LA SPÉLÉO POUR TOUS
À Signes, une grotte facile d’accès, encadrée À 40 m sous terre la salle du lac et ses merveilles
O «h? C’est une randonnée très facile. Il y a juste un passage un peu étroit à l’entrée, mais la difficulté est surtout psychologique, et après il y a de la place… », rassure Thierry Cucherat, l’accompagnateur de cette balade pas comme les autres. Quand il ne tutoie pas les sommets, le diplômé d’un brevet d’État spéléologie, gérant du parc accrobranches Au royaume des arbres, l’un des plus grands d’Europe s’étendant sur les cimes du Castellet, voyage sous la terre. Tous les ans, il encadre une cinquantaine de groupes à la découverte d’une célèbre grotte varoise, dont l’entrée est située sur le plateau de Signes (voir ci-dessous).
Adultes et enfants
C’est l’une des quatre d’accès facile du département, avec la résurgence du Beausset, les grottes de Méounes et de Néoules. «Ça ne fait pas beaucoup quand on sait qu’il y a plus de 3 000 cavités répertoriées dans un rayonde50km» , glisse-t-il alors qu’il guide sur les chemins de randonnée, au départ de la zone de Signes, les visiteurs du jour : les familles Wydock, Rohart et Protin, onze personnes, dont plusieurs enfants. Ils sont venus de Tourcoing dans les Hauts-de-France… Pour un voyage au centre de la terre. L’objectif du jour est particulier aux yeux de Thierry Cucherat, 58 ans : « Mon père m’a emmené visiter cette grotte quand j’avais 12 ans, c’était la première fois que je faisais de la spéléologie et l’expérience, éblouissante, m’a donné envie d’en faire mon métier », confie-t-il, alors que le renfoncement en demi-cercle de l’aven, un gouffre naturel creusé jadis par les eaux d’infiltration dans le terrain calcaire, apparaît sans prévenir, au bas d’une petite pente.
À travers un plafond effondré
Les combinaisons protectrices orange sont enfilées, les casques, avec frontales allumées, vissés sur la tête, c’est l’heure… Difficile de deviner, tellement il semble exigu, l’étroit passage – « laissé volontairement en état pour dissuader les téméraires sans expérience et pouvoir être facilement obstrué avec des pierres » – dans lequel il faudra pourtant se glisser. En se couchant sur le dos ça passe ! Tant bien que mal… Il faut juste ne pas être atteint de claustrophobie… Et ce n’est pas fini ! Il faut encore jouer des coudes, des genoux, ramper, douter, réfléchir, se tordre dans tous les sens, escalader. Se faufiler à travers une suite de couloirs étroits qui se succèdent, démembrés, tordus, creusés dans un chaos de blocs de roche déchiquetés ; circuler entre d’inespérées cavités, dont une première salle où il est presque possible de se tenir debout, et des pentes glissantes et humides… Tout cela en évitant les effleurements de calcaire, stalactites et stalagmites (qui se forment au rythme de 1 à 2 mm par siècle) auxquelles le casque se heurte immanquablement avec des cognements sourds qui masquent les halètements et les exclamations. Les fortes corpulences souffrent. Pas forcément très facile, mais faisable. « On progresse à l’intérieur d’un plafond effondré », schématise Thierry Cucherat, qui toujours trouve les mots pour rassurer, aider et conseiller.
Une veine d’argile
Un dernier goulet, une dernière pente et voilà la récompense : à 40 m sous terre, la gigantesque salle du lac s’ouvre à tous les regards. Avec son plafond de stalactites blanchâtres, non souillées par la main de l’homme, dont la fantasmagorique « méduse » semblable à un lustre ; sa veine d’argile et la petite résurgence – à sec – par laquelle l’eau forme un lac souterrain après les orages… Le retour à la surface emprunte un chemin « plus spéléo ». Ça fait presque peur. Toujours porté par la dynamique de groupe – «Siles enfants y arrivent… » – la remontée semble même relativement plus facile. Et voilà l’étroit goulet, qui même bras en avant semble encore plus infranchissable qu’à l’aller. Une ultime poussée. Et l’obscurité laisse la place à la lumière.