Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Sorciers, sorcières… IMAGINATIO­N OU FAITS AVÉRÉS ?

A l’approche d’Halloween se préparent déjà costumes de fantômes, squelettes, vampires et autres ensorceleu­rs qui, aujourd’hui parodiés, furent longtemps sujet de frayeurs populaires.

- NELLY NUSSBAUM nous@nicematin.fr

Depuis toujours en Provence, sorcières et sorciers ont fait leur office. Ceux qui jetaient les mauvais sorts étaient appelés masque ou masca dans le comté de Nice. Ceux qui étaient bénéfiques, étaient les démasquaïr­é. On les voyait souvent accompagné­s de leur matagot, chat noir et diabolique obtenus en échange de leur âme. On dit aussi qu’elles – 90% étaient des femmes – pouvaient se changer en animal et insecte pour mieux épier les humains sans être vues. Ces images tiennent bien évidemment de la légende. Mais la croyance populaire et la terreur qu’ils inspiraien­t sont tenaces.

Craints ou sollicités

En fait, il n’y a pas encore si longtemps, lorsqu’une personne tombait malade, que les bêtes mouraient, que le vin tournait, que la viande faisandait, que des accidents se répétaient ou que quelqu’un dépérissai­t, il se disait que la ferme était emmasquée. Soit qu’un masque avait jeté un mauvais sort sur cette maisonnée. Dans ce cas, pas la peine de solliciter le saint patron du village, d’entreprend­re un pèlerinage ou de demander conseil au curé qui refusait de s’en mêler. Non, le seul moyen s’en tirer était d’aller trouver un démasquaïr­é et faire preuve d’humilité. Si pour vivre en paix, les paysans les évitaient du mieux qu’ils pouvaient, ils ne les rejetaient pas complèteme­nt. Car, si le masque était craint, le démasquaïr­é était recherché pour soigner corps, âmes et animaux et on pouvait avoir besoin de lui pour échapper au pouvoir de leurs congénères. D’autre part, certains plus instruits et moins frustes, étaient spécialisé­s dans les herbes médicinale­s et on les appelait pour soigner les malades. Beaucoup d’entre eux avaient la double fonction de faire et défaire, c’est-àdire jeter des sorts, mais aussi de les lever.

On attribuait des pouvoirs à ceux qui, vivants en solitaire – mendiants, vieilles femmes – avaient un mode de vie différent. Notamment les bergers qui, exclus du monde paysan proprement dit, étaient presque tous soupçonnés de sorcelleri­e. Particuliè­rement, lorsqu’après leur passage, un accident survenait chez l’un des fermiers du village. Si aucun de ces marginaux n’était suspect, il fallait chercher dans le village qui pouvait causer ces maléfices. Le sorcier pouvait être un voisin, un ami ou un membre de la famille qui, sous des apparences tout à fait innocentes, exerçait ses funestes actions pour se venger d’un affront ou se délivrer d’une rancune.

Gare à la transmissi­on !

Lorsqu’un sorcier mourait, chacun savait qu’il voudrait transmettr­e ses pouvoirs avant de s’éteindre. La transmissi­on s’effectuait par le contact de sa main au moment où il rendait l’âme. La famille qui assistait à la mort d’un de ses membres suspectés d’être sorcier, l’entourait avec précaution. Au moment où sentant sa fin prochaine, l’agonisant tendait la main pour qu’on la lui prît sous prétexte de l’accompagne­r, chacun pensait qu’il s’agissait en réalité de transmettr­e ses pouvoirs. On prenait alors un manche à balai et lui tendait en guise de main afin d’éviter tout contact. Ainsi, le mourant partait tranquille, assuré d’avoir rempli sa mission. Dès qu’il avait rendu l’âme, on s’empressait de jeter le bâton dans la cheminée. Le feu était l’épreuve de vérité. Si le bois brûlait normalemen­t, on s’était trompé sur sa suspicion. Mais si le feu se mettait à crépiter de manière anormale et que des gerbes de petites étincelles jaillissai­ent du bâton maudit... on avait alors évité le pire !

 ?? (Photo © Almanach de la mémoire et des coutumes de Provence) (Carte postale ancienne) (Carte postale ancienne) ?? . En Provence, les masques, masca ou démasquaïr­é sont dépeintes comme de vieilles femmes solitaires et asociales qui vivaient souvent loin du village. . Les fermes provençale­s étaient souvent la cible des sorcières qui, pour des raisons diverses jetaient des sorts sur les habitants, animaux et souvent les cultures. . Les bergers qui n’étaient pas considérés comme des paysans et qui ne faisaient que traverser les villages, étaient souvent considérés comme des jeteurs de sorts.
(Photo © Almanach de la mémoire et des coutumes de Provence) (Carte postale ancienne) (Carte postale ancienne) . En Provence, les masques, masca ou démasquaïr­é sont dépeintes comme de vieilles femmes solitaires et asociales qui vivaient souvent loin du village. . Les fermes provençale­s étaient souvent la cible des sorcières qui, pour des raisons diverses jetaient des sorts sur les habitants, animaux et souvent les cultures. . Les bergers qui n’étaient pas considérés comme des paysans et qui ne faisaient que traverser les villages, étaient souvent considérés comme des jeteurs de sorts.
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