Armes et pédopornographie : un inquiétant collectionneur à Nice
Ses achats de pièces d’armement sur Internet l’ont trahi. Des douaniers ont vite compris que Fabien, 32 ans, cherchait à remettre en service une arme démilitarisée. C’est avec des policiers d’élite qu’ils ont débarqué dans le modeste appartement du suspect, avenue Henry-Dunant à Nice, où, dans son armoire, il possédait un véritable arsenal. Outre sa passion irrépressible pour les armes de poing et les fusils à canon scié, l’individu collectionnait les fichiers pédopornographiques. Il a déjà été condamné en 2016 pour cette déviance à du sursis et une mise à l’épreuve. Le suivi psychologique et psychiatrique auquel il était soumis n’a visiblement pas porté ses fruits.
« Pourquoi autant d’armes et surtout de munitions ? », questionne Marion Menot, la présidente du tribunal correctionnel de Nice.
Réformé et brisé
Cheveux noirs gominés, teint pâle, Fabien hésite, mal à l’aise : « À la base, les armes c’est une passion. Je souffre d’une phobie sociale. Ça me donne un sentiment de sécurité. C’est comme une béquille psychologique. »
Malgré ses revenus modestes de technicien en maintenance, il admet en avoir acheté de manière compulsive : « Même un gilet pareballes ». Une frénésie que l’on retrouve dans son addiction à la pornographie, excité par des jeunes filles de plus en plus jeunes. A-t-on dans le box un tueur de masse en puissance, un prédateur sexuel ? Pas si simple au regard des expertises psychologiques et psychiatriques qui relativisent la dangerosité de cet ancien militaire, engagé pendant quatre ans dans l’infanterie, sanctionné pour avoir détourné des munitions puis réformé.
À son retour dans la vie civile, il a sombré dans l’alcool et la drogue pour tenter de fuir son mal-être. Le constat est sans appel : Fabien a peur des femmes. « Ma mère était folle et violente. Je n’ai pas eu une enfance super… », précise-t-il. Un euphémisme au regard des violences commises par une marâtre internée à plusieurs reprises.
Une sanction en forme de pari
Il décrit son addiction à la pédopornographie « comme un cancer qui se développe ».
Il affirme que dix-huit mois de détention provisoire l’ont « désintoxiqué ».
Fabien apparaît surtout comme un anxiodépressif à l’extrême fragilité psychique dont la fascination morbide pour les armes nécessite un sérieux suivi sociojudiciaire. C’est le sens des réquisitions du procureur Léopold Mendes qui requiert dix ans de suivi et trois ans d’emprisonnement. Les douanes réclament pour leur part 60 000 d’amende. En défense, Me Julien Darras ne peut que saluer l’instruction de ce dossier par une présidente très à l’écoute. Il l’avoue humblement : « Dans le premier dossier, on croyait en Fabien. On s’est battu pour qu’il reste en liberté. On s’est loupé. »
L’avocat en est persuadé : dans le cas de son client, la détention provisoire a été salutaire. Il peut également s’appuyer sur un psychiatre. Fabien n’aurait pas le profil du pervers dangereux capable de passer à l’acte. Cet homme intelligent, très bon technicien, a les moyens de se réinsérer.
« Ça ne dépend que de lui », plaide Me Darras qui a convaincu le tribunal que la prison dans un premier temps salvatrice, pouvait devenir destructrice.
La sanction est mesurée : trois ans de prison, 5000 d’amende, une inscription au fichier des délinquants sexuels, un suivi judiciaire de dix ans. La justice ose un pari sur l’avenir de Fabien, enfant brisé devenu adulte inadapté, homme à la personnalité énigmatique et inquiétante.