Draguignan : plainte déposée contre l’Ehpad Tonus vitamine
Après la contamination puis la mort de pensionnaires, la maison de retraite est dans le viseur de familles. La fille d’une résidante décédée du coronavirus porte l’affaire en justice
Trois semaines après le décès de sa mère, Florence Aillet a décidé de porter plainte. Samedi dernier, dans un courrier adressé en recommandé au procureur de la République, la Dracénoise a engagé une action « contre l’Ehpad Tonus vitamine pour homicide involontaire ».
Florence Aillet est déterminée. Elle a mûrement réfléchi avant de franchir le pas. La Dracénoise refuse de laisser la mort de sa mère des suites de la Covid-19 impunie. Car, selon elle, l’établissement Tonus vitamine a une responsabilité. «Je les accuse ne pas avoir pris assez les mesures nécessaires pour éviter la mort de ma mère le 25 octobre dernier. C’est un manquement à une obligation de prudence et de sécurité. La direction et le personnel de l’Ehpad ont failli à leurs devoirs. »
Cette plainte marque un tournant dans son combat contre la maison de retraite. « En parallèle, je récolte les témoignages d’autres familles, poursuit Florence Aillet, également présidente de l’association Victoria qui vient en aide aux personnes vulnérables. Plusieurs d’entre elles ont rejoint l’association. Nous n’avons plus confiance en cette structure. »
« Au moins dix décès »
Pour rappel, le 16 octobre, 50 cas positifs étaient recensés à l’Ehpad : 37 pensionnaires, dont six symptomatiques, et 13 salariés, dont deux asymptomatiques. Florence Aillet témoignait alors dans nos colonnes (nos éditions des 17 et 21 octobre) après la contamination de sa mère, négative aux premiers tests.
Mais, selon elle, celle-ci n’a pas été « séparée des patients Covid dont les déplacements étaient très peu surveillés. J’en ai la preuve en image, affirme-t-elle avec colère. L’établissement relève au moins dix décès, selon les éléments que j’ai pu recueillir auprès de lui ». Pendant ce temps, plusieurs proches de pensionnaires se sont unis afin de dénoncer, selon eux, des manquements.
« Il faut sauver les personnes en Ehpad, martèle à son tour Chantal d’une voix tremblante. Son
(1),
époux est l’un des occupants de l’établissement dracénois. « Je suis persuadée qu’il n’y est pas en sécurité, notamment au regard du dispositif sanitaire mis en place. Il y a un manque de prise en charge du personnel soignant (2). Si je pouvais reprendre mon mari à la maison je le ferais, mais je ne peux pas, en raison de son handicap. »
Testé positif le 6 novembre, l’homme a été confiné dans sa chambre pendant dix jours.
« Je m’y attendais. J’étais si inquiète que j’avais déjà refusé de ramener son linge à la maison. Car déclaré positif, l’Ehpad donne toujours les draps et vêtements à laver aux familles… »
Des familles qui dénoncent, depuis plusieurs semaines, le manque de précaution de certaines personnes au sein de la structure. Selon elles, certains ne porteraient pas correctement le masque de protection. « Il y a une semaine encore, une femme discutait avec son masque sous le menton, témoigne Chantal. Le personnel soignant n’a fait aucun commentaire. Vous trouvez ça normal ? Pas moi. J’ai écrit au cadre santé car ce n’est pas une exception. »
« L’attente aurait pu lui être fatale !»
Aujourd’hui, son angoisse est telle, que la Dracénienne cherche à transférer son conjoint dans un autre Ehpad.
Des constatations faites aussi par une Dracénoise, Martine Vallet, par rapport à sa mère. « Je considère qu’ils l’ont mise en danger. On me soutenait qu’elle était négative, j’ai insisté pour qu’elle se fasse tester une nouvelle fois, poursuit-elle. Finalement, le 23 octobre elle était positive avec de la fièvre.
L’attente aurait pu lui être fatale ! Le virus s’est attaqué à un poumon, elle a dû se faire opérer en urgence. » Depuis, Martine Vallet a décidé de retirer sa mère de l’établissement. « Jeudi dernier je l’ai récupérée à mon domicile », lâche-telle, soulagée.
Cette dernière a adressé plusieurs courriers à la direction de l’Ehpad pour dénoncer ces faits mais « cela n’a rien changé ». Florence Aillet ajoute : « Ils se disent las de nos invectives ».
1. La personne n’a pas souhaité communiquer son nom de famille
2. Sollicitée également à ce sujet la cogérante n’a pas donné suite à nos appels.