Archiver pour une mémoire ordinaire de l’extraordinaire
Chacun est invité à adresser son témoignage du confinement ou du déconfinement au service des archives qui les collecte, dans le but de conserver des traces d’un épisode historique
Certains étaient en première ligne, d’autres confinés chez eux, en télétravail ou occupés par les enfants. Quel que soit sa situation pendant et après la période de confinement, l’année est historique à bien des égards ! Et mérite que l’on conserve des traces de la vie des habitants pendant cette pandémie de Covid-19. « Ce que nous retiendrons de la période actuelle ne doit pas se réduire à une affaire de grands hommes et d’arbitrages politiques, ni au caractère sensationnel de l’événement. Il faudra donner la voix à celles et ceux qui gèrent la crise au quotidien et éclairer le vécu de populations », ont écrit récemment un groupe d’historiens et archivistes de l’Europe entière dans une tribune commune. C’est dans cet élan que le service des archives de la Ville et sa direction de l’action culturelle et du patrimoine souhaitent s’inscrire en proposant, à tous les habitants, depuis quelques jours, son projet de collecte du confinement.
Que les langues se délient
Une initiative qui est née au sein même des Archives municipales, avec l’arrivée d’une nouvelle collègue, comme le raconte Isabelle Pintus, responsable de ce service : « Nous avons accueilli, virtuellement, le 18 mars, Marilyne Ghera, avec qui nous échangions quotidiennement sur les missions à organiser. Nous nous parlions à distance, à cause du confinement, et c’est comme ça que lui est venue l’idée de cette collecte. » Celle-ci se fait sous forme de don, « afin de conserver pour l’histoire les traces de cette période singulière, sous diverses formes, et d’en faire une source de recherches inédite pour les générations futures, indique la responsable. Puisqu’il est bon de nous projeter un peu, et que l’histoire s’écrit au jour le jour, tous les Fréjusiens et même les habitants du territoire, qu’ils soient résidents à l’année ou occasionnels, sont invités à nous envoyer ce
qu’ils ont vécu ou ce qu’ils vivent encore. » Si tout le monde est appelé à témoigner, quelle que soit sa profession, « car toutes les traces que l’on gardera sont bonnes à prendre », l’idéal pour les Archives municipales est « aussi de recevoir des récits de métiers particulièrement exposés, en première ligne. Que ce soit en provenance du personnel médical, des routiers, des agriculteurs, des éboueurs, des hôtes de caisse de supermarché, ainsi que le personnel municipal. D’une certaine façon, on leur rend ainsi hommage », expliquent d’une même voix les deux archivistes. Journal de confinement, récit ou
texte ne sont pas les seuls témoignages à envoyer aux archives. « Photo, vidéo, audio, document officiel et même une oeuvre artistique (dessin, peinture…) sont également intéressants à nous donner pour diversifier et densifier cette collecte », insistent-elles. Une collecte qui n’a pas de fin en soi, elle peut se faire tout l’été encore. Les langues peuvent encore se délier, les esprits s’épancher sans limite… Dans la région, seules les villes d’Antibes et de Marseille procèdent à un travail de mémoire similaire.
Des expositions en vue
« Dès ce mois de septembre, pendant
les journées du patrimoine, on peut imaginer qu’une exposition s’articule autour de cette collecte. Ce moment, si tout est prêt et s’il y a matière, pourrait être la première occasion – avant d’imaginer d’autres expositions à ce sujet dans le futur proche ou lointain – de se remémorer cette période », avance Isabelle Pintus. Une façon de remercier tous les contributeurs, et de rendre un hommage appuyé à ceux qui ont oeuvré pour le bien de tous « et saluer aussi des comportements remarquables signalés par le biais de ces témoignages ». Il ne reste plus qu’à se passer le mot !