Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Jean Castex, élu de territoire plutôt que « techno »

Le Gersois de 55 ans, jusqu’ici maire de Prades, incarne la synthèse entre haute administra­tion et élus locaux. Ce « M. Déconfinem­ent » devenu Premier ministre connaît les coulisses du pouvoir

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

S «oyez bon ! » En théorie, Jean Castex a deux ans devant lui pour exaucer le voeu d’Édouard Philippe sur le perron de Matignon. Bon ? Jusqu’ici, le nouveau Premier ministre aurait tout bon, à en croire le concert de louanges qui a accompagné sa nomination surprise. Ce portrait flatteur sera fatalement nuancé par l’exercice du pouvoir, au fil de frictions inhérentes à la fonction. Voilà trois mois, Jean Castex, haut fonctionna­ire inconnu du grand public, était propulsé « Monsieur Déconfinem­ent » du gouverneme­nt. Sa mission : coordonner la stratégie de sortie de crise du coronaviru­s. Aujourd’hui, les Français saluent la gestion du déconfinem­ent, autant qu’ils dézinguent la gestion de la crise sanitaire. Un bon point pour le nouveau patron de Matignon. Mais pour retracer le parcours de Jean Castex, il faut remonter 55 ans en arrière. Direction le Sud-Ouest et son Gers natal, à Vic-Fezensac. Il en a gardé l’accent gascon. Sans doute, aussi, le goût de la politique et du rugby (lire ci-dessous). Marc Castex, son père, fut le maire de Vic-Fezensac, sénateur du Gers et président du club de rugby local.

Maire et énarque

En 2008, Castex fils devient à son tour maire d’une commune rurale : Prades, 6 000 habitants, dans les PyrénéesOr­ientales. Il sera aussi conseiller départemen­tal et régional. Mais cet énarque a atteint les plus hautes sphères de l’État sans passer par le fauteuil de ministre, ni les bancs parlementa­ires. Deux cases qu’il ne coche pas.

Pour le reste, son CV réussit l’équilibre permanent cher au « en même temps » macronien Jean Castex reste ancré dans les territoire­s, lui qui a été réélu maire haut la main (75 %) en mars. C’est un homme de droite assumé (même s’il a dû rendre sa carte des Républicai­ns hier), mais un « gaulliste social » susceptibl­e de tendre sa main gauche.

L’accent mis sur les dossiers chauds

« Mes valeurs : responsabi­lité, laïcité, autorité. Les valeurs de la République », a résumé Jean Castex, hier soir, sur TF1. Ce père de quatre filles se présente comme un serviteur zélé de son pays, venu « chercher des résultats et non la lumière » .LeGersois l’a prouvé aux côtés de Xavier Bertrand, dont il fut directeur de cabinet aux ministères de la Santé, puis du Travail (2006-2008). De Nicolas Sarkozy, ensuite, en tant que conseiller aux affaires sociales (2010-2011), puis secrétaire général adjoint de l’Élysée (2011-2012). Bref, Jean Castex est rompu aux coulisses tumultueus­es du pouvoir. Il a aussi été délégué interminis­tériel aux Jeux olympiques de Paris 2024, a présidé l’Agence nationale du sport, avant de conseiller le gouverneme­nt Philippe sur le déconfinem­ent. Une mission délicate, apéritif de « l’immensité de la tâche » qui l’attend. À gauche comme à droite, chacun louait hier ses qualités humaines, son écoute, son affabilité. D’autres, à commencer par ses ex-alliés LR, voient en lui « un techno » à la botte du Président. Ce fils d’une institutri­ce du Gers se dit, lui, «fier» d’avoir été « un homme politique de la vie quotidienn­e des gens », avant de connaître un destin national. Il « croit aux territoire­s ». Les territoire­s espèrent pouvoir croire en lui.

 ?? (Photo Pool/Stéphane Lemouton/MaxPPP) ?? Homme de dossiers, réputé affable mais ferme, Jean Castex a sauté bien des étapes et coché de nombreuses cases pour entrer à Matignon.
(Photo Pool/Stéphane Lemouton/MaxPPP) Homme de dossiers, réputé affable mais ferme, Jean Castex a sauté bien des étapes et coché de nombreuses cases pour entrer à Matignon.

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