PATRICK CE TOIT EST POUR TOI
À l’automne 1986, la compagnie Roc in Lichen donne un stage de danse-escalade à Antibes. Patrick Berhault est là. Je vais les saluer et faire quelques pas de danse-escalade avec eux. J’ai entendu parler du Toit d’auguste, que Patrick a abandonné car un mouvement lui résiste. Je lui demande si je peux l’essayer. Je pars à La Turbie et trouve la méthode qui permet enfin de tenter sa réalisation. Le mouvement est trés physique et ne me permet pas d’essayer souvent. Patrick est à nouveau titillé par l’idée de libérer la voie. Nous essayons ensemble la nouvelle méthode et il est maintenant très motivé. Nous vivons un grand moment d’émulation dans le siège du
Toit d’auguste. Je suis à quelques doigts de la réaliser mais je dois rentrer à Paris. Je reviens quelques mois plus tard, physiquement préparé. Mais, au pied de la voie, ma volonté est si puissante que mes avant-bras gonflent comme si j’avais trop grimpé. Je fais un blocage psychologique. Mes bras sont durs et cette sensation m’empêche de m’engager à fond. Je dois m’arrêter de grimper quelque temps pour faire redescendre la pression. J’assure Patrick. C’est comme si je ne pouvais pas faire la première avant lui. Maintenant, il veut la réussir, je crois même qu’il veut faire la première. Je ne peux pas être en rivalité avec lui. Cette voie me refuse, elle est pour lui. Patrick ce toit est pour toi. Je n’y suis jamais retourné. Patrick a réalisé la première ascension. Je découvre que trop de volonté dans la réussite est contreproductif pour moi. Patrick est mon aîné, comme un grand frère. J’aime son ouverture vers la dimension artistique. La diversité qu’il apporte à l’escalade me conforte dans mes intuitions artistiques. Il embrasse les facettes de l’escalade. Depuis qu’il n’est plus là, je porte un peu de sa flamme.