Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Anelka, une après-carrière mouvementé­e

Nicolas Anelka, le nouveau directeur sportif du HFC, a depuis longtemps l’ambition d’une carrière de manager. Entre 2012 et 2018, ses tentatives à l’étranger sont restées infructueu­ses

- PIERRE-MICKAËL AYI Anelka, les dessous de l’affaire,

L’arrivée d’Anelka, c’était la première décision de Mourad Boudjellal devenu mardi dernier actionnair­e majoritair­e du Hyères football club.

L’ancien boss du RCT nous a révélé ce qui a motivé ce surprenant choix de directeur sportif. « Anelka, il m’a épaté dans son documentai­re (Anelka, l’incompris) sur Netflix. J’ai été très surpris par la façon dont il s’exprimait, par sa réflexion sur le football qui était vraiment intelligen­te. J’avais entendu qu’il avait envie de transmettr­e. Je ne l’imaginais pas du tout entraîneur. » En effet, l’enfant de Trappes n’est pas facile à suivre. Dans sa carrière, l’ancien internatio­nal, qui a connu treize clubs, a de quoi rivaliser avec les collection­neurs de tuniques. Et depuis qu’il a raccroché les crampons, il a aussi pas mal bourlingué en coulisses. Récit du destin hors norme d’un homme qui, au départ, n’avait rien demandé.

Premier banc en Chine

Fin 2011, tandis que le brouillard s’abat sur Londres, Anelka – mis à l’écart par un certain André VillasBoas – cire le banc à Chelsea, qui a comme d’habitude oublié les services rendus.

Lorsqu’il est contacté par le club émergent de Shanghai Shenhua, modeste 11e d’un championna­t chinois encore anonyme, l’attaquant n’hésite pas longtemps : un contrat de deux ans, pour un salaire annuel d’environ 12 millions d’euros, est à la clé.

Tandis qu’il retrouve une vieille connaissan­ce, Jean Tigana, fraîchemen­t nommé au poste d’entraîneur, l’Asie, elle, découvre le phénomène. À presque 33 ans, l’animal a quelques beaux restes. À sa première apparition, le nouveau capitaine marque après seulement 40 secondes de jeu, lors d’un match de préparatio­n.

Au bout de quelques semaines, après une série de mauvais résultats (1), Anelka est nommé, à la surprise générale, entraîneur adjointjou­eur de Shanghai. « Être entraîneur et être joueur sont deux choses différente­s, mais j’aurai, sur le terrain, un meilleur contact avec mes partenaire­s », commente-t-il alors, cité par le portail Internet Sina. Pour rendre service, Anelka entraîne au côté de Tigana, qui reste finalement en place. Il s’aligne même à plusieurs reprises en tant que milieu défensif. Mais la vedette peine à trouver ses marques, n’inscrivant que trois buts en une saison. Il ne conserve sa double-casquette que deux petits mois. À l’arrivée, Shenhua finit 9e de la Super League, bien en deçà des objectifs. Anelka met les voiles au bout de neuf mois, après avoir négocié une rupture de contrat sans indemnité.

Une sulfureuse pige en Algérie

À l’orée 2015, Anelka (36 ans), en fin de course, pose ses valises en Algérie, où l’attend un contrat de dixhuit mois au NA Hussein Dey, un club sulfureux de la capitale. Barré par le règlement de la fédération (2), l’attaquant signe finalement en tant que directeur sportif et conseiller spécial du président Mahfoud Ould Zemirli, qu’il a rencontré à Dubaï. « J’ai une affinité avec l’Algérie ,raconte-t-il alors à la télé locale, parce que j’ai grandi avec beaucoup d’amis algériens en banlieue parisienne. [...] En fait, les gens me disaient que j’avais un caractère algérien. J’ai été très touché parce que c’est un peuple très fier. Je suis fier mais pas arrogant. » L’histoire s’enraye un beau matin du mois d’avril, alors qu’il dispense ses conseils à l’entraîneur des gardiens : le consultant de luxe est verbalemen­t pris à partie par l’entraîneur de l’équipe première, Meziane Ighil, un ancien du club qui a fait toutes ses classes avec Rabah Madjer. Des insultes fusent, des membres du club sont obligés de séparer les deux hommes, rapporte le journalist­e Nabil Djellit (3). « On ne s’est pas battus comme l’avait rapporté la presse à l’époque, et c’est justement ça que je voulais éviter. Parce que quand il y a mon nom dans la presse dans ce genre d’embrouille­s, c’est toujours moi le fautif », réagit l’ancien prodige du PSG en novembre dernier.

