Château Thuerry a soif de toujours plus de naturel
Déjà converti au bio, ce domaine viticole du Haut-Var, dont les bouteilles égayent les tables des plus grands chefs français, va produire pour la première année un vin blanc « naturel »
À77 ans, Jean-Louis Croquet, l’heureux propriétaire du Château Thuerry, domaine de quatre cents hectares situé à cheval sur les communes de Villecroze, Flayosc et Tourtour, pourrait se reposer sur ses lauriers, au milieu de ses quarante-trois hectares de vignes. C’est mal connaître le bonhomme. Toujours en quête de perfection, d’excellence, ce « jeune » vigneron – après tout, ça ne fait que vingt-deux ans qu’il est professionnel – se lance un nouveau défi : produire du vin naturel. « Sans aucun intrant, notamment sans sulfites », traduit Jean-Louis Croquet Si ce dernier met volontiers en avant « le docteur Mistral », un allié qui limite le développement des maladies, il sait pertinemment que la nature provençale, même bénie des dieux, ne boude pas une petite intervention humaine.
Des investissements permanents
Pour tutoyer la perfection, voilà deux décennies que Jean-Louis Croquet, épicurien qui aime au moins autant boire du bon vin qu’en produire, investit massivement dans son domaine. Le chai, construit au milieu des vignes il y a déjà vingt ans, a beau en être la figure de proue, les investissements ne s’arrêtent pas là. « Chaque année, nous investissons en moyenne 200 000€ pour améliorer la qualité des raisins et donc, au final, du vin », confie l’âme de Thuerry. En récompense, JeanLouis Croquet a déjà pu produire, quelques très rares années, l’Exception2. Une cuvée qui soutient la comparaison avec les grands vins de Bordeaux, dit-on. Fier du travail accompli, le vigneron varois affirme qu’il produit « les meilleurs vins rouges du Sud-Est ». Mais c’est sur le blanc, en AOC côtes-de-provence, qu’il va tenter dès cette année l’aventure du vin naturel. Pour s’en donner les moyens, là encore, des investissements ont été réalisés. Pour le travail de la terre d’abord, avec l’acquisition d’une bineuse intercep, une machine qui permet de désherber entre les pieds de vigne sans risque de les abîmer et ni recours à des produits chimiques. Dans le chai, l’effort a été mis sur le développement des vinifications à basse température, la stérilisation de l’air entrant, et celle de la chaîne d’embouteillage.
Dans le sens de l’Histoire
Pour le facteur humain, le petit coup de pouce à la nature, JeanLouis Croquet a fait revenir Olivier Felis, l’ancien caviste de Château Thuerry, parti pendant quinze ans parfaire ses compétences dans le Bordelais. De retour à la maison, en quelque sorte, mais au poste de directeur technique, c’est lui qui est en charge du passage au vin naturel. Si l’essai ne va être mené que sur cinquante hectolitres de blanc, la pression est prégnante. Quand bien même, les vendanges, prévues début septembre, s’annoncent sous les meilleurs auspices. « Pour la première année, on s’attend à rencontrer quelques difficultés », reconnaît d’ailleurs JeanLouis Croquet. Qu’importe, cet ancien dirigeant de l’institut de sondage Sofres continue de sentir les évolutions de la société. S’appuyant sur la constante baisse de la consommation de vin en France, il est persuadé que s’ils boivent moins, les Français boiront mieux. La crise du Covid-19 l’a confirmé avec les changements de comportement des consommateurs. « Le consommateur aujourd’hui est de plus en plus sensible à l’impact environnemental. Il veut du bio, produit localement. »