LES VAROIS TRÈS PARTAGÉS
70% d’entre eux ne veulent pas se faire vacciner
Un spécialiste fait le point sur le vrai, le faux et l’irrationnel
S «’il reste moins de 3 ou 4 % de la population sans vaccination, ce n’est pas grave, 10 à 15 %, cela devient dangereux. » Interrogé par notre rédaction (lire par ailleurs) sur la vaccination contre la Covid-19, le Dr Hervé Haas, pédiatre et infectiologue, conclut ainsi son propos. Grande devrait être sa déception en découvrant les résultats de l’enquête que nous avons menée auprès des internautes (plus de 1 000 votants). En pleine épidémie virale, alors que des départements voisins, à l’instar du Vaucluse ou des Hautes-Alpes, accusent déjà 200 % de taux d’occupation de leurs lits de réanimation, que le Var est dans une situation critique, que les hôpitaux azuréens commencent à voir affluer des patients graves de ces départements… les Azuréens et les Varois qui ont répondu à la consultation disent dans leur grande majorité : non. Ils disent non à 70 % au vaccin du laboratoire Pfizer, présenté pourtant hier dans la presse internationale comme la promesse de lendemains déconfinés.
Mais ce taux est-il vraiment surprenant alors que la France se distingue depuis des décennies par sa défiance vis-à-vis des vaccins ?
Des craintes justifiées
Les Français sont fâchés avec la vaccination. Pendant que les scientifiques s’épuisent à défendre ses bienfaits – en rappelant que certaines maladies (diphtérie, tétanos, poliomyélite…) ont été totalement ou presque éliminées grâce à une couverture vaccinale très élevée, que d’autres à l’opposé, comme la rougeole, perdurent parce que cette couverture est insuffisante – les discours « antivax » ont la vie dure et continuent de se transmettre au détriment des discours médicaux. Et la crise du Mediator, qui a mis au jour des collusions possibles entre les acteurs industriels et les autorités de santé, n’a fait que les renforcer. « L’industrie pharmaceutique est sans âme et ne recherche que le profit, même si elle doit nous faire avaler, ou nous injecter des produits dangereux. » C’est le leitmotiv des antivaccin qui puisent dans les écrits de certains professeurs de médecine – dont le sulfureux Pr Henri
Joyeux – des arguments pour défendre leur position. Le célèbre : « On nous cache tout, on nous dit rien ».
Alors, oui, cette défiance visà-vis du candidat-vaccin contre la Covid-19 n’est pas surprenante. Mais, elle est cette fois fondée sur des craintes justifiées. Il s’agit d’un tout nouveau type de vaccin, pour lequel on n’a aucun recul. Il a été produit dans des temps records, alors qu’il faut généralement des années pour mettre au point un vaccin efficace. On a assisté à une course effrénée entre les poids lourds de la « Big Pharma », motivés par la perspective d’un blockbuster – les Bourses mondiales se sont envolées après l’annonce de Pfizer. Dans ce contexte, la prudence s’impose effectivement. Concernant en particulier des effets indésirables plus rares qui ne pourront être mis en évidence que lorsque ce vaccin bénéficiera à des millions d’individus. Alors, plutôt qu’interpréter ce chiffre de 70 % comme la manifestation d’un rejet dogmatique, rappelonsnous qu’il y a quelques semaines les Français se sont précipités en masse dans les officines pour réclamer le vaccin contre la grippe.