Face à la crise, les aquaculteurs à la pêche aux solutions
À La Seyne, producteurs de poissons et de coquillages font grise mine. Entre les restaurants fermés et des fêtes de fin d’année qui s’annoncent compliquées, ils tentent pourtant de rester positifs
En cette période où il est interdit de faire un pas sans mettre un masque, Olivier Otto apprécie son bonheur. « On a la chance de travailler sur l’eau, au grand air et dans un cadre magnifique. Bien à l’abri du virus. Les journées sont fantastiques. Ça nous rappelle qu’on fait un beau métier… »
Beau, certes, mais touché comme tant d’autres par les conséquences économiques de la crise sanitaire. Olivier est le gérant de la Ferme Cachalot, qui produit loups et daurades dans la baie du Lazaret. La fermeture des restaurants impacte directement son activité. Comme lui, la dizaine de pisciculteurs et de conchyliculteurs de Tamaris n’échappe pas aux dommages collatéraux du confinement.
« Ce serait indécent de pleurer… »
« Le plus dur, c’est pour les producteurs de coquillages, et notamment de moules, qui sont beaucoup destinées aux restaurants, explique Patrick Mendes, à la tête des Poissons de Tamaris, entreprise chargée de distribuer la production locale. Avec la période des fêtes tronquée qui s’annonce, certains s’attendent à souffrir. »
Olivier Otto confirme que le poisson, dont la belle saison est plutôt derrière lui, résiste tant bien que mal à la crise. « On a eu un très bon été. Et puis l’avantage, c’est qu’on peut aussi élever loups et daurades quelques mois supplémentaires sans que ce soit grave. C’est beaucoup plus compliqué pour les huîtres, qui ont tendance à grossir ».
Martial Hourdequin, gérant de la société Les Perles de Tamaris, parle même de « stade de survie » à l’heure d’évoquer son activité. « La fermeture des restaurants nous a fait perdre 50 % de notre chiffre d’affaires, annonce-t-il. Mais ce serait indécent de pleurer : on a la chance de pouvoir travailler, contrairement aux établissements de bouche. C’est un peu la galère mais il nous reste des solutions. »
Ces solutions sont celles qui leur avaient permis de tenir pendant le premier confinement : vente au détail et livraison à domicile. Mais aussi le soutien de la grande distribution qui, pour certains supermarchés de Saint-Tropez à Marseille (voir par ailleurs), montre un regain d’intérêt pour les saveurs de Tamaris.
« La bonne nouvelle de cette crise, assure Patrick Mendes, c’est qu’elle a clairement renforcé le lien entre les produits du terroir et le consommateur. » De plus en plus, celui-ci semble désireux de manger sain et bon, tout en confortant le tissu économique local en optant pour les circuits courts. Il faut bien ça, sans doute, pour affronter l’autre « virus » qui gagne les étals : « la concurrence terrible » des poissons à bas coût, « nourris à la farine animale, dans les fermes industrielles aux bassins surpeuplés de Grèce et de Turquie. »
Accélérer sur le projet du village des pêcheurs
C’est précisément le savoir-faire artisanal made in La Seyne qu’a voulu mettre en lumière Patrick Mendes dans une vidéo qui fait aujourd’hui le buzz sur les réseaux sociaux. On y découvre des professionnels amoureux de leur métier, au milieu de la carte postale du Lazaret qui accueille depuis un siècle des structures familiales sur pilotis. « On fait un peu figure de village gaulois dans cette économie mondialisée , décrypte-t-il. Mais après s’être essayé à l’export il y a quelques années, on a la conviction que notre force réside dans le fait de s’ancrer dans le local. »
Olivier Otto souhaite ainsi que la crise permette de faire avancer certains projets, comme ce « village des pêcheurs » imaginé aux Sablettes pour la vente directe et la dégustation. « C’est vraiment l’occasion d’accélérer sur ce dossier. On attend maintenant des investissements de la Métropole. Pour nous, pour les Seynois et les Toulonnais. Pour la rade ! »