LA CONQUÊTE DE L’ESPACE
Lorsqu’un studio d’étudiant part à la conquête d’un pan d’histoire, Paris s’éveille en beauté. Au Panthéon, l’architecte d’intérieur Estelle Griffe rénove vingt-sept mètres carrés en réinventant le plaisir de vivre dans un petit espace.
Au Panthéon, la rénovation d’un 27 m2 réinvente le plaisir de vivre dans un petit espace.
La façon dont Estelle Griffe aborde un projet est toujours à la fois précise et portée par son enthousiasme. Une combinaison qui croise des lignes de force, dégage des perspectives et des échappées visuelles pour capturer la lumière et le paysage. Sa réflexion sur l’agencement de ce studio se nourrit de la vue patrimoniale. Dôme du Panthéon, tour Clovis du lycée Henri IV, vestige de l’abbaye Sainte-Geneviève, église Saint-Étiennedu-Mont. Comment réunir visuellement dans un mouchoir de poche ces éléments d’histoire et en jouir au quotidien ? Quelques cloisons supprimées et trois fenêtres alignées, ouvertes sur ce Paris historique, créent une respiration et démultiplient l’espace. Une structure-sculpture en bois, modélisée par Estelle Griffe et réalisée par Volume Vert, ébéniste agenceur, est la clef du projet. Elle existe sans s’imposer, guide le regard, « intimise » l’espace nuit et délimite la cuisine sans jamais vraiment cloisonner l’espace. La structure blanche est en effet autoportante et laisse apparaître le plafond et les poutres. Par un effet de miroir, les pans coupés et le motif origami de la structure sont une réponse aux volutes « gothique flamboyant » de l’église voisine. La cohérence gra- phique avec le paysage est bien là et se manifeste également par des touches subtiles avec les motifs des carreaux de ciment turquoise de Mosaic del Sur, la discrète suspension origami « Myrsa » de La Redoute et la photographie en noir et blanc de l’architecte Jean-Brice Viaud. Le soir venu, le studio se vit de l’intérieur avec ces rappels discrets d’un pan d’histoire immuable. Cultivant le souci du détail, la décoratrice imagine un parquet en chêne posé en diagonale pour étirer l’espace et dont le point de fuite épouse la dynamique des carreaux ciment. Côté confort, une minibuanderie sépare la salle de douche en zelliges vert d’eau des toilettes. Deux mètres soixante-dix de placards linéaires, ici et là, sont bien utiles, et une isolation thermique et phonique a été réalisée sur mesure pour ce quartier étudiant festif ! Habillée de lin bleu, la chambre indépendante devient cocon. La cuisine, pensée comme une anfractuosité dans la roche, s’anime ou se fait toute petite selon les heures. Inspirée par le genius loci, Estelle Griffe l’a été, sans l’ombre d’un doute. À l’écoute de clients qui savent lire son enthousiasme et lui accorder confiance et carte blanche, sa touche poétique réinvente des volumes pour composer un espace à vivre totalement inédit.