Saint-Raphaël : le « retranché » était un bien étrange personnage
L’homme qui s’était introduit dans le musée dédié à l’archéologie sous-marine, en octobre dernier, déclenchant une importante opération de police, a été jugé hier à Draguignan
Le 23 octobre 2019, les Raphaëlois ont vécu une matinée agitée, où l’accès au centre-ville a été complètement bloqué pendant six heures. Motif, il y avait un homme retranché dans le musée d’archéologie sous-marine, à côté de l’église des Templiers, qui n’a pu être délogé que par l’intervention du RAID. Intervention éclair en fait, puisqu’une poignée de secondes a suffi à maîtriser un homme seul. Il n’y avait eu aucune victime, et les dégâts dans le musée étaient limités.
Il nie en bloc
Mais les policiers se sont retrouvés face à un bien curieux personnage. Visiblement d’origine arabe, mais ne semblant pas jouir de toutes ses facultés. Il avait été hospitalisé d’office en psychiatrie. Il en était sorti assez vite, et a comparu hier devant le tribunal correctionnel de Draguignan. On lui reprochait d’avoir dégradé le musée, par des inscriptions en arabe au feutre sur les murs, qu’on a traduites par « Allah est grand » et « Je vais faire de ce musée un enfer ». À son passif, il y avait également la détérioration de deux amphores. « J’ai pas écrit sur les murs, j’ai pas cassé, j’ai pas volé, j’ai rien fait. Je venais juste faire le ménage, j’avais la clef », a répété hier ce jeune homme, dont l’identité ne semble pas certaine.
D’après son empreinte génétique, recueillie sur le feutre, il aurait été condamné à deux reprises pour exhibition sexuelle, sous des identités différentes. De leur côté, les autorités tunisiennes l’ont reconnu comme l’un des leurs. Elles ont fourni l’identité, sous laquelle il a comparu hier, mais qui est invérifiable : Alaa Ben Jalel Ben Saad Thebti, 23 ans, né à Tunis. Sous ce nom-là, son casier judiciaire est vierge.
Le mystère des origines
Lui prétend se nommer Aladin Zambago, et être natif de Valoise ou Madoise, un pays dont le juge d’instruction n’a trouvé trace dans aucun atlas. « Qu’est-ce que vous faites en France ? », a tenté de questionner la présidente du tribunal Il a expliqué qu’il était venu à pied de Madoise, que c’était à côté du Brésil… et qu’il cherchait sa soeur. Il a précisé qu’il parlait « deutch, français (très approximativement), italien », mais aussi « Ringo, Jaja », et bien sûr le Madoise… « c’est comme l’arabe, presque pareil ». Il avait également donné une adresse à Paris, dans une rue et à un numéro qui n’existent pas, où, disait-il, il s’occupait d’une vieille dame handicapée. Au moment de son arrestation, il était dans un tel état de confusion qu’un expert psychiatre a conclu à un discernement aboli et diagnostiqué des troubles psychotiques aigus nécessitant son hospitalisation immédiate. Plus tard, un certificat médical a été établi pour lever l’hospitalisation d’office.
Discernement aléatoire
Puis un deuxième expert, intervenu pendant la détention, a conclu à une fragilité identitaire, une personnalité « border line », une désorganisation de la pensée, mais seulement une altération du discernement. « J’ai l’impression que c’est un pauvre hère qui a voulu se donner l’impression d’exister », a commenté Me
Elric Hawadier, venu demander réparation des dégâts causés au musée. Tenant compte de la deuxième expertise et d’une altération des facultés d’Aladin, le procureur a requis un an de prison. En défense, Me Carole Dufond a souligné les incohérences entre les expertises psychiatriques. Elle a demandé au tribunal de prendre en compte les dates de ces expertises, « et surtout de la plus proche du moment des faits, qui a conclu à l’abolition ». Le tribunal s’en est tenu à l’altération : un an ferme avec maintien en détention et interdiction définitive du territoire. Près de 4400€ de préjudice ont été alloués au musée.