Infirmiers à domicile : loin des yeux, loin des soins
Colette, 80 ans, a été hospitalisée pour un accident vasculaire cérébral fin octobre. Depuis, elle a regagné son domicile à 10 km du centre-ville. Visiblement trop excentré pour lui assurer des soins
En habitant au domaine du pin de la Lègue à Fréjus, sur la route de Bagnols-en-Forêt à 10 km du centre-ville, Colette, 80 ans, ne pensait pas « loger au fin fond de la campagne », dans ce qui pourrait s’apparenter à un ‘‘désert médical’’.
Pourtant, elle se trouve dans l’attente, depuis trois semaines et sa sortie du centre de convalescence Les Héliades à Fréjus, qu’un infirmier accepte de venir à son domicile lui dispenser des soins. Colette avait intégré cet établissement à la suite d’un séjour au CHI Bonnet, après un accident vasculaire cérébral fin octobre. Sa première sortie de l’hôpital, prévue en décembre dernier, a été décalée en raison de cas de Covid dans son entourage familial. Claude, son mari de 82 ans, a été hospitalisé en urgence les deux premières semaines de l’année à l’hôpital intercommunal pour ce même virus.
La sortie de Colette était donc prévue le 15 janvier avec, dans les mains, une ordonnance du médecin pour bénéficier de soins à domicile, trois fois par jour. L’assistante sociale du centre de convalescence avait aiguillé la famille vers le Services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), un organisme assurant la mise en relation entre patients et infirmiers.
Possible en décembre… mais plus en janvier
Comme l’a précisé l’établissement de santé fréjusien, « à partir du moment où le médecin estime que la personne peut quitter l’unité, nous accompagnons la famille dans les démarches ».
Ce qui a été fait. Pour la sortie initiale de Colette, un personnel médical avait été trouvé. Mais il n’était plus disponible en janvier. La famille s’en est émue auprès du SSIAD, mandaté pour trouver une infirmière. «On nous a répondu que notre tour était passé, qu’il n’y avait pas de liste d’attente et qu’il fallait se rapprocher des infirmiers libéraux, résume Christine Pernet, une des filles du couple. Contacté la semaine dernière, l’organisme indiquait « ne pas souhaiter faire de commentaires sur ce sujet et son organisation », mais appelait la famille à se rapprocher d’eux. Chose faite à plusieurs reprises, depuis le début du mois de janvier, avec toujours la même réponse : « Nous ne sommes plus prioritaires vu que ma maman a quitté un établissement de santé. »
« Ça devient compliqué avec la Covid »
La famille se met donc en quête d’un infirmier libéral. « Nous avons passé une semaine à faire tout l’annuaire et Google, indique la fille, domiciliée à Nice et de passage chaque semaine dans l’Est-Var pour rendre visite à ses parents. Quand on nous rappelait, ce qui était rare, on comprenait clairement que ce n’était pas rentable pour eux de venir trois fois dans une zone assez éloignée ».
Ce que réfute en partie l’association des infirmiers libéraux de l’Est-Var (voir encadré).
Un autre interlocuteur glisse, sans vouloir être cité nominativement, « que c’est bien le problème de vivre éloigné quand on commence à avoir des soucis de santé ». Surtout quand le secteur est « sous tension, encore plus avec la crise du Covid », souligne Catherine Certari, responsable manager de la Plateforme territoriale d’appui VarEsterel, chargée notamment de la mise en relation entre professionnels pour assurer une continuité des soins.
« Nous avons beaucoup plus de demandes en raison de soins en sortie d’hospitalisation de patients qui ont eu la Covid. » Elle est toutefois disposée à prendre les renseignements nécessaires pour guider la famille. Dès le 15 janvier, les deux filles du couple ont posé chacune des jours de congé pour s’occuper de leurs parents et se démener pour trouver un infirmier. Elles ont dû reprendre le travail depuis. Sans que, pour l’instant, leur maman puisse bénéficier des soins auxquels elle a le droit. Et surtout besoin.