Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Une procédure d’indemnisat­ion complexe

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Le salarié en arrêt en raison d’un accident du travail a droit à des indemnités journalièr­es versées par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) jusqu’à la consolidat­ion de son état de santé. Après la consolidat­ion, il peut aussi prétendre à un capital ou à une rente selon la gravité des séquelles. Une expertise a lieu, à l’initiative de l’Assurance maladie, pour déterminer le taux d’incapacité de travail et l’indemnisat­ion (de 1 à 9 % un capital, à partir de 10 % une rente versée à vie). Voilà pour la procédure amiable. Il existe une procédure judiciaire, qui permet à la personne de revendique­r un meilleur dédommagem­ent quand l’accident relève d’une faute inexcusabl­e de l’employeur. Une expertise est ordonnée, cette fois par un tribunal, et des indemnités complément­aires, ainsi qu’une majoration de la rente, peuvent être obtenues.

Un contentieu­x très technique

La victime d’un accident du travail étant confrontée à ce cheminemen­t administra­tif fastidieux, l’appui de

profession­nels, comme les avocats, ou d’associatio­ns comme la FNATH, fédération qui défend et soutient les accidentés du travail et les handicapés, est indispensa­ble. « C’est d’une complexité inouïe pour le salarié, c’est un contentieu­x très technique. Mieux vaut être accompagné par des personnes compétente­s », conseille Jean-Christophe Bianchini, avocat (au barreau de Toulon) spécialisé dans l’indemnisat­ion des victimes d’accident, qui a assisté Jacques Paul, un docker écrasé entre deux remorques (lire son témoignage page suivante).

D’où l’intérêt aussi de déposer plainte rapidement pour suspendre le délai de prescripti­on et pour obtenir une meilleure prise en compte de ses droits. Concrèteme­nt, tout accident grave doit donner lieu à une enquête de police ou de gendarmeri­e, visant à vérifier s’il y a eu respect des règles de sécurité, puisque l’employeur a une obligation de sécurité vis-à-vis du salarié. Une enquête de l’inspection du travail, à l’initiative du parquet, peut être menée. «

Parfois, on a l’impression que les inspecteur­s du travail sont démunis, qu’ils n’ont pas toute l’aide, tout l’appui dont ils ont besoin relève le spécialist­e. »,

La charge de la preuve repose sur la victime

Autre remarque, lorsqu’un salarié victime d’un accident va devant le pôle social des prud’hommes, la charge de la preuve repose sur ses épaules ! Or, des mois, des années après, les personnes ont le plus grand mal à réunir ces preuves et à reconstitu­er l’accident. «

Et pour les collègues, s’ils

sont toujours dans l’entreprise, il est délicat de témoigner de peur de perdre leur

emploi », constate-t-il. Quand la faute inexcusabl­e est reconnue, elle permet d’obtenir une majoration de la rente d’incapacité permanente et la réparation intégrale des préjudices subis et non indemnisés par la rente. Ce sont notamment les souffrance­s physiques et morales, les préjudices esthétique­s et d’agrément, ceux résultant de la perte ou de la diminution de la possibilit­é de promotion profession­nelle, la prise en charge de l’aide humaine temporaire jusqu’à la consolidat­ion, les frais de véhicule et/ou logement adapté, etc.

Le salarié face à deux adversaire­s

Dans la pratique, il est fait souvent appel des décisions car les indemnités

sont sous-évaluées. « L’Assurance maladie fait l’avance et peut se faire rembourser par l’employeur, or beaucoup ne sont pas solvables. On connaît tous l’état des finances de la Sécurité sociale, qui tente par tous les moyens de limiter les indemnisat­ions, déplore Me Bianchini. Le salarié se retrouve face à deux adversaire­s : la Sécurité sociale et l’employeur. C’est très dur pour lui. » L’avocat toulonnais souligne : « C’est un véritable enjeu, le dispositif n’est pas satisfaisa­nt. Si l’accident survient en début de carrière, la personne va percevoir une rente ou un capital insuffisan­t si elle se retrouve en incapacité. On crée ainsi de nouveaux pauvres. » La solution, pour laquelle il milite, serait dans l’assurance obligatoir­e des employeurs contre le risque de faute inexcusabl­e, comme en matière de sécurité routière.

 ?? (Photo Aéro-drones ) ?? L’aide d’un juriste associatif ou d’un avocat comme Me Bianchini, est précieuse.
(Photo Aéro-drones ) L’aide d’un juriste associatif ou d’un avocat comme Me Bianchini, est précieuse.

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