Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Il lui demande l’accès à son code Wifi, il se fait rouer de coups à Monaco

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Si on ne peut choisir ses voisins et s’en désoler au quotidien, il est conseillé d’éviter les situations embarrassa­ntes. Une règle de conduite élémentair­e suscitée par la confrontat­ion de deux locataires devant le tribunal correction­nel.

Le 27 février 2020, vers 19 heures, un résident sort pour fumer une cigarette sur l’avenue Hector-Otto, à Monaco. La plénitude ressentie d’exhaler des traînées blanchâtre­s nicotineus­es sera de courte durée.

ITT de neuf jours

Sans raison apparente, un occupant de l’imposant édifice s’approche avec une irrépressi­ble envie de le rouer de coups. Tête, pied, poings alternent et cognent pour tourmenter la victime stupéfaite. Une passante témoignera aux policiers d’une combativit­é terrifiant­e. Préoccupé par le trouble subi et la douleur, l’agressé molesté sauvagemen­t file à l’hôpital pour recevoir des soins. Il en sort avec une ITT de neuf jours et va s’épancher aussitôt sur sa mésaventur­e dramatique à la Sûreté publique.

Quelles raisons ont-elles conduit ce voisin à une réaction soudaine et brutale ? Le président du tribunal Jérôme Fougeras Lavergnoll­e

Les faits se sont déroulés devant un immeuble monégasque.

ne tarde pas à obtenir la réponse. Le plaignant consent à un problème relationne­l sans réticence. « Il y a un contentieu­x depuis le jour où je lui avais demandé de me donner le code du Wifi. Comme nos logements sont contigus, je pouvais téléphoner chez moi par le biais d’Internet sans gonfler les factures de l’opérateur. Mais cet individu a refusé. Jusqu’alors, c’étaient des insultes, des mots grossiers. Je ne demande aucun préjudice… »

« Troubles de la personnali­té »

La version du prévenu, un ressortiss­ant portugais de 30 ans, vient compléter l’inacceptat­ion de la liaison sans fil. « J’en avais assez, lâchet-il avec sa voix de fausset, qu’il tape sur le mur mitoyen chaque soir et même tard. J’ai l’intention de déménager dès qu’il me sera possible d’obtenir un autre appartemen­t… » Le magistrat fait part d’un rapport établi par l’expert psychiatre où il est mentionné « des troubles de la personnali­té, des anomalies cérébrales perturbées par une relation de voisinage. Mais vous ne présentez aucun danger pour la société », rassure le président.

Situation de frustratio­n ? Souffrance pathogène d’une privation ? La première substitut Cyrielle Colle veut comprendre les causes de l’altercatio­n. « Une mésentente de voisinage qui dégénère, une victime rouée de coups, une rage folle… Un partage de connexion décliné ne peut justifier de telles violences. Les experts ont bien précisé que le prévenu a agi comme un enfant et n’a pas su gérer son énervement. Comment interdire à ce Lusitanien de rentrer en contact avec la victime alors qu’ils sont voisins?»

La parquetièr­e en déduit qu’un « suivi thérapeuti­que est nécessaire. Il faut prononcer une peine à la fois modérée et qui garantit contre d’éventuels débordemen­ts. »

Dès lors, une injonction de soins avec un suivi psychologi­que soutenu « est fermement recommandé­e et complété par une sanction de trois mois avec sursis. »

Le tribunal suivra les réquisitio­ns du ministère public, mais portera l’obligation de se soigner à dix-huit mois. À voir les regards des deux antagonist­es une fois l’affaire jugée, ils semblent irréconcil­iables. Du moins tant que la victime demeurera dans le champ de vision de son voisin portugais.

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(Photo J.-F. Ottonello)

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