Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Ils donnent le goût du miel à leurs savons

Apiculteur­s à Entrecaste­aux, Pierre et Aurélie utilisent leur miel de romarin pour fabriquer des savonnette­s.

- KARINE MICHEL kmichel@nicematin.fr

Un léger voile de brume persiste sur la campagne. Pourtant, le soleil est déjà haut dans le ciel en cette matinée d’automne. Les températur­es sont à la baisse. Maïka, le chat Maine Coon, race d’ordinaire plus prompte à cocooner à l’intérieur, savoure tout de même le grand air au milieu des oliviers, entre les restanques. « Elle adore être dehors, sourit Pierre Fauchas, et en plus, elle chasse souvent, et nous ramène un tas de présents… »

Il sourit en embrassant le terroir du regard. Pierre Fauchas a racheté ses terres familiales après le décès de son grand-père, il y a quelques années.

« À l’époque, nous n’étions pas encore apiculteur­s. » La reconversi­on remonte à deux ans seulement. Pierre, l’enfant de Marseille et Aurélie la fille du Luc, se rencontren­t il y a un peu plus de 10 ans, dans un domaine viticole : il y occupe le poste de responsabl­e des infrastruc­tures, elle y est sommelière. Au fil des ans, le couple s’interroge. « On voulait donner un sens à notre vie, dans le respect de la nature. On voulait faire quelque chose de bon, essayer d’apporter notre pierre à l’édifice pour préserver l’environnem­ent. »

Aurélie passe le cap la première, en quittant son emploi quelques mois avant de tomber enceinte. Pierre la suit peu après.

Là, au milieu des oliviers dont ils

(1)

tirent leur huile – « même si cela reste une production confidenti­elle »

souligne Pierre –, ils se lancent dans l’apiculture. « On n’avait pas forcément la passion des abeilles au départ, confesse-t-il. Mais au fur et à mesure, j’ai découvert un univers passionnan­t. »

Et essentiel à l’écosystème. La première année, les quatre-vingts ruches sont installées sur une restanque, en contrebas de la maison familiale. « Mais notre fils aîné

(2) s’en approchait un peu trop dangereuse­ment ».

Du coup, Pierre et Aurélie ont décidé de les placer en hivernage sur une propriété voisine à un kilomètre d’ici, ainsi qu’à Flayosc. « Les abeilles sont en dormance, leur priorité est de rester au chaud et d’avoir suffisamme­nt de nourriture. C’est la priorité de l’apiculteur l’hiver, veiller à ce que les ruches aient suffisamme­nt à manger pour passer les frimas de la saison », explique Pierre.

Plus de deux tonnes de miel récolté

Avec 150 ruches aujourd’hui, les apiculteur­s récoltent 2,5 tonnes de miel. Ils proposent différents parfums selon la saison et donc les miellées : romarin, thym et garrigue au début du printemps. Acacia et tilleul en avril - mai, le châtaignie­r à partir de mi-juin, et ensuite la lavande [le couple transhume ses ruches sur le plateau de Valensole, Ndlr], le miel phare de la région. Le miel multifleur­s de Pierre et Aurélie a obtenu la médaille d’argent au concours général agricole en 2019. Le couple est engagé dans une démarche individuel­le « à tendance zéro déchet ». « J’avais du mal à trouver du 100 % naturel en matière de savon », relève la jeune femme, qui précise avoir eu envie depuis longtemps de valoriser le produit différemme­nt. « Je m’étais lancée dans les savons lorsque j’allaitais les enfants. J’ai fait des recherches pour savoir quoi faire du lait maternel que je produisais en grande quantité, et j’ai constaté que beaucoup de mamans en faisaient des savons en le mélangeant à du savon d’Alep et du miel… Du coup, j’ai fabriqué

‘‘ On voulait donner un sens à notre vie”

‘‘ Je m’étais lancée dans les savons quand j’allaitais...”

plein de savons pour les enfants. » La suite s’écrit avec cette recette à base de trois ingrédient­s seulement : huile d’olive, soude et miel de romarin.

Faute de trouver une savonnerie locale pour la production, Pierre a fait appel à une de ses amies, à Ronce-les-Bains sur la côte atlantique, en Charente-Maritime. Elle livre un produit fini, selon une méthode de saponifica­tion à froid, sur lequel les récoltants ont juste à apposer leur étiquette. «On sait bien qu’en termes de bilan carbone, on n’y est pas du tout », reconnaît Pierre, sensible, comme Aurélie, à cette évidence. « Mais ici j’ai contacté toutes les savonnerie­s locales, poursuit la jeune femme. Certaines fabriquent leur seule production, d’autres veulent ajouter différents ingrédient­s que je ne juge pas bons pour la peau… »

Le couple ne désespère pas de trouver l’interlocut­eur qui pourra donner une suite favorable à sa demande.

1. Le couple dispose également de quelques oliviers en fermage. Il mène sa production au moulin d’Entrecaste­aux, dont ils sont coopérateu­rs.

2. César a 3 ans et demi, Zola 18 mois. Le couple vit avec les deux grands de Pierre : Jenna 17 ans et Geoffrey, 14 ans.

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