Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Les catholique­s soudés dans la foi contre la haine

Après l’assassinat de trois fidèles dans une église à Nice, les pratiquant­s de l’Est-Var prient pour les victimes et regrettent de ne pouvoir assister aux offices religieux pendant le reconfinem­ent

- V. G.

Comment garder confiance en l’autre après un acte aussi barbare que l’assassinat de trois personnes dans la basilique Notre-Dame à Nice ? Ce n’est pas simple pour Brigitte, qui, en ce samedi soir, vient d’apprendre qu’un prêtre orthodoxe s’est fait tirer dessus, et lâche sa colère : « Les grands sermons, ça suffit, il faut réagir ». Pourtant, les catholique­s de l’Est-Var s’emploient majoritair­ement à ne pas céder au désir de vengeance. À commencer par les hommes d’Église. À Saint-Raphaël, Don Laurent Larroque encourage ses ouailles : « Nous avons faim et soif de justice (...). Faisons notre part. Qui va nous défendre ? La bonne nouvelle c’est que le père nous a donné le fils de Dieu et ça personne ne peut nous l’enlever. Aimez vos ennemis, dit Jésus jusqu’à ce qu’il revienne. (...) On ne va pas répondre à cette tentation d’être mauvais. En sortant de cette église, les problèmes seront toujours là. Jésus nous envoie, agneaux au milieu des loups, que ce soit le coronaviru­s ou quelqu’un qui a la tête emberlific­otée, mais nous sommes meilleurs. Si j’ai la foi, je suis plus fort que tout le mal du monde. Ne devenons pas injustes, ni méchants à notre tour. La brebis reste l’occasion d’une fraternité en ce monde. Nous demandons la paix et la fraternité sur terre ».

Peur ? Mais de qui ?

Alors que les policiers municipaux veillent sur les églises, Monseigneu­r Guy Casseron continue son ministère « dans la confiance ». Dans la cathédrale de Fréjus hier matin, il dit « avoir conscience du danger, mais on ne peut pas maîtriser quelqu’un qui a la haine dans son coeur. Depuis les événements à

Les catholique­s, comme ici dans la cathédrale de Fréjus, ne veulent pas céder à la peur, ni à la haine.

Nice, nous prions pour les victimes et pour la paroisse en deuil ». Il constate qu’il n’y a pas moins de monde à l’office : « Les gens viennent prier et aussi retrouver du courage ». Du côté des paroissien­s, Brigitte confirme : « Je suis très triste pour les victimes. Le Seigneur est amour, ces gens ne le savent pas. On est en danger mais on est en confiance ». Marie-Jo rappelle qu’elle « vient dans la maison de Dieu pour prier. Il ne faut pas faire du mal aux autres mais du bien ». À Saint-Raphaël, Toni assure : «Jeneme sens pas en insécurité ». « Peur, mais de qui ? Surtout pas de ces gens, les terroriste­s. Ils sont comme nous, ils mourront un jour », ajoute

Adriana, son épouse. « Je ne suis pas inquiet, confie à son tour Vicenzo, présent tous les dimanches à la basilique. C’est choquant cette attaque, surtout quand on rentre dans une église. Mais on n’a pas forcément peur. » Lisa, d’origine suédoise, se déplace pour les événements catholique­s, tels que Noël, Pâques, la Toussaint. « C’est un minimum, ditelle. On a prié pour les victimes de Nice. Quand on est perdu, c’est important d’aller à l’église se ressourcer, être protégé. Même si on ne prie pas tous les jours, on garde la foi dans la vie d’aujourd’hui. »

Père Alexis Angama

Hier, à la sortie de la messe de  heures à la cathédrale de Fréjus, le père Alexis Angama reconnaît sa déception de ne plus pouvoir célébrer d’office face aux fidèles : « Depuis le déconfinem­ent, on avait respecté à la lettre les préconisat­ions, les distances, le gel hydroalcoo­lique. On n’a jamais été un foyer d’infection. C’est dommage d’interdire la messe qui permet aux personnes de se ressourcer, de continuer le chemin, d’assurer la paix intérieure en ces temps si difficiles ». Il a évoqué l’attaque à Nice et « exhorté les fidèles à plus de foi, maintenant que c’est difficile, pour être rassuré en Jésus-Christ. Dieu ne nous demande pas de nous exposer mais de tenir la bannière de la foi. Je ne pense pas que ceux qui ont commis ça ont cette capacité d’humanité. Notre monde a besoin de plus et de mieux. Les gens sont choqués parce que notre humanité part en vrille. C’est mon point de vue et je l’assume ».

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