À Peygros ,la campagne plein champ
Cette balade de trois heures sur les terres d’Auribeau-surSiagne, dans le pays grassois, dessine une parfaite esquisse rurale. Entre végétation de plaine, vieilles pierres et rivière
Qui n’a jamais vu Auribeau, n’a jamais rien vu de beau. » On a fouillé sur la Toile, dans les archives et en mairie... Aucune trace officielle de ce dicton largement répandu par ses habitants et que l’on a souvent entendu pendant notre enfance. Alors, bêcheurs, les Auribellois ? Allons vérifier ! Depuis le départ du parking Léon-Mallet, à l’entrée du village, où nous abandonnons notre carrosse, on crapahute dans les venelles bien silencieuses. On a quitté le littoral depuis une dizaine de minutes et déjà, le panorama s’est transformé. Nos pas nous entraînent dans la rue maîtresse, à partir de laquelle d’étroites ruelles à escaliers fleuris grimpent vers l’église, point culminant du village.
Ancrées sur leur rocher, construites en fonction du sol escarpé, les maisons, dont certaines datent du XIVe, témoignent de l’art des maçons de l’époque. Leurs façades montrent encore les voûtes en berceau qui abritaient autrefois les animaux. Certains souterrains, dit-on, rejoindraient directement la Siagne… Nous préférons emprunter les chemins de traverse pour regagner la rivière. Lorgner vers la plaine. Grimper un peu pour mieux redescendre. Il faut d’abord dévaler les larges escaliers en bois du chemin de la calade, juste à côté du parking. La route serpente ensuite entre les habitations. En traversant précautionneusement la départementale (attention, ça roule fort par ici !), on s’engage en face sur le chemin asphalté des Vayoux. L’allée, dont la pente perpétuelle réveillera les mollets qui n’ont pas beaucoup bossé ces derniers temps, est bordée de cyprès. Et de belles demeures. Petit air de Toscane. L’oratoire de la Vierge vient compléter l’analogie avec l’Italie pieuse. L’ascension se poursuit jusqu’à la barrière DFCI (défense des forêts contre les incendies). Là, c’est le GR51 que l’on suit pour contourner la cime de Peygros. « Peygros » n’est autre qu’un puey, c’est-à-dire un lieu vers lequel il faut monter, en provençal. Et comme il est plus massif que les autres, c’est un puey gros... La piste longe à flanc le versant de la colline et offre une vue plongeante sur Auribeau-sur-Siagne.
Sur son promontoire, le village regarde vers la mer depuis l’époque où les habitants ont choisi de s’installer en hauteur pour résister aux invasions. Ils s’y sont blottis dans un antre complètement fermé par deux portes massives. En cette époque, les moines de Lérins jouaient du miroir pour prévenir les villageois de l’arrivée de sombres ennemis. Aujourd’hui, la nature n’est que lumière.
Alentour, un immense paysage en demicercle monte jusqu’au ciel : des champs d’oliviers, des plantations de mimosas, d’eucalyptus, de chênes-lièges et de-ci de-là, quelques habitations ornent le Tanneron. Le chemin redescend en lacets vers le quartier de la Maufaraude. La rumeur cuivrée des premières cigales résonne alors que les rires d’enfants n’emplissent pas encore le Pré des pitchouns. Et au milieu, coule une rivière : la Siagne, que nous borderons aux côtés de sympathiques cavalières avant de remonter vers le centre historique. Comme avaient coutume de le faire les femmes du village, qui jusqu’en 1849, descendaient chercher de l’eau pour toute la maisonnée. Esprit campagne, plein champ...