Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Les vendanges sur le dos de Robocop

Au choeur du domaine du Rouët, nous avons osé dompter la vendangeus­e et suivre, à la trace, le fabuleux destin du petit grain de raisin. Un court voyage initiatiqu­e enivrant...

- RAPHAËL COIFFIER rcoiffier@nicematin.fr

Et au milieu coule une rivière. De vignes. Sur 100 hectares. Serpentant route de Bagnols. C’est là, loin de l’agitation des villes, que nous attend Matthieu Savatier. Patron protecteur du domaine du Rouët. A lui de nous métamorpho­ser en vendangeur d’un jour. En intermitte­nt du spectacle agricole... A peine débarqué, déjà dans le 4x4. Direction les dernières parcelles à dénuder de leurs fruits attendus. « On arrive au bout. On a débuté le 26 août, avec une semaine d’avance en raison des bonnes conditions climatique­s », explique, masqué, le boss des lieux. Quelques bosses sur le chemin caillouteu­x et, enfin, les objets du désir. Sauf, qu’à l’horizon, pas un dos courbé. Pas de paniers. Ni de sécateurs. Mais une vendangeus­e carrossée de bleu. Un monstre de technologi­e. « Notre Robocop ! » Sur le dos duquel Laurent nous invite à grimper. Comme pour mieux dominer la parcelle. Figée devant l’appétit de cette impitoyabl­e avaleuse... Secoué à chaque passage, on y voit se bousculer les grains de raisin. aussi, ont du goût. « Au point qu’ils nous coûtent 50 000 euros par an », peste notre guide, devenu expert en clôtures... En tout cas, cette moisson du matin ne régalera pas leurs groins. Elle coule, tel un torrent au printemps, jusqu’à des tubes de refroidiss­ement. « Car si on ne refroidiss­ait pas, ça donnerait du rouge. Et, quand j’étais enfant, on faisait ça avec de l’eau de source. » Elle coule, pour se jeter au coeur du pressoir pneumatiqu­e. Avant, enfin, de se reposer dans les cuves. De faire place à la vinificati­on. « Goûtez ça, goûtez. » Du jus de raisin. Du nectar. Transformé au deuxième verre par la macération carbonique. « Vous sentez, ça pétille en bouche... » Tel un bonbon liquide. Fruité. La chrysalide, berceau propice à l’envol des papilles. « Il ne nous reste plus qu’à le surveiller et, d’ici environ trois mois, on aura le produit final. » L’alliance de la tradition et des techniques modernes livrera alors son verdict. Des vins (le domaine produit environ 550 000 bouteilles par an pour la France, l’Europe, les Etats-Unis et même la Russie) de caractère, baptisés Fréjus, Belle Poule, 1840 ou encore Estérelle. « Venez au caveau pour une dégustatio­n. » Pour boucler la boucle d’une matinée enivrante dans la peau d’un vigneron. Seulement, à 11 heures, c’est encore un peu tôt pour trinquer à la gloire de notre initiation par sieur Savatier. Croquer un grain de raisin, orphelin, suffira à notre bonheur...

Château du Rouët, route de Bagnols, 83490 Le Muy. Tél. 04.94.99.21.10. www.chateau-du-rouet.com

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