Les enseignants inquiets des conditions de la rentrée
Alors que les contaminations au Covid-19 continuent à progresser dans l’Hexagone, le monde de l’éducation dénonce le protocole établi en juillet allégeant les mesures sanitaires en classe
« Préoccupés », « dans l’expectative », les enseignants s’inquiètent des conditions dans lesquelles va se dérouler la rentrée, alors que les contaminations repartent à la hausse et que le dernier protocole, établi en juillet, allège les mesures sanitaires en classe. « C’est une situation d’impréparation totalement inédite » ,estime Sabine Duran, directrice de l’école élémentaire Joséphine Baker à Pantin, en région parisienne. Le dernier protocole sanitaire lui paraît « aberrant ». « Le fait que dans les rues et les lieux clos, on demande d’être masqué, et qu’à l’école on ait si peu de précautions, ça pose question », déclare-t-elle.
Assouplissement à revoir ?
En plein coeur de l’été, les règles de distanciation physique et de brassage ont été nettement assouplies en juillet, permettant à tous les élèves de pouvoir revenir en classe. La mesure de distanciation physique dans les espaces extérieurs n’est plus appliquée ; dans les espaces clos (salles de classe, bibliothèques, cantines...), celle-ci n’est plus obligatoire « lorsqu’elle n’est pas matériellement possible » ou « qu’elle ne permet pas d’accueillir la totalité des élèves ». Le port du masque n’est plus obligatoire pour les personnels de l’école maternelle ni pour les enseignants se tenant à plus d’un mètre des élèves, en élémentaire, collège et lycée. Les élèves de plus de 11 ans doivent, en revanche, le porter dans les espaces clos et extérieurs lorsqu’une distanciation d’un mètre ne peut être garantie. Interrogé, le ministère de l’Education a souligné que ce protocole pouvait s’« adapter aux réalités du terrain à travers les échanges, au plan local, entre les préfets, les recteurs, les agences régionales de santé et les collectivités territoriales ». Mais cela semble insuffisant à Stéphane Crochet, secrétaire général du syndicat d’enseignants SE-Unsa : «A l’école, et en particulier au collège et au lycée, on ne pourra pas faire moins que dans le reste de la société », estimet-il au lendemain de l’annonce de la ministre du Travail Elisabeth Borne rendant obligatoire le port du masque en entreprises « Les rebonds de l’été amènent à se poser un certain nombre de questions », juge également Philippe Vincent, du SNPDEN, premier syndicat des chefs d’établissement, qui note que le protocole de juillet a été « publié à une époque où on était plutôt en phase descendante de l’épidémie ». « On a un peu l’impression que le ministère fait comme si la rentrée était ordinaire », affirme, « préoccupée », Guislaine
David, du SNuipp-FSU, premier syndicat du primaire. « Or, l’école n’est pas hors sol. La possibilité d’avoir de nouveaux clusters et de refermer éventuellement les écoles, c’est inquiétant pour les collègues ». « Il faut des ajustements très précis et très conjoncturels », estime, elle aussi, Sophie Vénétitay, du Snes-FSU, premier syndicat enseignant dans le second degré. Elle voudrait ainsi que soit « renforcée la règle s’agissant du port du masque », réclame davantage d’aération des salles de classes, des mesures précises pour « les personnels et les élèves fragiles » .... Mais aussi des détails pour les enseignements spécifiques – la manipulation de matériel en sciences, le maintien de la chorale en musique, etc.
Les syndicats seront reçus par Blanquer
« Toutes nos classes sont bondées, à 32 élèves. Les enfants seront à 45 cm les uns des autres », rappelle Mathilde, professeure d’anglais dans un lycée de centre-ville de Marseille. Or les Bouches-du-Rhône, comme l’Ile-de-France, sont des régions où le virus circule activement. Les syndicats ont demandé des rendez-vous avec le ministère, dont certains sont calés en début de semaine prochaine. A ce stade, le ministre JeanMichel Blanquer doit s’exprimer lors de la conférence de rentrée le 26 août.