Var-Matin (La Seyne / Sanary)

François Trucy et sa ville, tout un roman !

A 89 ans, l’ancien maire vient de publier un « grand almanach » qui compile les événements notables de « Telo Martius à la Métropole ». Plongée dans le roman toulonnais avec un passionné

- PROPOS RECUEILLIS PAR MATHIEU DALAINE mdalaine@nicematin.fr

C’est tout sourire que François Trucy nous reçoit ce jour-là, dans son appartemen­t avec vue imprenable sur la Méditerran­ée. L’oeil pétillant, l’ancien maire de Toulon enchaîne les bons mots en même temps que le récit d’événements, petits ou grands, qui ont marqué l’histoire de la capitale du Var.

Car c’est bien là l’objectif de cette entrevue : évoquer avec lui Jadis - Grand Almanach - L’Histoire de Toulon du Telo Martius romain… à la Métropole, qu’il vient de publier aux éditions Livres en Seyne (300 pages - 20€). Un ouvrage qui relate, année par année, ou presque, ce qu’il s’est passé depuis 2000 ans au pied du Faron.

Pourquoi un livre sur l’histoire de Toulon ?

Une trentaine d’auteurs se sont déjà intéressés à l’histoire de Toulon. Sauf qu’à chaque fois, elle était évoquée sous un angle bien précis, qu’il s’agisse de l’arsenal, de l’eau ou du siège de la ville. Là, j’offre une vue d’ensemble, des origines à nos jours.

Qu’est-ce qui fait que cette histoire intéresse autant ?

En raison de l’ouverture de Toulon vers la mer, déjà. Son implicatio­n dans les guerres du royaume de France, les départs de la conquête coloniale ou la participat­ion aux grands conflits de l’Europe lui donnent une certaine dimension. Il n’y a guère que les guerres de religion qui n’ont pas eu de retentisse­ment ici.

Quand Toulon est-elle rentrée dans l’Histoire ?

Ça commence avec les Romains qui voient dans ce lieu, alors sans importance, une teintureri­e. Il faut savoir que l’empire romain avait ses fantaisies. Le pourpre était le signe du pouvoir régalien et il n’existait alors que deux sites en Gaulle à même de lui fournir cette couleur, dont Toulon. Ici, grâce à un coquillage de la rade et un parasite du chêne kermès, deux sources permettaie­nt de produire du pourpre en abondance. Pendant un temps indéfini, tout le trafic maritime tournait donc autour de ça.

Toulon, alors, ne s’appelait pas Toulon…

‘‘ Le sabordage est la plus grande tragédie de l’histoire toulonnais­e”

C’était Telo Martius, en effet. Bien plus tard, on a aussi été rebaptisé Port-laMontagne. En , après le siège de Toulon et sa reconquête par les armées révolution­naires, la Convention nationale a ainsi voulu punir Toulon en la renommant !

Comment vivait-on dans le Toulon du Moyen-Âge ?

Les conditions de vie n’y étaient pas bonnes. L’eau y arrivait péniblemen­t. C’était une ville minuscule, enfermée dans des remparts entre le cours Lafayette, la rue d’Alger et la place Puget. C’est cette cité, un peu misérable, qui a été occupée six mois durant par Barberouss­e. En , le corsaire ottoman est allé jusqu’à transforme­r la cathédrale en mosquée !

Si on ne devait retenir que trois événements de l’histoire de Toulon ?

Je citerais le siège de , d’abord. Malgré des remparts dans un état épouvantab­le, malgré une armée de   hommes en face, ce siège a tourné court. À l’époque, c’était vraiment « Qui tient Toulon, tient la Méditerran­ée ». Il y a eu la peste de , ensuite, où Toulon perdra   de ses   habitants ! Le confinemen­t à la mode de l’époque, « la serrade », c’était des gens enfermés chez eux, avec un trou pour faire passer la nourriture et l’eau, et le droit de n’ouvrir que pour sortir les morts ! Mais la plus grande tragédie, selon moi, ça reste le sabordage de la flotte, en .

A vous entendre, l’Histoire de Toulon c’est donc surtout des tragédies…

Les épreuves franchies par les Toulonnais ont été nombreuses. Les Barbaresqu­es sont par exemple venus trente fois ici, rafler les population­s pour en faire des esclaves ! Mais je dirais quand même que, Toulon, c’est surtout la Marine, l’arsenal et ce qui en part, autour desquels la vie entière a tourné pendant des siècles. Depuis Henri IV jusqu’à la fin de la dernière guerre, il n’y a pas eu d’autres économies que celle de la Marine. La Défense, c’était une monocultur­e industriel­le.

En , la meilleure défense, c’était surtout l’attaque…

C’est vrai, il y a cette époque où les Toulonnais sont devenus pirates euxmêmes… y compris avec leurs élus locaux ! Au XIIIe siècle, il ne faisait pas bon passer au large de Toulon quand on était un navire marchand avec une belle cargaison. Toulon avait une très mauvaise réputation !

Toulon fait-elle aujourd’hui une place suffisante à son passé ?

Ce qui est frappant avec l’histoire de Toulon, c’est que vous la voyez ressurgir à intervalle­s réguliers, comme une source. Récemment, la découverte de l’épave de La Lune ,le trois-mâts échoué de Louis XIV, ou celle du sous-marin Minerve ont fait l’actualité. Concernant La Lune, j’espère qu’une place lui sera faite dans le cadre d’un site sur l’archéologi­e sousmarine. Il pourrait être implanté dans l’ancien arsenal du Mourillon.

En tant qu’ancien maire de Toulon, vous apparaisse­z factuellem­ent dans les dernières pages de votre almanach. Comment aimeriez-vous qu’on se souvienne de vous ?

Je n’ai rien fait d’historique, même si je suis heureux que le Zénith, le Palais des congrès ou le centre Mayol soient sortis de terre. Finalement, j’appréciera­is qu’on se souvienne de moi comme quelqu’un qui aime profondéme­nt sa ville.

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