Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Josiane et Gérard Abrial deux artistes, deux styles

Installés depuis les années 1970 à Saint-Tropez, mari et femme partagent la passion de la peinture, et la déclinent au gré des inspiratio­ns, sur différents supports.

- K. MICHEL kmichel@nicematin.fr Avenue Paul Roussel, parking des Lices, à Saint-Tropez.

Dans l’atelier galerie de l’avenue Paul Roussel, à SaintTrope­z, leurs toiles se répondent : deux artistes, deux univers, qui cohabitent et se complètent. Gérard Abrial, élève de Claude Viallat, peintre de la faune comme du geste, des éléments aussi. Pampelonne par temps de grand vent, sous la vague… De la peinture abstraite encore, « un peu comme Soulages », décrit son épouse, admirative. Josiane Abrial, née Bouchard. Fille d’architecte, et architecte d’intérieur de formation. Elle a toujours su adapter un décor à un lieu de vie.

Leurs quarante ans d’expérience leur ont permis de mettre la technique au service de l’art. Lui, peintre aux diverses influences, amoureux des pigments naturels, des ocres et du blanc. Elle, portée sur les aquarelles, les acryliques. C’est sans doute ce qui fait la force de leur galerie - atelier. « Lui, c’est la nature bruyante. Moi, la nature délicieuse et silencieus­e », résume

Josiane Abrial. Le concept leur va bien.

Depuis Paul Signac, la lumière de Saint-Tropez a toujours attiré les artistes peintres. Logique alors que le couple décide de s’y installer. « C’est surtout moi qui y tenais… », dit-elle. Il acquiesce en silence.

Le couple s’est rencontré en 1967, aux Arts Déco de Nice. «Ma femme y était entrée avant moi », se rappelle Gérard, d’abord passé par des études de philo malgré ses prédisposi­tions artistique­s : « À quinze ans, je faisais beaucoup de maquettes, de mise en scène. Quand j’étais enfant, on avait une tante qui avait une loge à l’opéra de Toulon. On avait vu La Damnation de Faust et en rentrant, j’avais reconstitu­é le décor. » Il reproduit L’homme au chapeau de paille , de Matisse. Plus tard, c’est finalement aux Arts Déco qu’il se révèle. Le hasard vient bousculer leur ligne de vie. Leurs signatures se distinguen­t avant même que le couple ne tombe amoureux. « C’est vrai qu’on avait entendu parler l’un de l’autre », confie Josiane en remontant le fil de leur histoire. «Les étudiants de l’UNEF avait monté une exposition destinée à recueillir des fonds pour aller voir la rétrospect­ive Picasso à Paris. J’ai découvert son nom comme ça, et inversemen­t… » Josiane et Gérard se rencontren­t physiqueme­nt sur les marches du Grand Palais. Et ne se quitteront plus.

La jeune femme rejoint les Arts Déco à Paris, il la suit.

Des couvre-lits peints à la main

Il plonge dans les toiles, elle se passionne pour les arts décoratifs. Lorsqu’elle se lance, dans les années soixante-dix à Saint-Tropez, elle crée des couvre-lits, des rideaux, des coussins peints à la main. Sur de la soie d’abord, du lin ensuite. Elle dessine de la vie précieuse et délicate. « J’avais une boutique rue de La Ponche, où je vendais mes fabricatio­ns. Couvrelits et vêtements surpiqués aussi. » Des pièces qui partent partout dans le monde. Elle refuse des

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Lui c’est la nature bruyante, moi, la nature délicieuse et silencieus­e...”

propositio­ns qui lui auraient permis de voir plus grand, plus loin. Délocalise­r la production ? C’est le savoir-faire français qui se serait perdu selon elle…

Son travail confidenti­el s’exporte tout de même. « Elle était très connue partout dans le monde », relève son mari. Il sourit : « Pendant dix ans, j’ai été le mari de Josiane Abrial ». « Grâce à Saint-Tropez, j’ai vendu mes soies chez Bloomingda­le’s à New York, poursuit son épouse. Au Bongénie à Genève, chez Jansen à Paris, etc. Parce qu’à l’époque, les gens venaient tous ici… » Pas besoin de site Internet ou de vente en ligne. En parallèle, leur talent respectif leur ouvre les portes de la décoration. Sur des murs, des parquets, mari et femme donnent vie à leur univers. Techniques et matériaux se font écho. Lorsqu’en 1996, sa boutique est victime d’un cambriolag­e, Josiane s’oublie artistique­ment pour se consacrer à l’oeuvre de son mari… Un choix qui durera plusieurs années même si, au fil des ans, la peinture sur toile a repris ses droits, jusqu’à occuper un pan de mur de la galerie - atelier. Aujourd’hui, elle renoue avec la créativité et relance le volet décoration. « Une cliente m’a demandé de peindre un rosier dans sa chambre… » Josiane se (re) lance. «Ça lui a tellement plu que dans l’autre chambre, j’ai fait une glycine » ,qui donne l’impression d’entrer par le jardin. « De l’occasionne­l cependant », précise la créatrice, qui toujours en mouvement, cherche à développer une gamme de produits d’ameublemen­t avec des tissus de sa compositio­n. Et laisse parler sa palette sur de nouvelles toiles. Y met de l’humain, comme pour saluer cette « génération Covid » qui force à réfléchir… Les gênes, ils les ont transmis à leurs deux enfants. Deux grands garçons. « Romain est très bricoleur, c’est un graphiste aussi », ajoute Josiane. Yoann lui, a choisi la joaillerie. Artistes tous deux.

Galerie Abrial.

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