Pillages archéologiques : préfecture et douane unies
Les deux entités ont signé hier une convention de lutte contre le trafic de biens culturels, véritable fléau en Provence notamment. Le but de cette alliance : partager les bonnes pratiques
Sur les tables, on a mis les petits objets dans les grands. Les services des douanes ont étalé les prises effectuées, sortes de trophées modernes qui nous racontent tant d’histoires anciennes, dont la grande histoire de l’humanité. Il y a là lampes, céramiques, statuettes en bronze, de la menue monnaie aussi, de la vraie, des deniers de Cassius (42 ans avant J.-C.), des deniers de Tatia (89 av. J.-C.) avec leur équivalent prix sur le marché souterrain (entre 50 et 200 euros), de la monnaie barrée de la mention MA comme Marseille, et puis de la fausse déjà…
Autant dire que c’est à un grand et bien joli voyage dans le temps que nous ont conviés hier la préfecture et la douane judiciaire de Marseille. Entre 2015 et 2021, soixante perquisitions ont été effectuées en Paca, 120 plaintes et signalements ont été réalisés et plus de 30 000 objets saisis.
Le détecteur, cet intrus
Parmi eux, un intrus, ce que l’un des spécialistes nomme avec justesse « l’arme du crime », le fameux détenteur de métaux, que l’on croise habituellement au petit matin ou à la tombée de la nuit sur les plages méditerranéennes, mais qui sert aussi à piller des objets précieux sur les sites archéologiques.
Plus d’un millier de ces détecteurs circuleraient dans notre région, preuves de la gourmandise pour cette quête d’objets anciens qui hélas ne se dément pas et qui mine notre patrimoine culturel. Le préfet Christophe Mirmand aime à dire tout l’enjeu de la lutte contre ces chercheurs d’or de l’ombre. Parce que, résume-t-il, la Provence est « à la confluence des civilisations latines ». Les trafiquants savent qu’ils risquent moins que dans les stups : jusqu’à
Une convention destinée à lutter contre le pillage des biens culturels de toute nature, sur terre comme en mer : pièces de monnaie, amphores… En bas, à droite, le préfet de région Christophe Mirmand (deuxième à gauche) et Nathalie Becache (troisième), directrice du Service d’enquêtes judiciaires des finances, ont livré les clés de leur coopération.
7 500 euros d’amende en cas de fouille non autorisée, mais sept ans quand même en cas de détérioration de site et dix ans en cas de blanchiment. Pour l’occasion, trois membres du parquet de Marseille se sont déplacés, dont la procureure Dominique Laurens. Le but : partager les bonnes pratiques et consolider l’action de l’État en région. Pour Nathalie Becache, directrice du Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), la palette est large de ces hommes de l’ombre. Elle va du « collectionneur indélicat » au« réseau criminel ». Xavier Delestre, conservateur régional de l’archéologie, a joliment dit hier tout l’enjeu de cette chasse aux chasseurs : « Le pilleur va appauvrir la recherche scientifique. Comme une scène de crime privée de ses objets. »