« C’est un rêve d’enfant »
Double championne de France en salle du triple saut, Rouguy Diallo revient sur son titre. La Varoise, licenciée à Nice, livre aussi ses ambitions olympiques et sa conception des Jeux. Teddy (Tamgho, son coach, NDLR)
Pour se qualifier aux Jeux de Tokyo (23 juillet-8 août), Rouguy Diallo a jusqu’au 29 juin pour atterrir à 14,32 m et signer les minima. Elle devra battre son record extérieur d’un centimètre. « Plus tôt j’y arrive, mieux ce sera », lâche la Niçoise de 26 ans, formée à La Valette, après le gain d’un troisième titre national seniors, le deuxième d’affilée en salle. À Miramas (Bouches-du-Rhône), ses 13,96 m ne l’ont pas emballé et elle espère mettre le turbo.
Vous avez conservé votre couronne de championne de France en salle…
C’est toujours une case à cocher, mais je ne suis vraiment pas contente de la performance. Il y a le titre, mais ça ne s’est pas du tout passé comme je le souhaitais. J’avais réalisé , m sur dix foulées à Amiens il y a deux semaines, puis , m à Eaubonne (le février). J’étais censée avoir plus de vitesse dans ce championnat sur seize foulées. Je suis frustrée. Il faut que je parle avec mon coach (le champion du monde Teddy Tamgho) et ma psy (Catarina Lopes), parce que j’ai du mal à prendre du recul pour le moment, à comprendre d’où vient l’erreur.
Vous réalisez , m à votre premier essai…
Vu mes sensations à l’entraînement et sur le concours, je m’attendais à bien mieux. J’espérais autour des , m pour me rapprocher de mon record (, m en extérieur et et , m en salle, Ndlr).
Cette performance intervient alors que vous avez réalisé une saison blanche l’an dernier…
Retrouver ce niveau-là m’a fait plaisir, mais j’ai peutêtre manqué de repères. Je n’avais pas fait une grande compétition depuis un an. La saison blanche se justifiait par l’adaptation de ma préparation par rapport au report des Jeux. Avec mon entraîneur, on voulait repartir sur une grosse préparation. Alors qu’on n’aurait pas eu l’occasion de le faire dans une saison classique, on a travaillé certaines choses.
Lesquelles ?
En pleine saison, c’est l’aspect technique qui vous fait atteindre certaines performances. Mais en début d’année, on a tourné la période plus creuse à notre avantage. On a effectué des gros cycles de travail sur le plan physique. On a pris plus de risques, augmenté les charges en musculation et joué davantage avec la fatigue. On se fait un peu plus mal, on est allés puiser loin. En temps normal, c’est impossible.
La course d’élan, la gestion du stress, progressez-vous dans ces secteurs ?
Ça va de mieux en mieux. On a travaillé là-dessus et sur la vitesse. Plus on avance et plus les sensations sont meilleures. Ce n’est qu’une question de patience.
Tirez-vous des bénéfices de vos échanges avec votre psychologue ?
Oui. On travaille ensemble depuis et j’ai réussi à changer plein de paramètres en compétition. Je pense à l’appréhension de la
Le week-end dernier, la pensionnaire du Nice Côte d’Azur Athlétisme, formée à La Valette et qui s’entraîne à Paris, a conservé sa couronne nationale en salle. Elle s’est imposée avec un triple bond à , m à son premier essai.
‘‘ aime vous mettre à l’épreuve, tester vos faiblesses”
planche et la peur du zéro pointé. On avance petit à petit et ça reste perfectible. Tous les jours apparaissent de nouvelles problématiques.
Une fois qualifiée pour les Jeux, que viserez-vous ?
J’y vais pour être la meilleure, sans me fixer un objectif de place. Ce serait se mettre des limites.
Il paraît compliqué de lutter avec Caterine Ibargüen ou Yulimar Rojas, les reines de la discipline…
Oui, je suis quand même réaliste…
L’or, ce sera plutôt pour Paris- ? Vous aurez ans ....
Ce sera l’objectif de ma carrière. C’est pour ça que je fais de l’athlétisme. Je veux atteindre le plus beau podium qui soit. J’ai été bercée par les championnats du monde, les Jeux. Petite, quand je voyais les athlètes à la télé, j’étais émerveillée. C’est un rêve d’enfant. Je n’avais pas d’idole particulière, mais voir un athlète remporter les Jeux, quelle que soit sa discipline, c’est marquant. Derrière une course de ’’, il y a quatre ans de travail. C’est “ouf” et hyper beau.
Comment vivez-vous l’incertitude entourant la tenue des Jeux ?
Je continue de m’entraîner. On peut nous confirmer leur tenue au dernier moment. Si je ne suis pas prête, je me sentirai bête. Certains communiqués disaient qu’ils seraient maintenus quoi qu’il arrive donc je reste optimiste.
Avez-vous peur d’attraper le virus ?
Je ne suis pas du tout dans la psychose. J’ai l’impression que ça se passe beaucoup dans la tête. J’ai fait au moins une dizaine de tests et ils ont toujours été négatifs. J’ai pourtant côtoyé des gens qui l’ont eu, été cas contact et je n’ai jamais été positive. Il faut juste prendre des précautions.
Teddy Tamgho a-t-il modifié et adapté ses entraînements ?
Il innove beaucoup sur le travail psychologique, même si ses séances gardent le même squelette et qu’il n’y a pas de nouveaux gadgets. Il aime vous mettre à l’épreuve, tester vos faiblesses.
Vous avez bouclé votre licence de commerce. Vous sentez-vous plus libérée dans votre carrière sportive ?
Ça enlève un grand poids.
Je l’ai finie en novembre en rendant un mémoire de soixante pages sur les barrières du succès sportif en France. Je suis dans une école anglo-saxonne, il fallait traiter le sujet en anglais et je peux vous dire que j’ai galéré (rire). Je suis actuellement en stage de fin d’études et je serai diplômée d’ici quelques mois.
À terme, de quoi rêvezvous ?
(Elle souffle) De beaucoup de choses (rire). J’ai toujours aimé dessiner et m’intéresser à l’art. J’aimerais m’orienter vers une école d’architecture à Paris en septembre. J’ai envie d’accumuler du savoir. Et si ça me plaît, pourquoi pas créer une entreprise en lien avec l’architecture et devenir auto-entrepreneuse.