Anelka démissionn­e dans la foulée de l’altercatio­n. La parenthèse algérienne a duré quatre mois.

Escapade au pays de Gandhi

Été 2014. Le foot s’éveille en Inde, terre de cricket. Jamais avare de voyage, tricard en Angleterre depuis le scandale de la quenelle (4), Anelka pose ses valises dans le pays de Gandhi. La pige de quatre mois – le championna­t se déroule d’octobre à décembre – est bien payée. Une pléiade de stars (Pirès, Trezeguet, Del Piero, Materazzi, ou encore Ljungberg) est aussi de la partie.

Avec son talent, le natif du Chesnay (35 ans) rejoint le Mumbai City FC, à Bombay, l’une des huit franchises de l’Indian Super League, en claquettes. Deux buts en sept matches, et quelques caviars : son rendement lui offre un nouveau contrat l’année suivante, où il portera la double casquette d’entraîneur­joueur. « J’aimerais remercier les dirigeants de me confier ce poste. Je suis très impatient de relever ce nouveau défi dans ce nouveau rôle », indiquait-il alors. Sur le terrain, Mumbai ne décolle pas. Pire, le bail de la star est émaillé de plusieurs altercatio­ns avec les joueurs – et notamment Sunil Chhetri, le capitaine de la sélection indienne. Après un piteux match nul (1-1) concédé à domicile face à un mal classée, Anelka jette l’éponge. « Je pense que je ne reviendrai pas. Parlez-en à la direction de l’équipe, déclare l’ancien joueur du Real Madrid en novembre 2015. La principale raison des mauvais résultats de l’équipe est son manque de combativit­é. Vu la façon dont nous jouons, nous ne méritons pas d’être en demies. »

Tribulatio­ns wallonnes

À l’automne 2015, tandis qu’il évolue en Inde, le nom d’Anelka est cité au Royal Géants Athois, dit Ath, club belge évoluant en quatrième division. En Wallonie, le coach, l’adjoint, les supporters, tout le monde s’emballe. En voilà un prompt à redorer le blason du 14e du championna­t, entonne la vox populi .« En janvier, Nicolas va prendre les choses en main. Sur le papier, il sera mon assistant. Mais en réalité, ça sera tout à fait différent. Il sera le patron », s’enthousias­me le coach Pascal Michel.

Même le quotidien Le Parisien indique que la star aurait racheté le club, sa licence, et épongé ses dettes, « moyennant un chèque estimé à 320 000 euros ».

Mais début novembre, Anelka dément, explique n’être président qu’à titre « honorifiqu­e ».« J’ai été contacté par un fonds d’investisse­ment, ou un groupe, ou une personne en particulie­r, appelez-le comme vous voulez, indique le joueur de 36 ans à l’AFP. Cette personne était intéressée pour acheter un club. Cette même personne m’a nommé président à titre honorifiqu­e et m’a demandé de composer une équipe de jeunes joueurs français, belges et d’autres nationalit­és. Je l’ai fait, ce pour quoi vous m’avez aperçu sur les terrains. C’est tout et c’est très, très simple. » Le champagne reste au frais. Anelka est aperçu lors de quelques rencontres amicales. En coulisses, le club vacille. Après deux déménageme­nts vers les communes de Fleurus, puis de Renaix, l’Ath cesse ses activités à l’automne 2015.

1. Dans cette mini-crise, Shenhua, qui ne gagne que deux matchs sur cinq de Super League chinoise, remercie trois entraîneur­s adjoints amenés en Asie par Tigana.

2. Un règlement de la Fédération algérienne empêche de recruter un joueur étranger âgé de plus de 27 ans.

3. publié le 29 avril 2015 sur francefoot­ball.com

4. Lors d’un match de Premier League, il célèbre son premier but de la saison en faisant une quenelle en référence au geste popularisé par l’humoriste et militant antisémite Dieudonné. Le geste, qui fit scandale outre-Manche, a été condamné par la ministre des Sports de l’époque Valérie Fourneyron.

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(Photo Laurent Martinat) Avec Nicolas Anelka, l’extraordin­aire rencontre souvent le rocamboles­que.

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