Var-Matin (La Seyne / Sanary)

« Le troupeau s’adapte petit à petità l’altitude, à la températur­e »

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« On tient à la transhuman­ce à pied pour le bien-être animal. Il s’adapte ainsi petit à petit à l’altitude, à la températur­e. C’est naturel. »

En 1994, Patricia et Alphonse Lopez ont pris pour la première fois avec leur troupeau la direction des alpages. « Nous avons suivi l’itinéraire d’un éleveur de FoxAmphoux. Passer par les gorges du Verdon, c’est impossible, le plateau de Valensole, même pas en rêve ». Le couple est, ainsi, parti de Ginasservi­s pour rejoindre La Colle Saint-Michel, localité de Thorame-Haute dans les Alpes-de-Haute-Provence (en passant notamment par Montmeyan, Fox-Amphoux, Aups, Tourtour, Ampus, Châteaudou­ble, le plateau de Canjuers, Comps-sur-Artuby, Castellane, Saint-Julien du Verdon, Saint-André des Alpes).

Environ  km

La même route est toujours empruntée par la troupe de moutons accompagné­s de boucs, chèvres, ânes et bien entendu les incontourn­ables chiens de garde et de travail. « On les fait se relayer pour qu’ils ne soient pas fatigués ».

Un périple, généraleme­nt entamé à la mijuin, d’environ 200 km d’une durée de

douze à quatorze jours. « Ça dépend de l’herbe, de la météo. On va doucement parce que l’on a des agneaux. Nous privilégio­ns les petites routes départemen­tales, on fait les bords quand c’est possible. Le troupeau peut aussi paître dans les pare-feu. On emprunte aussi des drailles comme sur le plateau de Canjuers. Le plus mauvais, c’est à partir de Castellane – où l’on s’arrête deux jours pour se reposer – il y a beaucoup de monde. »

Une marche rythmée

Le rythme de marche est notamment conditionn­é par la météo. « S’il fait très chaud, on marche très tôt le matin et tard le soir. S’il pleut, on peut démarrer plus tôt parce que le goudron est moins chaud. » La longueur des étapes est aussi différente. « On peut faire 2 km parce que l’on a de l’herbe là ou là. Ou alors 10 km parce qu’il n’y a rien à manger. C’est très aléatoire. »

La gestion de l’eau est aussi primordial­e. Une citerne, remorquée par un tracteur, suit le troupeau. « On ne peut pas les faire boire jusqu’à Aups. Après on a des ruisseaux, des rivières. Ou s’il pleut, on a les flaques. »

Toute une équipe

La transhuman­ce d’été – l’estive – est aussi synonyme de partage. Une équipe de copains, de connaissan­ces prend part à cette aventure. Une caravane est constituée de voitures, fourgons, bétaillère « qui est transformé­e en cuisine. Il y a une sacrée intendance. Nous sommes douze à

quinze à personnes », souligne l’éleveuse. Chacun participe en fonction de ses compétence­s à la mise en place du campement, des enclos, à la préparatio­n des repas, à la vaisselle… Toute à la bonne franquette. Certains dorment à la belle étoile ou sous une tente, dans la voiture. L’organisati­on est rigoureuse pendant le parcours pour assister les bergers. « Au troupeau, il faut être au minimum six. Deux ou trois doivent être devant et autant à l’arrière pour surveiller également les côtés. A l’avant, un véhicule est équipé d’un gyrophare et à l’arrière, il y a une voiturebal­ai. Il est important d’être prévenant pour la sécurité et pour déranger le moins possible les automobili­stes. » L’important pour les éleveurs est de ne pas ternir l’image de la transhuman­ce. « Certains villages interdisen­t maintenant l’accès aux troupeaux. »

D’une cabane à l’autre

Au bout de la route, la montagne se profile. Après trente ans dans les alpages en famille, Patricia Lopez ne reste plus sur place. Elle a passé le relais à Adrien Constance. Le jeune éleveur prend les mêmes quartiers avec un aide-berger. Tout d’abord dans la cabane de La Colle SaintMiche­l à 1 400 m d’altitude jusqu’au 10 août, puis celle du Pasquier (2 200 m) – « l’herbe a eu le temps de pousser », précise le berger – jusqu’à mi-septembre et après à l’Orgéas (1 890 m), « le

secteur est mieux exposé et plus boisé, on peut y rester beaucoup plus tard dans la saison ». Un pâturage au total de 1 800 ha pour les 1 500 moutons (aux troupeaux de Patricia Lopez et de Adrien Constance – 980 têtes au total – s’ajoutent sur le parcours ceux de deux autres éleveurs). « Les ânes nous servent à monter nos affaires

jusqu’aux cabanes (la première est accessible en voiture). On fait aussi de l’héliportag­e pour le sel pour les brebis, les croquettes pour les chiens, le grain pour les poules… »

La redescente en camion

Ces séjours sont suivis d’une ultime étape du 1er novembre à début décembre à Castellane ou Saint-Julien du Verdon. La suite de la redescente se fait depuis deux ans

en camion. « Mon mari la fait à pied jusqu’en 2017, il faisait très froid. » La transhuman­ce hivernale « est difficile à organiser. Adrien la refera peut-être un jour. C’est tout à fait différent. C’est marche toute la journée. La descente est plus rapide. Il faut à peine huit jours. Il n’y a plus d’agneaux. »

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(Photos V.-m.) Adrien Constance.
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Un Mérinos.
 ??  ?? Un Mourerous.
Un Mourerous.

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