Var-Matin (La Seyne / Sanary)

« La vie n‘est qu’une série de choix »

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Sam est un jeune gars de l’Indiana ayant réussi à se frayer un chemin jusqu’à Harvard. En 1977, avant de se lancer dans des études qui le conduiront inévitable­ment vers la réussite et ses symboles, il part à Paris. Un peu isolé, sans vraiment quoi savoir faire de sa vingtaine d’années, hormis hanter les cinémas d’art et d’essai ou les clubs de jazz. Il ne sait rien de la passion ni de l’amour. Puis, il croise Isabelle de Monsambert, traductric­e dans une librairie de Saint-Germain-des-Près. Une belle rousse à la peau translucid­e, plus âgée que lui, mariée. Leurs rendez-vous prendront place au 9, rue Bernard-Palissy. Des cinq à sept où les corps et les âmes, s’explorent. Après cela ? Une histoire d’amour, de destin, de choix, de solitude et de mélancolie à chasser. Confiné dans sa maison du Maine, mais de passage à Manhattan au moment de notre appel, Douglas Kennedy, nous parle de son nouveau roman. L’Américain, qui vit une partie de l’année à Paris, assure ne pas être Sam. « Ce n’est pas un roman à clé. Mais il est tout de même très personnel. »

Comment décririez-vous « votre » Isabelle ?

Ce n’est pas le genre de femme française qui correspond aux clichés vus dans les films américains, selon moi. Elle est distante, cadrée, mariée à un grand bourgeois plus âgé qu’elle. Elle est très amoureuse, très vite. Au début, c’est elle qui contrôle la relation entre elle et Sam. Puis cela changera.

Avez-vous pensé à une personne en particulie­r, connue ou inconnue, pour faire naître ce personnage ?

Ma vie intime est un livre qui ne sera clairement jamais ouvert... En tout cas, même si je la présente comme très mince, avec de longs cheveux roux, je n’ai aucune idée du visage qu’elle pourrait avoir. Ni Sam, d’ailleurs. Le diable se cache dans les détails, surtout sur le plan psychologi­que.

Sam et elle semblent très différents au début de leur relation...

Il découvre des choses et des sentiments grâce à Isabelle. Ils ont des différence­s culturelle­s, évidemment. Lui est Américain. À ses yeux, la vie est un grand projet, avec des étapes à accomplir. Il sait rester optimiste, même quand c’est difficile. Sam et Isabelle ont tout de même en commun une grande mélancolie. Et, de manière différente, ils sont tous deux très vulnérable­s.

Paris, où Sam connaît cette intense parenthèse, est l’autre « personnage principal » du livre...

Oui, c’est exact. Mais pour lui, Paris n’est pas une parenthèse en fait. C’est là où il apprend à vivre véritablem­ent. Le Paris que je décris dans le livre n’est pas celui des restaurant­s gastronomi­ques et des grands hôtels. Je parle d’endroits très romanesque­s, où je suis moimême passé quand j’étais jeune.

Le , rue Bernard-Palissy, c’était l’adresse de mon premier appartemen­t. Vingt-huit mètres carrés, cinquième étage, avec des marches immenses à grimper !

En tant que romancier, vous prenez beaucoup de plaisir à imaginer ces moments où la vie des personnage­s bascule ?

C’est vraiment très excitant. La vie n’est qu’une série de choix.

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La question du destin me fascine. Tout comme celle de la liberté. Qu’est-ce que c’est la liberté, finalement ? Et qu’est-ce qu’un couple. Isabelle et Sam ont trouvé une certaine liberté dans leur relation, bien qu’elle soit atypique.

L’histoire de ce couple « caché » va s’étirer sur trois décennies ?

Oui, avec des hauts et des bas, des moments de crise et de la distance. Mais c’est hyper rare, en effet.

Quand Sam, devenu avocat, est en Amérique, il est d’ailleurs question du divorce et de sa violence. Cela vous parle ?

Oui, je crois que je suis vacciné du contrat de mariage ! Le premier a duré vingt-cinq ans et le divorce, géré en Angleterre, n’a franchemen­t pas été simple. Le deuxième a été réglé au Canada, c’était un peu pareil. Dans ces situations, l’argent devient une arme et on est prêt à utiliser les enfants pour blesser l’autre.

Ce roman aurait-il pu s’appeler La Poursuite du bonheur ?

(Il rit) C’est déjà le titre d’un de mes livres. Mais il y a un peu de ça. Isabelle, l’après-midi est triste, par certains aspects, mais il a aussi un côté positif.

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(Photo Evelyne Chamaillé)
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Isabelle, l’après-midi. Douglas Kennedy. Éditions Belfond.  pages. , (format numérique ,

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