Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Un braqueur aux « yeux d’enfant » jugé à Toulon

Il avait collé le canon d’une arme chargée sur le front d’une commerçant­e à La Seyne. Axel Derrending­er, 21 ans, a été condamné à sept ans de prison

- ERIC MARMOTTANS

La marchande de journaux n’a pas obtempéré. « Je ne sais pas ce qui m’est passé par la tête. Il est arrivé cagoulé, c’était les yeux d’un enfant, pas ceux d’un homme… », témoignet-elle à la barre du tribunal correction­nel de Toulon. Le samedi 27 juillet 2019, vers 6 h 40, cette commerçant­e venait d’ouvrir son magasin à La Seyne-sur-Mer, quand Axel Derrending­er, alors âgé de 20 ans, lui a collé le canon d’une arme sur le front. « Tu veux tuer une femme enceinte ? »,a lancé la victime qui attendait son troisième enfant. Le jeune braqueur est parti sans butin, laissant derrière lui une femme traumatisé­e.

« Ma vie a basculé »

« Ma vie a basculé du jour au lendemain. Je ne fais plus d’ouverture, ni de fermeture (...) J’ai constammen­t peur, je me retrouve à noter des plaques d’immatricul­ation, à me mettre en boule par terre quand un colis tombe. Ce n’est pas normal de briser des gens comme ça .» Le prévenu aux yeux bleus et aux longs cheveux blonds reste impassible. La présidente Marie-Laure Arnouil lui montre une capture d’écran de la vidéosurve­illance. « C’est pas la peine de me la montrer, s’agace Axel Derrending­er, je sais pourquoi je me suis réveillé ce matin. » La magistrate insiste : « Là, quand vous lui mettez l’arme sur le front, vous pensez à quoi ? »–« Pas à grand-chose à ce momentlà .» Après le braquage avorté de La Seyne, le malfaiteur a fait irruption dans une boulangeri­e à Six-Fours. La vendeuse disposait les croissants dans la vitrine. « Donne-moi la caisse, j’ai rien à perdre ! », a lancé l’individu armé avant de grimper sur le comptoir. Absente au procès, cette seconde victime a expliqué aux enquêteurs avoir eu la peur de sa vie et avoir pensé à ses enfants. « Je l’ai senti capable de tirer, je l’ai vu dans ses yeux. » Ses cris ont alerté le boulanger dans l’arrière-boutique qui s’est précipité avec un couteau.

« Une dette de stups »

Le braqueur a plongé la main dans la caisse et s’est enfui avec une trentaine d’euros. Axel Derrending­er évoque « une dette de stups » de 800 euros, qui l’aurait incité à s’armer. « Ça se règle pas pareil qu’avec la justice, j’ai pas envie qu’ils débarquent chez ma grand-mère ou chez ma soeur… » Après les braquages, il est allé à la plage et a fait un peu de sport. « C’était pour me défouler. » Il a été interpellé dans la foulée, vers 9 heures, avec l’ami qui l’avait conduit sur les lieux de ses méfaits sans se poser de question. « Je suis sidéré par cette facilité de passage à l’acte », plaide Me Bertrand Pin, aux intérêts de la marchande de journaux. « On ne me fera pas croire que tout arrive par hasard », insiste-t-il alors que le prévenu a nié la préméditat­ion. Un expert psychiatre a diagnostiq­ué « une immaturité massive » chez le prévenu déjà condamné à huit reprises. « Par deux fois, il se retrouve face un refus et il abandonne, il a fui. Ce n’est pas quelqu’un qui tue ou qui tire. » En défense, Me Thibaut Brejoux fait le portrait d’un jeune homme « en perdition ». Une mère décédée, un père absent, SDF depuis l’âge de 14 ans. « Il s’est retrouvé dans le monde de la rue avec tous les mauvais choix que ça peut impliquer .» Le prévenu, à qui l’on a reproché une apparente absence de remords, prend la parole en dernier. « Je voulais quand même m’excuser, j’arrive pas à m’exprimer, c’est tout. » Le procureur avait demandé dix ans, le tribunal a condamné Axel Derrending­er à sept années de prison.

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(Photo Facebook) Le tribunal a mis un terme à « l’escalade de la délinquanc­e » du jeune prévenu.

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