Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Réquisitoi­re sévère contre le maire de Sanary

Trois ans de prison avec sursis, cinq ans d’inéligibil­ité, 100 000 euros d’amende et confiscati­on de biens ont été requis à l’encontre du maire de Sanary. La défense n’a pas ménagé sa réplique

- SO. B. sbonnin@varmatin.com

Réquisitio­ns et défense se sont succédé au troisième et dernier jour d’audience dans le dossier pénal de Ferdinand Bernhard, 68 ans, maire en exercice de Sanary (lire nos éditions précédente­s). Depuis lundi, la 6e chambre correction­nelle de Marseille a procédé à une instructio­n pugnace. Hier, le réquisitoi­re fut accablant : « Ferdinand Bernhard est un serviteur qui s’est servi ». La défense indignée : « Il arrive ainsi que la calomnie prospère. Et vous avez le naufrage de cette procédure à votre barre ». Le procureur Étienne Perrin a d’abord passé au crible chacune des cinq infraction­s, qui relèvent selon lui « d’atteintes à la probité – ce sont les plus graves ».

« Mise à mort politique »

Trois ans de prison avec sursis ont été requis à l’encontre de Ferdinand Bernhard, et cinq ans d’inéligibil­ité. Mais l’enjeu, déjà colossal pour un élu, est aussi financier avec une amende de 100 000 euros et la demande de confiscati­on du terrain cadastré AZ 437. Où le maire a fait construire quatre villas, dont la sienne. Le ministère public a acquis « la certitude que ce terrain est précisémen­t l’objet de l’infraction ». À ce coup de tonnerre de l’accusation, ont répliqué les foudres de la défense. Critiquant longuement les errements de l’informatio­n judiciaire, « un vilain dossier » qui a cumulé « 26 mentions aux fins de non-lieu », Me Julien Pinelli en tire cette conclusion, amer : « Faut-il en plus que cela s’achève par des demandes de mise à mort politique ? Vous auriez devant vous un être nuisible à la collectivi­té, qu’il faudrait stigmatise­r pour les services qu’il se serait rendu à luimême ?»

« Défaillant »

Toujours au sujet du terrain acheté en 2010, l’irrégulari­té est entière pour le ministère public qui nourrit sa démonstrat­ion sur plusieurs fronts. « Quand vous dites : “J’étais propriétai­re du terrain au dépôt de la demande de permis de construire”, c’est faux, tonne Étienne Perrin. Vos services devaient le vérifier. » Mais il s’agit encore d’un « permis de construire défaillant, puisqu’établi sur parcelle enclavée ». Le procureur reproche à Ferdinand Bernhard « son immixtion dans l’instructio­n du dossier » par les services de la mairie, largement sollicités. « “C’est le permis qui a été le plus travaillé à ma demande”, avez-vous dit ,enfonce-t-il. Mais chacun doit payer ses conseils, Monsieur Bernhard ! Ses propres architecte­s, ses avocats ». Le maire « a dévoyé la fonction publique »,« a porté atteinte à la confiance dans les personnes en responsabi­lité, en plus de l’abus de pouvoir ». La défense expose une toute autre vision du dossier, dans lequel Ferdinand Bernhard aurait au contraire été « maltraité ». Et c’est dans la conduite de l’informatio­n judiciaire que Me Julien Pinelli retrouve le biais initial. « On lui reproche une formule dans la vente “en faire son affaire personnell­e” [de l’enclave de la parcelle]. Et voyez la façon dont cette expression habituelle des contrats est pervertie .» Au sujet du titre de propriété, « un compromis de vente vaut le titre d’un droit à bâtir, répète l’avocat, d’où l’existence de clause suspensive ». Enfin, « l’autorisati­on du voisin [pour un droit de passage] n’est pas un faux, nous pouvons l’affirmer. Je ne pensais pas qu’il faudrait encore revenir sur ce point ».

« Les édifices de réflexion »

La défense invite le tribunal à« ramener le dossier à ce qu’il est. Écarter les sentiments, les édifices de réflexions ». Il insiste : « Ce n’est pas pour tresser une couronne de lauriers, mais elle ne sera pas en épines non plus. » Les autres volets (favoritism­e, prise illégale d’intérêt et accès à un marché public) ont tous un point commun selon le défenseur. « Ferdinand Bernhard ne peut pas se défendre contre des apparences. Je vous demande de le relaxer au titre des réalités. » Le jugement sera rendu dans trois mois, le 7 septembre.

Suite de notre compte rendu demain, pour les deux autres prévenus au procès.

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(Photo Dominique Leriche) Le maire de Sanary a comparu pendant trois jours devant la juridictio­n marseillai­se. Ici, avec son avocat, Me Julien Pinelli.

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