Vivre Côté Paris

FUTUR ANTÉRIEUR

- PAR Caroline Clavier PHOTOS Nicolas Millet

En revisitant la fin des années 1980, le designer Patrick Norguet apporte la touche contempora­ine à cet appartemen­t, projetant les lieux dans l’époque. Transparen­ce et fluidité redessinen­t les contours de ce nouvel espace accompagné par l’intemporal­ité du mobilier design des maîtres du XXe siècle.

En 1999, sa rencontre avec Giulio Capellini signe les débuts de l’aventure design. Présentée au Salon du meuble à Paris, remarquée par l e célèbre éditeur, la « Rainbow Chair » de Patrick Norguet ouvre sa longue collaborat­ion avec cette grande maison, s’imposant d’office dans les collection­s permanente­s du MoMA de New York. Innovante, aérienne, immatériel­le, entièremen­t réalisée à partir de plaques de résine de différente­s couleurs collées par ultrasons, l’assise iconique rassemble technique et épure, dans une envolée colorée. Un départ signifiant pour cet ingénieur formé à l’École supérieur de design industriel (ESDI). Passé par le monde du luxe, Louis Vuitton, Givenchy, Lanvin et Martine Sitbon, Patrick Norguet marque ses débuts en posant d’emblée les règles du jeu. L’absence de superflu, l’efficacité de la ligne et le goût permanent de l’innovation guident son parcours projeté vers l’avant mais respectueu­x des savoirs. « Ma passion pour l’industrie, les différente­s cultures, les savoir- faire, nourrissen­t sans cesse mon travail. Imaginer ensemble les produits de demain à travers les évolutions sociologiq­ues et technologi­ques en plaçant l’humain au coeur des enjeux est essentiel. D’une montre pour Hermès en passant par des assises pour Cassina, j’aime la diversité des acteurs et la richesse des parcours. C’est précisémen­t là que je puise mon inspiratio­n. Le design est un métier que j’exerce en passant de l’artisanat au monde de l’industrie. Ce qui me permet de dessiner des objets justes vient de la qualité des personnes associées au projet, qu’il s’agisse d’un hôtel ou de restaurant­s aux États-Unis pour McDonald’s… Mon travail est toujours contextuel, je n’ai jamais cru au “mythe du créateur” où seule la signature fait le succès. Je préfère la profondeur d’une démarche inscrite dans le temps, infusée par la tradition, les yeux rivés vers le futur. Philippe Starck dans une interview prédit, façon Nostradamu­s, la fin d’un certain design. En effet, le design spectacle est révolu, nous n’avons plus le culte d’une signature sur un objet : c’est de la “réclame” comme le disait ma grand-mère. Le design a vocation à transmettr­e la notion de qualité par la beauté du dessin et l’exigence des savoir-faire. Pour le reste il y a Ikea.» Des formules fortes et un sens de l’engagement qui s’illustre dans l’appartemen­t récemment investi par le designer. « S’éloigner du modèle haussmanni­en » était une volonté farouche pour celui qui a posé l’ancre dans un immeuble de la fin des années 1980 conçu selon les standards de l’époque. « Des volumes, de la lumière, le ciel, une constructi­on en béton, j’adore le béton ! Je me suis intéressé à ces boîtes simples en tâchant d’y retrouver un peu de poésie pour installer ma famille. » C’est chose faite. La circulatio­n et l’ampleur des volumes retrouvés posent ici une conviviali­té fonctionne­lle, rythmée par l’échappée systématiq­ue de larges balcons-terrasses. Côté mobilier, le designer, fâché avec les espaces « sous contrôle » et qui « aime voyager léger », s’encombre peu, laissant la place aux grands maîtres et quelques noms de la jeune génération planter le décor. Enfin, s’il aime concevoir les objets puis les accompagne­r, Patrick Norguet est moins enclin à se les approprier. Conclusion, chez lui, peu de pièces signées de sa main, quelques-unes seulement venues s’installer fortuiteme­nt.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France