Louis de Funès L’homme tranquille
Riche d’archives inédites, le documentaire diffusé ce soir sur France 3 dévoile la face intime du comique préféré des Français. Celle d’un homme pudique, sensible et habité par le doute
Il nous avait pourtant prévenus. Souvenez-vous : c’était à la fin d’Hibernatus. Louis de Funès, alias Hubert de Tartas, se faisait congeler et donnait rendez-vous à sa famille « dans un demi-siècle ». 1970 - 2020 (1). Comme promis, Fufu est de retour. Plus populaire que jamais. Depuis un an, un musée lui est consacré à Saint-Raphaël. Il a été la star du petit écran pendant le confinement. La Cinémathèque française lui rend hommage à partir du 15 juillet. Et ce soir, France 3 lui consacre un documentaire inédit. La Folle aventure de Louis de Funès invite à « découvrir l’homme derrière l’acteur ». Une ambition décryptée par la réalisatrice Lucie Cariès.
Il existe des dizaines d’ouvrages et plusieurs documentaires sur ce comédien. Qu’apportez-vous de nouveau ?
Beaucoup de choses ont été dites sur l’acteur, précisément, mais beaucoup moins sur l’homme. J’aime De Funès depuis toujours. Comme tout le monde, j’ai grandi avec ses films. Pourtant, je ne connaissais presque rien de sa personnalité ! En visionnant les archives de l’Ina, interview après interview, j’ai découvert son incroyable pudeur et sa délicatesse. C’est cette histoire-là que j’avais envie de raconter.
Pourquoi ne pas avoir donné la parole à ceux qui l’ont connu ? À commencer par ses fils…
Je ne voulais personne d’autre que Louis lui-même. Dans mon film, on n’entend que sa voix et celle d’Isabelle Nanty qui dit le commentaire. Bien sûr, j’ai rencontré Olivier de Funès qui m’a donné de précieux renseignements sur son père.
Vous évacuez en trente secondes la première famille de De Funès. Peut-on cerner « l’homme intime » sans parler de sa première compagne, Germaine, et de son fils aîné Daniel [décédé en , ndlr] ?
Je n’avais pas assez d’informations pour étayer mon propos. J’ai pu entrer en contact avec Laurent de Funès, fils de Daniel, qui m’a confié la photo où l’on voit Louis avec son premier enfant. Mais je n’ai pas réussi à déterminer la place exacte qu’a eu Germaine dans sa vie ; je ne voulais pas me hasarder en terrain inconnu.
Vous avez eu accès à des documents inédits : les carnets de Louis, où il notait ses idées de gags et ses pensées, et ses films de famille tournés en Super . D’où viennent-ils ?
Du musée de Saint-Raphaël. Olivier et Patrick de Funès ont confié à la Ville la totalité de leurs archives. Une partie est présentée au public, l’autre est mise à disposition des journalistes et des chercheurs. J’ai pu avoir accès à la totalité du fonds. Et j’ai trouvé de véritables merveilles ! Les films Super sont émouvants, mais les carnets sont vraiment bouleversants. On y découvre le quotidien d’un professionnel inquiet qui n’arrêtait jamais de chercher, d’imaginer, de se remettre en question. Louis visait la perfection avec ses idoles en ligne de mire : Charlie Chaplin, Laurel et Hardy, Buster Keaton. Lorsqu’on voit la profondeur de ce travail en amont, on mesure combien il a pu être blessé d’être traité de « grimacier ».
Ces carnets contiennent également des observations plus intimes...
Louis couchait ses réflexions sur la vie et sur les gens. Surtout après ses deux infarctus de , qui l’ont contraint à s’arrêter de tourner pendant un an. Les dernières pages qu’il a noircies avant de disparaître, le janvier , ressemblent à une profession de foi.
Tout cela est reproduit avec l’autorisation de la famille de Louis. A-t-elle exigé un droit de regard sur votre film ?
Absolument pas. Et je tiens à insister sur ce point, car c’est extrêmement rare !
Ils m’ont fait une confiance totale. Olivier et sa fille, Julia, n’ont vu le documentaire qu’une fois terminé.
Évoquant les ultimes années de Louis, vous dites : « Macha Béranger a été la dernière vraie rencontre de De Funès ». Cette formulation n’est-elle pas un peu... elliptique ?
Une profession de foi avant de disparaître”
La famille n’a exigé aucun droit de regard”
Il y a des choses qu’on ne sait pas, qu’on ne saura sans doute jamais. Et qui, de toute façon, n’ont plus beaucoup d’intérêt aujourd’hui. Y a-t-il eu une histoire plus qu’amicale entre Louis et l’animatrice des nuits de France Inter ? Peu importe.
() Ce qui compte, c’est que cette rencontre a amené Louis à se dévoiler, sur les ondes, plus qu’il ne l’avait jamais fait. Grâce à Macha, on connaît mieux cet homme sensible, profond, qui s’est longtemps caché sous le masque du comique français N° . 1. Le film d’Édouard Molinaro est sorti en 1969, mais l’action est située un an plus tard. 2. Macha Béranger a animé l’émission Allô Macha du 5 avril 1977 au 30 juin 2006. Elle est décédée en 2009.
La Folle aventure de Louis de Funès, un film de Lucie Cariès, ce soir à 21 h 05 sur France 3.