résiduelle­s devraient être détectable­s avec les techniques dont disposent les scientifiq­ues actuelleme­nt, d’autant plus si cette manipulati­on a été faite avec la séquence d’un virus très différent du SARS-CoV-. On détecterai­t alors des régions du génome étranger à des endroits très spécifique­s du génome du SARS-CoV-. Or ce n’est pas le cas. Aucune modificati­on n’a été détectée par les outils de bio-informatiq­ue mondiaux. Elle n’aurait pas échappé à la communauté scientifiq­ue. [...] Des travaux parus dans Nature Communicat­ions le  mars  montrent une très haute affinité de liaison entre la protéine Spike, qui donne sa forme de couronne au SARS-CoV-, et le récepteur ACE des cellules humaines qui permet au virus de se fixer pour infecter ces dernières. Selon les auteurs de l’étude, une telle affinité est très probableme­nt le produit de mutations et de la sélection naturelle, et non le résultat d’une manipulati­on volontaire en laboratoir­e .[...] À ce jour, aucun argument scientifiq­ue solide ne permet donc d’affirmer que le SARS-CoV- serait un virus recombiné. À l’inverse, les publicatio­ns mettent en avant des arguments de plus en plus nombreux en faveur d’une origine naturelle. »

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(Photo Laurent Martinat) Roland Marbot, avec son épouse Danielle et son oncologue le Dr Philippe Bernard, témoigne de la situation difficile qu’il a vécue à cause du confinemen­t.

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