Restituer un portefeuille avec € : probité sans compter !
Ali, un sans domicile fixe fréjusien, a rendu un portefeuille oublié sur une table d’un restaurant raphaëlois. Hier, il a rencontré l’heureux propriétaire, encore touché par ce geste
B «ien mal acquis ne profite jamais. » Cette phrase a trotté dans la tête d’Ali Ben Mokhtar et Mokhtar Selem, dimanche sur les coups de 22 heures devant le kebab O Délice, à Saint-Raphaël, à quelques encablures du bord de mer. Les deux cousins allaient se restaurer lorsqu’ils ont trouvé un portefeuille noir sur une table du restaurant. Avec, à l’intérieur, des papiers d’identité... Et surtout 1 505 euros en liquide ! Un contenant et un contenu que les deux hommes ont rapporté en intégralité, le soir même, au commissariat de police de Fréjus. « Nous avons tout de suite voulu le rapporter, mais mon cousin, qui a vu le portefeuille en premier, n’a pas ses papiers français, alors il avait peur d’aller au commissariat le déposer. C’est donc moi qui m’y suis rendu », rembobine Mokhtar Selem. Un geste remarquable qui leur a, dans un premier temps, valu les louanges des forces de l’ordre puis les remerciements d’Emilian Apetria. Ce grand gaillard roumain en vacances familiales à Fréjus s’était fait une raison : il ne reverrait plus son précieux étui. Les sous, encore moins. Et bien non.
« Je me suis mis dix secondes à sa place... »
Hier, le dentiste, installé dans l’Indre, a pu rencontrer avec son frère, ceux qui leur ont égayé leur séjour fréjusien, entamé la veille à cause d’un moment d’égarement. Devant l’établissement raphaëlois, les quatre hommes se sont retrouvés. L’un pour les remercier « infiniment », les autres pour expliquer où ils avaient retrouvé le maroquin, revenir sur leur geste et cette soirée. Après de longs remerciements, Emilian a glissé discrètement une petite pochette à Ali, très ému. Les deux hommes n’en attendaient pas tant. Leur geste n’était pas motivé par un souhait de reconnaissance. « Je me suis mis dix secondes à sa place, explique dans un premier temps Mokhtar. J’ai regardé la pièce d’identité et j’ai vu une adresse étrangère, donc potentiellement un touriste. Je ne voulais pas qu’ils gardent une mauvaise image de la ville. Demain, si on me casse une vitre où on me vole quelque chose en vacances, je n’y remets jamais les pieds », poursuit le néo-Fréjusien, installé à la Gabelle depuis quelques mois, à peine arrivé de la région parisienne. Son cousin algérien, sans domicile fixe et bénéficiaire des services de Paola Solidarités et de l’association Main dans la main résumera son acte plein de probité par ces quelques mots laconiques : « C’est l’éducation. Je suis habitué à ne pas voler ».
Les forces de l’ordre étonnées
Ce comportement n’étonne pas Ferhat Ahmed, bénévole de l’association en charge de son insertion et des démarches administratives. « Il est comme ça dans la vraie vie. Il veut s’intégrer dans le moule de la France ». Face à l’importante somme d’argent dans le portefeuille, ils ont préféré le garder en leur possession et attendre devant le restaurant pendant une trentaine de minutes au cas où le touriste revienne le chercher. Il n’en a rien été. Les honnêtes gens se sont ensuite dirigés vers le commissariat et le service des objets trouvés. Et c’est seulement une heure et demie plus tard qu’ils engloutiront un kebab bien mérité. « Si l’adresse avait été dans le coin, je serais allé le déposer chez la personne, mais là, c’était plus sûr de le déposer chez les policiers », justifie le quadragénaire, technicien dans la téléphonie. Des forces de l’ordre elles-mêmes étonnées au moment d’enregistrer la réception du précieux étui. Notamment de son contenu. C’est le lendemain, plus par acquit de conscience que par réel espoir, qu’Emilian Apetria a téléphoné au commissariat et appris la bonne nouvelle. « Sur le coup, je n’y ai pas cru. J’ai mis quelques secondes à réaliser », explique le praticien roumain, officiant en France. Alors quand on m’a dit qu’en plus il y avait encore l’argent dedans c’était incroyable ! » L’histoire ne dit pas si les trois hommes ont partagé un kebab ensemble pour célébrer cette belle histoire. Ils l’auraient amplement mérité. Mais l’important était ailleurs : la bonté et l’honnêteté prédominaient. Avant de se quitter, le touriste roumain a juste demandé un petit selfie à son « sauveur ».