Possible procès pour Vincent Bolloré
Si l’homme d’affaires français a reconnu sa culpabilité pour des faits de corruption au Togo, le tribunal demande davantage...
Échec et coup de théâtre pour Vincent Bolloré : le milliardaire français pensait échapper à un procès à Paris pour corruption au Togo en reconnaissant sa culpabilité et en payant 375 000 euros d’amende, mais une juge a refusé hier de valider cet accord, estimant « nécessaire » qu’il soit jugé en correctionnelle.
Vincent Bolloré, Gilles Alix, directeur général du groupe Bolloré, et Jean-Philippe Dorent, directeur international de l’agence de communication Havas (filiale de Bolloré), étaient venus confiants au tribunal judiciaire de Paris. Au terme d’une enquête confiée en 2013 à des juges d’instruction et de deux mois de négociations avec le Parquet national financier (PNF), les trois hommes avaient accepté une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) et le paiement d’une amende de 375 000 euros, a révélé hier l’hebdomadaire l’Obs.
« Plaider-coupable »
La CRPC - sorte de « plaider-coupable » à la française - repose sur un accord entre le Parquet et l’auteur d’une infraction, qui reconnaît sa culpabilité et paie une amende.
Mais un juge doit ensuite donner son feu vert lors d’une audience en présence du ministère public, des mis en cause et de leurs avocats. Lors de l’audience hier, la holding et MM. Bolloré, Alix et Dorente ont reconnu avoir utilisé les activités de conseil politique de la filiale Havas afin de décrocher la gestion des ports de Lomé au Togo et de Conakry en Guinée au bénéfice d’une autre filiale, Bolloré Africa Logistics, anciennement appelée SDV. SDV avait obtenu la gestion du port de Conakry quelques mois après l’élection à la présidence guinéenne d’Alpha Condé fin 2010 et avait remporté la concession à Lomé peu avant la réélection en 2010 au Togo de Faure Gnassingbé. Ces deux politiques étaient alors tous deux conseillés par Havas. Les protagonistes de l’affaire avaient obtenu en juin 2019 l’annulation par la cour d’appel de Paris de leur mise en examen pour une partie des infractions concernant la Guinée, pour cause de prescription. Hier, le procureur du PNF a souligné que l’amende de 375 000 euros acceptée par les trois hommes d’affaires correspondait à la peine d’amende maximale encourue. Mais à la surprise de la défense comme de l’accusation, la juge du tribunal judiciaire a rejeté l’accord.
En correctionnelle ?
« Les peines proposées par le procureur et acceptées par vous sont inadaptées » au regard de la gravité des faits et il est « nécessaire qu’ils soient jugés par une juridiction correctionnelle », a-t-elle dit aux trois hommes.
Les infractions, reconnues par la 17e fortune française en 2020, selon le classement du magazine Challenges ,etles deux dirigeants, ont « gravement porté atteinte à l’ordre public économique » et « à la souveraineté du Togo », a-t-elle estimé. La décision sur un procès revient désormais à un magistrat.
Me Baratelli, avocat de l’industriel, du groupe et de M. Alix n’a pas souhaité commenter la décision.