La fleur coupée victime de la période de confinement
L’interdiction de vente de fleurs coupées dans les grandes surfaces est un terrible coup d’arrêt pour le grossiste hyérois Alma bouquets dont le chiffre d’affaires est en chute libre
C’est morne plaine dans les ateliers d’Alma Bouquets, route de l’Almanarre. La salle de réception, qui fourmille habituellement des départs/arrivées d’une cinquantaine de producteurs de fleurs, sonne désespérément vide. La chambre froide est en panne de stock. Sur des présentoirs, des hautes tiges attendent d’être données, une équipe de l’hôpital Saint-Salvaldour est attendue pour en bénéficier. Lors de la première semaine de novembre, 6 000 bouquets ont été offerts à la ville et à l’hôpital d’Hyères, ainsi qu’aux services de sécurité (police, gendarmerie, pompiers). « Mieux vaut donner que détruire, c’est certain ,noteDaniel Bussone, dépité .Onessaie de sauver les meubles, mais ce n’est pas facile. C’est le deuxième confinement qu’on subit. On commence à être un peu rodé, mais ça fait toujours mal. »
« Certains ne vont pas s’en remettre »
Comme au printemps, quand la production de pivoines et renoncules avait été stoppée en pleine période de floraison, la fleur coupée est une victime collatérale du confinement. « Des producteurs ne vont pas s’en remettre », déplore Daniel Bussone. Son entreprise de fleurs et plantes naturelles (en gros) a fait le choix de fournir la grande distribution. « Ona pris cette option stratégique il y a 15 ans. L’inconvénient, c’est que les enseignes tirent les prix, mais leur engagement à prendre nos fleurs nous enlève des soucis quand les contrats sont fixés. Nous livrons des plateformes et, depuis un an avec le groupe Casino, nous nous occupons aussi de la mise en rayon. On était en train de développer ce service avec d’autres enseignes quand l’interdiction de vente est tombée pour les grandes surfaces de plus de 40 000 m2 ».
Chômage technique
Aujourd’hui, l’hypermarché Carrefour de Monaco est le seul à être livré, puisque situé à l’étranger. De ce fait, le personnel de production d’Alma fleurs ne tourne qu’à 6 employés contre 45 habituellement. Le chômage partiel est déployé, le personnel administratif est en télétravail. « On en profite pour faire de l’entretien et repeindre les bureaux. J’ai une équipe exceptionnelle, un personnel irréprochable. » En temps normal, Alma bouquets fait entre 80 000€ et 100 000€ de chiffre d’affaires par semaine. Du 2 au 7 novembre, il est tombé à 4000 €, puis entre 7 000€ et 8000 € la semaine dernière. Et le plus dur est à venir : le mois de décembre représente 1 M€ de chiffre d’affaires, le double ou le triple de ce qui est produit en novembre. Mylène Heredia, la fille de Daniel Bussone, produit des strelitzias, agapanthes, jonquilles, arums et plusieurs variétés de feuillage sur 6 ha en pleine terre, une survivance de l’ancienne exploitation horticole familiale de 25 ha. « Cela fait deux semaines qu’on ne ramasse plus. Sans débouché, on est parti pour jeter l’équivalent de 80 000€ de marchandise », reprend Daniel Bussone. Pour Alma Bouquets, il avait dû emprunter 500 000€ àla Banque publique d’investissement au printemps. « C’est bien beau les aides, mais tout ce qu’on demande c’est de pouvoir travailler. La tâche ne nous fait pas peur, encore faut-il qu’on nous laisse le droit d’exercer. » Blessé mais pas abattu, il conclut : « On subit, on n’a pas le choix. Mais on continue de se battre. »