Une loi « brutale », qui « manque d’ambition »
Cinq personnalités du monde politique et syndical ont confronté leurs idées sur la réforme, hier, dans le studio du Groupe Nice-Matin. Un débat à revivre sur tous nos sites.
Cinq personnalités du monde politique et syndical ont débattu en direct dans le studio du Groupe Nice-Matin ce vendredi : Alexandra Martin, députée RN de la 8e circonscription des Alpes-Maritimes ; Philippe Pradal, député Horizons de la 3e circonscription des Alpes-Maritimes ; Philippe Lottiaux, député RN de la 4e circonscription du Var ; Enzo Giusti, LFI/Nupes 06 et Gérard Ré, secrétaire général de la CGT 06. Interrogés par Denis Carreaux, directeur des rédactions du Groupe NiceMatin, et Christian Huault, rédacteur en chef, ils ont détaillé leurs positions, tout en se confrontant aux arguments de leurs contradicteurs. Une émission en partenariat avec Radio Emotion.
La nécessité de la réforme Alexandre Martin :
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« Cette réforme est nécessaire, mais le texte proposé par le gouvernement manque de souffle, d’ambition, de vision. Nous voulons le rendre plus juste, plus équilibré ».
■ Gérard Ré : « Pendant la période de concertation, les organisations syndicales ont fait des propositions. Cette loi n’en reprend aucune ».
■ Philippe Lottiaux : «La méthode du gouvernement, c’est la brutalité, le mensonge. C’est en réalité un problème de finances publiques. L’État veut trouver un moyen de récupérer les 800 milliards de déficit qu’il a crées depuis 2017, les 150 milliards de déficit budgétaire annuels. »
■ Enzo Giusti : « Pourquoi faudrait-il sauver notre système de retraite par répartition actuel ? C’est un système qui fonctionne. La France est le pays d’Europe qui a le moins de retraités en situation de pauvreté ».
■ Philippe Pradal : « Hier, on avait cinq actifs pour un retraité, aujourd’hui c’est 1,7. La réalité démographique est là : on vit de plus en plus vieux, il y a donc plus de retraités. Cette réforme donne une visibilité. Qui aurait pu prévoir la crise sanitaire ? Nous sommes entrés dans un mode incertain. Sauvons le système de retraite par répartition tel qu’il existe plutôt que d’attendre que tout aille mal pour réformer ».
Leurs propositions
■ Alexandra Martin : « Pour sauver le système de retraite, il va falloir voir plus loin. Nous proposons un système hybride : répartition et capitalisation.
Avec pour avantages de favoriser le pouvoir d’achat des retraités, donner de l’oxygène aux finances publiques et pouvoir investir dans les entreprises. Les 1 200 euros brut de pensions minimum, c’est une proposition LR. On demande aussi que les pensions de retraite soient versées uniquement sur un compte en France ». ■ Enzo Giusti : « Cette réforme est idéologique. Le gouvernement dit qu’il faut diminuer les dépenses. Soit. Alors il faut taxer davantage les ultra-riches ».
■ Philippe Lottiaux : « Cette réforme va occasionner des coûts sociaux supplémentaires : plus de personnes au RSA, plus de dépenses de santé. Il faut plutôt travailler sur la natalité, la réindustrialisation, le localisme ».
■ Gérard Ré : « Jamais notre pays n’a été aussi riche. Mais la part allouée aux salaires est de plus en plus petite quand celle allouée aux bénéfices
est de plus en plus élevée. Il faut changer cela ».
Les femmes
■ Philippe Pradal : « Les 1200 euros brut vont majoritairement profiter aux femmes. On est en train de travailler sur les trimestres [la règle actuelle, qui permet aux femmes de valider 8 trimestres par enfant, soit deux années de cotisations, pourrait disparaître, Ndlr]. Mais aujourd’hui, les femmes actives ont une carrière moins hachée et sont mieux payées que leur mère et leur grand-mère ».
■ Gérard Ré : « Les 1 200 brut ne toucheront que quelques milliers de personnes. La réalité, c’est que beaucoup de femmes occupent des emplois à temps partiel et mal payés toute leur vie. Si on leur proposait un emploi à plein temps, mieux payé, voilà comment on contribuerait à financer les retraites ». ■ Enzo Giusti : « Vous toucherez
1 200 brut si vous avez une carrière complète au Smic. Très peu de femmes sont concernées. Comment peut-on avoir la décence d’affirmer que la situation des femmes sera meilleure qu’avant ? »
■ Alexandra Martin : «Il faut aider les femmes à concilier vie personnelle et vie professionnelle. Aujourd’hui, certaines sont obligées de choisir entre travailler et avoir un enfant. C’est inacceptable ».
L’emploi des seniors et la pénibilité
■ Enzo Giusti : « On parle d’un index senior. On a mis en place un index égalité hommes-femmes, ça ne marche pas. Il faut le rendre plus contraignant, sinon c’est de la poudre aux yeux. On vit plus longtemps, mais on a une hausse des accidents de travail. Il faut que certaines professions puissent partir à
la retraite à 60 ans ».
■ Philippe Lottiaux : « Arrêtons d’ajouter des contraintes aux entreprises avec cet index senior. La réalité, c’est : que fait-on d’un senior dans une crèche qui a le dos cassé, ou d’un cariste ? »
■ Alexandra Martin : « Nous voulons aller plus loin que l’index senior et proposons des négociations obligatoires pour les entreprises de plus de 300 salariés, qui devront fournir un plan d’action pour l’emploi des seniors, pour faciliter leur reconversion, pour les garder, s’enrichir de leur expérience ».
■ Philippe Pradal : « Il faut un renforcement des moyens affectés à la pénibilité, qui nécessite un accompagnement médical. Je crois beaucoup aux négociations de branche pour savoir, au plus fin, quelle est la réelle pénibilité ».
■ Gérard Ré : « S’il n’y a pas de contraintes, les entreprises ne n’appliqueront pas l’index senior ».