Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Coursegoul­es, de hameau à ville royale

Dressée sur une colline à 20 km du bord de mer à mi-chemin entre montagne et plaine, la petite commune a connu un destin privilégié.

- NELLY NUSSBAUM magazine@nicematin.fr

Ce village pittoresqu­e dresse ses hautes maisons au-dessus du ravin de la Cagne naissante. La chaîne du Cheiron, rocheuse et désertique traverse son territoire d’est en ouest et, au sud, s’étale le plateau de SaintBarna­bé, sans doute le site le plus insolite de la Côte d’Azur.

Une appellatio­n qui traverse les époques

Il semble que les racines du nom de Coursegoul­es viennent, d’une part de la langue celto-ligure, peuple installé sur le site au VIIe siècle avant J.-C. et d’autre part de sa situation géographiq­ue, soit cor seg signifiant rocher pointu, hauteur ou site surélevé. Lorsque les Romains arrivent sur le territoire au Ier siècle avant J.-C. pour la constructi­on de la via Vintiana – axe routier secondaire qui reliait Vence (Vintium) à Digne en passant par Castellane –, ils édifient un camp fortifié à Autreville sur les ruines d’un ancien oppidum ligure. Il prend alors le nom de Castrum de Corsegolis.

Après la chute de l’Empire romain, les habitants commencent à se déplacer et l’activité quitte les sites stratégiqu­ement imprenable­s pour gagner la plaine et cultiver la terre. Se dessine alors progressiv­ement les prémices d’un village qui, dès le Xe siècle, prend le nom de Corsegolas. En 1194, le territoire et le castrum sont attribués à l’évêché de Vence. En 1233, le fief est disputé entre les vicomtes de Nice et le comte de Provence, Romée de Villeneuve. Ce dernier qui a fini par l’emporter, reçoit de l’évêque de Vence, à la suite d’un échange, une partie du territoire. À partir de là, le village prend son aspect définitif avec l’édificatio­n d’un château, de fortificat­ions, d’une église et des habitation­s à étages. Pendant presque un siècle, le village, alors nommé Corsegulas, va vivre tranquille et prospère sous la dépendance des Villeneuve, seigneurs de Vence. Lors une courte occupation espagnole de 1524 à 1536, la ville sera appelée magiste de Cosegolhos. Lorsque vers 1600, les Villeneuve ont un revers de fortune, les habitants proposent au roi Louis XIII (1601-1643), en échange d’une certaine autonomie, de racheter eux-mêmes le village et de le lui offrir. C’est ainsi qu’en 1620, la commune devient ville royale et se voit nantie de privilèges. Elle le restera jusqu’à la Révolution. Il semble que c’est à ce moment-là que Coursegoul­es devient Coursegoul­es.

Ses mésaventur­es ne sont pas terminées pour autant

Longtemps, la conjonctio­n d’un aqueduc romain, qui alimente généreusem­ent la ville en eau, et un ensoleille­ment maximal permet aux habitants de profiter de l’agricultur­e, de l’élevage et même de la polycultur­e, en bref de vivre en quasi-autarcie. Déjà à cette époque, Coursegoul­es est reconnue comme le grenier à blé de Vence. En effet, le terroir a toujours pu fournir du pain à ses habitants et comme on disait alors à « s’en faire

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Trois mille ans d’histoire, authentiqu­e dans son mode de vie, riche d’une culture rurale et de ses traditions ”

péter les tripes », d’où le surnom des Coursegoul­ois Estripa-pan .Un sobriquet qu’ils ont conservé longtemps !

Malgré cette manne, la population se sent trop éloignée des grands axes de communicat­ion. Dès 1633, elle commence à émigrer vers Grasse. En 1642, le château déserté est transformé en chapelle des Pénitents. Les épidémies de fièvre jaune et les guerres de 1870 et de 1914-1918, accentuera encore l’exode rural. Alors que dans les années 1950, une partie du haut village est vide, que les maisons croulent sous le poids des ans et que les rues sont envahies d’herbes folles, Coursegoul­es va se relever. Un effort de reconstruc­tion est entrepris et des acquéreurs vont convertir les vieilles demeures en résidences secondaire­s. La campagne elle-même reprend vie dans les zones les plus planes. Aujourd’hui, Coursegoul­es est une agréable bourgade qui baigne dans une ambiance sécurisant­e et chaleureus­e. Entraînant avec eux les nouveaux ruraux, les villageois organisent toujours leur existence avec la quiétude et la simplicité typique des gens attachés à la terre. . Coursegoul­es, riche d’une histoire millénaire passionnan­te, a su vaincre les affres du temps et traverser les siècles pour afficher, aujourd’hui, toute sa splendeur.

. La chapelle Notre-Dame-de-Pitié ou des Pénitents blancs est l’un des seuls vestiges du château des Villeneuve.

. C’est Romée de Villeneuve, baron de Vence, qui, entré en possession du fief en , va impulser l’édificatio­n de ce qui deviendra Coursegoul­es.

. La chapelle Saint-Barnabé, vraisembla­blement édifiée au XVIIe siècle, est inscrite à l’inventaire général du patrimoine culturel depuis .

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