Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Noé Preszow l’échappé belge

Le premier album de ce Bruxellois de 26 ans fait l’effet d’une bonne bourrasque. De la chanson bouillonna­nte et houleuse, qui lui vaut d’être nommé ce soir dans la catégorie Révélation masculine aux Victoires de la musique.

- AMÉLIE MAURETTE amaurette@nicematin.fr

Tu m’dis que tout s’danse, même la gêne, même la haine, même l’errance. Que tout s’danse, la solitude, l’état de siège, l’état d’urgence. »

On pourrait se dire : encore un petit malin qui voudrait qu’on enflamme les dancefloor­s malgré nos dépression­s. Décrivant mollement l’angoisse contempora­ine sur des rythmes urbains bien calibrés. On en serait lassé d’avance. Et on ferait fausse route. Si ce n’est pas déjà fait, tendez donc une oreille aux chansons de Noé Preszow. Ce Bruxellois au nom slave, d’origine polonaise, grec et moldave a 26 ans et, depuis quelques mois, il est partout. Ses morceaux À Nous et Que tout s’danse tournent allègremen­t sur les radios, généralist­es ou plus pointues. Et ce vendredi soir, il sera sur la scène des 36e Victoires de la musique, nommé, face au rappeur Hatik et au chanteur Hervé, dans la catégorie Révélation masculine de l’année.

Son premier album, À Nous , est bouclé. Rempli d’émotions brutes et de textes intelligen­ts, de mélodies qui entêtent et d’une véritable énergie derrière une apparente nonchalanc­e. Porté par le single du même nom, qui semble génération­nel presque malgré lui, grâce à des paroles comme : « À nous qui sommes là qui tombons comme chacun, dans le panneau, dans les réseaux, dans le vide et le tropplein, mais qui nous préparons à quand ce sera fini, quand il faudra se parler et redevenir ami ». « Quand je l’ai écrit, il y a trois-quatre ans, j’étais seul dans ma chambre avec mon micro et j’avais le sentiment que le monde était en train de changer, explique “Prèchof” à l’autre bout de la ligne. Il change tout le temps, mais je sentais qu’on arrivait à une sorte d’overdose d’écrans, de réseaux et que tout ça allait péter. C’est une chanson sentimenta­le… » De la chanson française en somme, teintée de pop, de basse un peu funk ou de clavier quatre-vingt. Avec de jolis choeurs ou en simple guitare-voix. Qui, finalement, se démarque assez du fameux « mélange des genres » dont tout le monde se réclame aujourd’hui.

Barbara et les Choeurs de l’Armée Rouge

« Le côté dansant, scandé, fait aussi partie de mon ADN mais c’est vrai que cet album est très chanson. En fait, beaucoup de choses sur ce disque sont en réaction au premier confinemen­t. J’avais commencé à enregistre­r en octobre 2019 et j’ai tout recommencé, le confinemen­t a eu pour effet que, quand je suis retourné en studio avec les musiciens, j’avais besoin que ça chante, que ça joue. Finalement, je crois que ce qui continue de nous toucher, quelles que soient les époques, ce sont les mélodies. Elles gardent un pouvo ir particulie­r. »

Celles qui l’ont bercé, lui ? « Barbara, Brassens et les Choeurs de l’Armée rouge. (rires) C’était comme ça dans la famille. Ma musique est peut-être un mélange entre Barbara et les Choeurs de l’Armée rouge, c’est pas complèteme­nt absurde. À six ans, j’ai découvert Renaud. Le rock des années 1970-80 à douze… Je suis très sensible aux voix. C’est le point commun à ce que j’écoute. Le murmure, ça va si c’est Leonard Cohen ! J’aime Bob Dylan, Patti Smith. Indochine aussi, a eu une place très importante. J’adore Johnny Hallyday, Daniel Balavoine. Je n’ai aucun complexe par rapport à ce qu’on dise chanson populaire ou intello. » Il cite Christophe aussi. Se rêve en artiste accompli mais intègre. « Ça m’a toujours paru évident que je ne ferai que ça, enfin je ne sais rien faire d’autre, glisse-t-il. Le parcours auquel j’aspirais, ceux que j’aimais, c’est ça. J’ai toujours aimé les artistes qui font leur route à leur façon, les télécroche­ts, tout ça, pour moi ça n’existe pas. Je suis super content d’être aux Victoires, je suis à peine sur les réseaux, ce n’est pas ma grande passion, alors arriver dans les oreilles des gens via

‘‘ Une sorte d’overdose d’écrans, de réseaux”

‘‘ Les télécroche­ts, tout ça, pour moi ça n’existe pas”

des émissions de radio ou de télé de qualité, ça me plaît bien. Cette année, dans ma catégorie, on est tous un peu plus âgés que d’habitude, on a roulé notre bosse, personne n’en est à son premier jet, je trouve ça bien. » Son disque aurait dû sortir aujourd’hui mais, court-circuité par l’actualité sanitaire, son lancement vient d’être décalé au 2 avril. Peu importe, le Belge, qui écrit, compose et fait le pied de grue devant les maisons de disques depuis ses années collège, sort ses titres les uns après les autres. Imperturba­ble et déterminé.

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À Nous. Noé Preszow.  titres. (Tôt ou Tard)

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