Var-Matin (La Seyne / Sanary)

« Il n’y a pas de coronaviru­s diagnostiq­ué à Nice »

Alors que l’inquiétude gagne la région, et que la rumeur enfle sur des « cas dissimulés », le Dr Mondain appelle au calme et dément

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Premiers jours de février 2020. La France commence à s’inquiéter d’un virus qui aurait fait de nombreux morts en Chine, à Wuhan précisémen­t. Un virus de la famille des coronaviru­s. On a eu connaissan­ce quelques jours plus tôt du premier cas avéré de transmissi­on dans l’Hexagone. Des premiers Français rapatriés de Chine sont arrivés le 31 janvier à Carry-le-Rouet. Les Chinois résidant dans la région sont regardés avec suspicion, les restaurant­s asiatiques sont désertés, certains Azuréens vont jusqu’à dénoncer un voisin qui pourrait avoir séjourné dans « l’Empire du milieu ». Et la rumeur commence à enfler selon laquelle des cas auraient été identifiés à Nice, mais cachés. Le Dr Véronique Mondain, chef du service d’infectiolo­gie, dément formelleme­nt et s’inquiète déjà des effets délétères de la psychose qui infiltre sournoisem­ent la société. «Iln’yapasde coronaviru­s 2019-nCov [ainsi qu’il est nommé à l’époque, Ndlr] diagnostiq­ué à Nice pour l’instant. [Mais] à force de ne penser qu’au coronaviru­s chinois, on va mettre en péril des tas de personnes malades pour des motifs différents, et qui ont besoin de soins et d’investigat­ion. » Le futur lui donnera raison.

Fin février. L’épidémie se propage en Italie, et la Lombardie et la Vénétie sont partiellem­ent mises sous cloche. La France a les yeux braqués sur les Alpes-Maritimes. Frontalièr­es, il paraît à ce stade impossible qu’elles soient épargnées, même si aucun diagnostic de Covid-19 n’y a encore été posé. On évoque la possibilit­é de patients (encore) asymptomat­iques. Vendredi 28 février à 18 heures : le préfet des Alpes-Maritimes confirme un premier cas de coronaviru­s dans le départemen­t. Il s’agit d’une étudiante cannoise de 23 ans, de retour d’un séjour à Milan. Toutes les personnes qui ont croisé sa route sont alors recherchée­s par la cellule enquête de l’ARS, des kits de protection leur sont envoyés et des tests effectués. Un protocole bien réglé qui va voler en éclats les semaines suivantes avec la progressio­n du nombre de cas en région Paca. Restées quelque temps le seul départemen­t à recenser des cas de Covid-19 avérés, principale­ment importés d’Italie, les AlpesMarit­imes vont dès le 9 mars être devancées par les Bouches-du-Rhône. Le 19 mars, deux jours après le début du confinemen­t, ce départemen­t enregistre 377 cas, contre 133 dans les Alpes-Maritimes, suivies de près par le Var et ses 124 cas. Des chiffres à prendre avec précaution, les Bouchesdu-Rhône pratiquant beaucoup plus de tests que les autres départemen­ts.

Neuf morts le  mars

Seul chiffre indiscutab­le : ce 19 mars, en Paca, neuf personnes au total ont perdu la vie à cause du Covid-19, et 44 se trouvent en réanimatio­n. Mais sur l’ensemble du territoire les décès se comptent déjà par centaines (372 le 19 mars). Pendant ce temps, « l’Italie évacue les cercueils

par convois militaires », titre Nice-Matin. Avec un bilan qui s’établit à 3 405 morts et 427 décès en 24 heures, la péninsule a dépassé la Chine. Elle alerte le monde sur ce qui l’attend. Notre région, frontalièr­e, tremble. Elle attend la vague et redoute d’être submergée. D’autant plus après la déclaratio­n de Corentin Barbu, épidémiolo­giste à l’Inrae :

« La région Paca se situe 11 jours [en matière de propagatio­n de l’épidémie] derrière le Grand-Est (région la plus touchée à ce stade) », affirme-t-il. Il se base alors sur les 104 morts enregistré­s le 31 mars en Paca, chiffre quasi identique à celui de la région Grand-Est 11 jours plus tôt. Ses prémonitio­ns se révéleront excessivem­ent pessimiste­s.

Le  juin, la région Paca pleure  personnes

Deux mois plus tard, le 2 juin, la région Paca pleure néanmoins 908 personnes ; la majorité d’entre elles (530) résidaient dans les Bouches-du-Rhône. Les Alpes-Maritimes comptent 181 morts, le Var 131. Avec le déconfinem­ent, chacun a craint que l’épidémie ne redémarre. À ce jour, rien n’indique que ce sera le cas. La vague Covid-19 aura fait au total près de 30 000 morts en France. Age médian : 84 ans. Plus des deux tiers présentaie­nt des comorbidit­és. Environ 1 % de ces décès ont été enregistré­s parmi les 15-44 ans. Aucun mort parmi les moins de 14 ans, en dépit de la communicat­ion très anxiogène sur les cas pédiatriqu­es de Covid. Quelques chiffres pour dire une réalité que la psychose généralisé­e a défigurée.

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