Asurance-chômage : Borne reprend la concertation
La ministre du Travail Elisabeth Borne va recevoir, aujourd’hui, un à un dirigeants syndicaux et patronaux pour tenter de trouver «un chemin » sur la réforme de l’assurancechômage, toujours « prioritaire » àses yeux mais dont l’application pourrait être conditionnée à l’amélioration de la situation économique. Décidée en juillet 2019, après l’échec d’une négociation sociale très encadrée par l’exécutif, la réforme visait à réaliser 1 à 1,3 milliard d’économies par an, notamment en durcissant les règles d’indemnisation et en taxant le recours abusif aux contrats courts, le tout dans un marché de l’emploi alors dynamique.
Mais la brutalité de la crise a contraint le gouvernement à reporter à plusieurs reprises son application, la dernière fois de janvier à avril.
« Une réforme absolument nécessaire »
Pour tenir compte du nouveau contexte, Elisabeth Borne a ouvert une concertation à l’automne, se disant prête à discuter des « paramètres » de la réforme sans en abandonner l’esprit. A ses yeux, elle reste « absolument nécessaire », contre l’avis des syndicats qui réclament plus que jamais son abandon.
Alors que la crise sanitaire se prolonge et que le chômage devrait continuer à augmenter en 2021, cette réforme «pas pertinente et porteuse d’injustice sociale ne doit pas entrer en vigueur », plaide Marylise Léon, la négociatrice CFDT.
Elisabeth Borne.
« Comme Emmanuel Macron ne pourra pas achever la réforme des retraites avant la présidentielle, il veut terminer celle de l’assurance-chômage qui fera moins de remous », analyse Michel Beaugas (FO).
Pour rapprocher les points de vue, la ministre devrait proposer de lier l’entrée en vigueur des nouvelles règles à l’amélioration d’indicateurs économiques, comme par exemple les créations d’emploi.
« C’est une hypothèse qu’on va tester, on n’est fermé sur rien, ça sera une journée d’écoutes », assure-t-on au ministère avant une nouvelle réunion multilatérale courant février où le gouvernement devrait présenter ses arbitrages. « Politiquement, ça permettra de dire “je fais la réforme” même si elle ne s’applique pas. On est dans le marketing », critique Jean-Francois Foucard (CFECGC).
Côté patronal, cette idée est plutôt bien accueillie. Pour François Asselin (CPME), « la réforme devrait être actionnée en fonction de l’évolution et de la dynamique des offres d’emploi ». Mais une telle proposition ne suffira pas à embarquer les partenaires sociaux qui ont jugé insuffisants les amendements proposés jusqu’ici. L’exécutif a ainsi proposé de revenir sur le passage de 4 à 6 mois de travail pour ouvrir des droits, mais uniquement pour les jeunes de moins de 26 ans.
Le calcul de l’allocation au centre des crispations
Le point le plus contesté reste les nouvelles modalités de calcul de l’allocation, le coeur de la réforme de l’ex-ministre Muriel Pénicaud, qui risque de pénaliser fortement, selon l’Unédic, les « permittents », ceux souvent précaires qui alternent chômage et contrats courts.
L’exécutif défend un enjeu « d’équité » car le système actuel est plus favorable, pour le même nombre d’heures de travail, à celui qui a des contrats fractionnés qu’à celui qui travaille en continu. Il juge aussi que cela n’est pas incitatif à la reprise d’un emploi durable. A la grande satisfaction des syndicats, ce point a été annulé fin novembre par le Conseil d’Etat car il créait «une différence de traitement manifestement disproportionnée » entre allocataires. Pour y remédier, le gouvernement travaille sur un plancher garantissant une rémunération minimale aux demandeurs d’emploi.