Comment la Vallée du Silence est entrée dans la légende
Dans les années trente, les gamins du Beausset en mal d’aventures et de grands espaces l’avaient baptisée Vallée du Silence… Mais son vrai nom était – et est toujours – Vallée du Gourganon, en référence au ruisseau qui la traverse entre les lieux-dits Sainte Magdeleine et les Faremberts. Et c’est aux Faremberts, territoire du Castellet limitrophe du Beausset, que ledit ruisseau se confond avec le Grand Vallat, petit fleuve côtier qui, après avoir longé Le Brûlat et s’être faufilé entre Le Castellet village, La Cadière-d’Azur et Le Plan du Castellet, va se jeter en baie de Bandol. Ce patronyme de Vallée du Silence devait être bon, puisqu’il est resté ancré dans la mémoire collective des Beaussetans. « Pourtant au début ce n’était qu’une blague ! » s’amuse Etienne Basso, 91 ans, mémoire vivante du village qui allait y faire les quatre cents coups avec ses copains quand il était enfant. « Nous y étions tranquilles, loin des regards indiscrets. »
Si cette vallée pouvait parler, elle en aurait des choses à raconter… « C’est là par exemple que lors de l’été 1944 des familles entières venaient se réfugier la nuit, quand les bombardiers en route pour Toulon survolaient le village ; ils défilaient à basse altitude dans un grondement sourd qui nous terrorisait. » Etienne Basso se souvient aussi que «le 20 août 44, jour de la Libération, des salves d’obus allemands de gros calibre tirés du Gros Cerveau pour ralentir l’avance alliée, s’y étaient abattues après avoir frôlé les toits du village ; l’un d’eux avait même explosé en heurtant le faîte d’une habitation, sans faire de victime heureusement. »
Connu surtout des anciens, des joggers, des cyclistes, des promeneurs et des jardiniers du dimanche (la mairie y loue des parcelles), ce vallon bucolique ne raisonne plus aujourd’hui des clameurs enfantines. Sa sérénité n’est troublée que par le clapotis paisible du ruisseau et la “mine d’or” surgie de l’imaginaire des gosses n’attire plus personne.
« Elle se trouvait au confluent du Gourganon et du Grand Vallat, poursuit Etienne. Malgré la fièvre typhoïde, on allait s’y baigner et pêcher des anguilles. »
Et de se rappeler encore ce jour où « une paysanne agacée a pris nos vêtements, s nous obligeant à rentrer culs nus au village… La honte ! » Une autre fois, la bande avait claironné avoir découvert un squelette de dinosaure sur un chantier d’adduction d’eau. «
Le premier adjoint au maire avait fait interrompre les travaux pour permettre à un archéologue de constater ce qui, au bout du compte, n’était que les os d’un âne enterré là pendant la guerre. » Toute une époque !