Projet de loi « sécurité globale » : 133 000 personnes dans les rues
Des rassemblements ont eu lieu, hier, dans plus de soixante-dix villes. A Paris, les forces de l’ordre ont usé de lacrymogènes et quelques dégradations ont été commises en marge de la manifestation
Selon, le ministère de l’Intérieur, les manifestations contre le projet de loi « Sécurité globale » ont rassemblé, hier, 133 000 personnes dans toute la France, et 500 000 selon les organisateurs.
Dans la capitale, il y avait 46 000 personnes, selon le ministère de l’Intérieur, soit beaucoup plus que la semaine passée où 7 000 manifestants avaient été dénombrés. « Floutage de gueule », « Qui nous protégera des féroces de l’ordre ? », « Baissez vos armes on baissera nos caméras » : les manifestants ont sorti les pancartes et fait fleurir les slogans contre un texte jugé attentatoire à « la liberté d’expression » età « l’Etat de droit » par ses opposants.
Quarante-six interpellations à Paris
Contrastant avec un défilé globalement calme dans l’après-midi, des affrontements ont opposé manifestants et forces de l’ordre, qui ont utilisé en fin de journée les canons à eau, au point d’arrivée du cortège, place de la Bastille. Quarante-six personnes avaient été interpellées vers 19 h 45. Des groupes de manifestants ont formé des barricades et allumé plusieurs feux qui dégageaient de grands panaches de fumée et une odeur acre. Les feux qui ont touché un kiosque, une brasserie et une façade de la Banque de France ont été maîtrisés vers 18 heures tandis qu’une partie de la place était noyée sous les lacrymogènes.
Le long du parcours, du mobilier urbain a été détruit et plusieurs voitures incendiées, nécessitant l’intervention des pompiers tandis que le reste du cortège poursuivait son défilé. Vingt-trois policiers ont été blessés à Paris selon le ministère de l’Intérieur, Plusieurs vidéos ont circulé sur les réseaux sociaux montrant des policiers violemment frappés.
Près de policiers et gendarmes blessés
Gérald Darmanin a condamné, hier, « une nouvelle fois les violences inacceptables contre les forces de l’ordre », qui ont émaillé les manifestations à Paris et partout sur le territoire.
Dans un tweet, le ministre de l’Intérieur a fait état de « 37 policiers et gendarmes blessés » au cours de ces manifestations. Plusieurs milliers de personnes se sont également rassemblées à Marseille, Rennes, Nice, Toulon à Lille ou encore à Montpellier. A Lyon des manifestants et un policier ont été blessés par des jets de projectiles lors de débordements. A Strasbourg, 1 500 manifestants selon la préfecture et près de 3 000 ont défilé aux cris de « tout le monde peut filmer la police ». Depuis, la controverse autour de ce texte, vivement dénoncé par les journalistes et les défenseurs des libertés publiques, s’est encore renforcée. L’évacuation brutale d’un camp de migrants à Paris lundi soir et la révélation jeudi du passage à tabac d’un producteur de musique noir par quatre policiers, dont la garde à vue a été prolongée hier, ont suscité l’indignation et électrisé le débat.
Des scènes filmées et visionnées des millions de fois sur les réseaux sociaux.
Dans ce contexte tendu, Emmanuel Macron est descendu vendredi dans l’arène pour dénoncer l’« agression inacceptable » du producteur Michel Zecler et des « images qui nous font honte ».
Cacophonie de l’Etat
Il a demandé de nouveau au gouvernement de lui faire rapidement des propositions « pour lutter plus efficacement contre toutes les discriminations ».
Malgré son adoption en première lecture par l’Assemblée nationale, la polémique était telle que Matignon s’est résolu à annoncer une nouvelle réécriture du texte par une « commission » indépendante. Avant de rétropédaler face à l’ire des parlementaires et de la majorité, à qui Jean Castex a dû assurer qu’ils auraient le dernier mot.
Le préfet Lallement sermonne les policiers
Dans une lettre adressée vendredi soir aux policiers, le préfet de police de Paris, Didier Lallement a appelé ses troupes à « tenir » la « ligne républicaine ».
En « dévier », c’est « perdre le sens de notre mission », a-t-il ajouté.
La gauche unie réclame le retrait du texte
La gauche a mis, hier, de côté ses divergences pour réclamer à l’unisson dans la rue le retrait de la proposition de loi « sécurité globale » et condamner de récentes interventions policières violentes révélées par des vidéos.
« Aujourd’hui, s’il y a de l’honneur, il doit se trouver dans le retrait du texte et pas dans son maintien », quand notamment « le risque c’est de créer de l’incompréhension et des violences », a affirmé l’ancien président socialiste François Hollande au journal La Montagne.